Thèse soutenue

Écologie hivernale des abeilles mellifères : contribution des traits d'histoire de vie des individus et des colonies au succès d'hivernation

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Auteur / Autrice : Étienne Minaud
Direction : Fabrice Requier
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Agro-écologie
Date : Soutenance le 21/06/2024
Etablissement(s) : université Paris-Saclay
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Agriculture, alimentation, biologie, environnement, santé (Paris ; 2015-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Évolution, Génomes, Comportement et Écologie - Évolution, génomes, comportement et écologie (Gif-sur-Yvette, Essonne ; 2015-....)
Référent : AgroParisTech (France ; 2007-....)
graduate school : Université Paris-Saclay. Graduate School Biosphera (2020-….)
Jury : Président / Présidente : Emmanuelle Baudry
Examinateurs / Examinatrices : Denis Michez, Hervé Colinet, Cédric Alaux
Rapporteur / Rapporteuse : Denis Michez, Hervé Colinet

Résumé

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Dans les régions tempérées, les basses températures et le manque de ressources florales font de l'hiver une période critique pour la survie des abeilles mellifères, Apis mellifera, qui hivernent grâce à un ensemble d'adaptations à l'échelle des individus et à l'échelle des colonies. Mais depuis plus de 30 ans, de forts taux de mortalité hivernale sont observés mondialement, questionnant la durabilité du secteur apicole et celui de nombreux systèmes agricoles dépendant du service de pollinisation. Ces mortalités sont induites par de multiples facteurs de stress biotiques et abiotiques agissant en combinaison. Cependant, nous montrons par une synthèse de littérature que leurs rôles dans les mécanismes d'effondrements restent peu documentés, soulignant un manque de connaissance sur l'écologie hivernale des abeilles mellifères. Cette lacune est en partie due au défi technique associé au suivi des abeilles en hiver, sachant que les suivis traditionnels par l'ouverture des ruches perturbent la thermorégulation sociale de la colonie. Toutefois, la démocratisation des «Information and Communications Technology» (ICT) offre désormais de nouveaux outils de suivis automatisés et peu invasifs. Dans ce contexte, l'objectif de cette thèse est de mieux comprendre les mécanismes déterminant le succès ou l'échec de l'hivernation des abeilles mellifères, par le suivi automatisé de traits d'histoire de vie des individus et des colonies. Par ailleurs, nous visons à développer des indicateurs pour prédire les effondrements des colonies en hiver et en conditions naturelles. Le développement d'un outil de mesure de la température en plusieurs points de la ruche a permis de suivre la grappe que forment les abeilles pour se protéger du froid, et ainsi d'étudier la thermorégulation sociale des colonies durant l'hiver. Cet outil a été déployé sur le terrain pour suivre des colonies disposées le long d'un gradient climatique Européen, couvrant des climats méditerranéens, océaniques et continentaux. Ces suivis ont permis d'établir des indicateurs évaluant la santé des colonies hivernantes. Basés sur l'hétérogénéité des températures au sein de la colonie, ces indicateurs distinguent les périodes de survie hivernale des périodes d'effondrement, permettant ainsi d'anticiper les mortalités. Ils permettent également de suivre la reprise de croissance en hiver en mesurant la présence et la taille du couvain, deux métriques que nous avons trouvées positivement corrélées au gradient climatique européen. En hiver, la survie de la colonie dépend de la présence d'abeilles d'hiver, correspondant aux dernières générations d'abeilles émergentes en automne. Par des suivis individuels par Radio Frequency IDentification (RFID), nous montrons qu'en plus de leur longévité prolongée, les abeilles d'hiver ont plus d'activité de vol que les abeilles d'été. Leur activité de vol peut être alloué avant et après l'hiver, et nos résultats semblent indiquer que ces vols pré-hivernaux n'influencent ni la longévité, ni les performances d'activité de vol des abeilles après l'hiver. Aussi, nous montrons que seule une petite proportion d'abeilles d'hiver survit et participe aux activités de vol de la colonie au printemps, jouant ainsi un rôle crucial dans la relance de la colonie après l'hiver. Mis en contexte, nos résultats soutiennent le rôle crucial des abeilles d'hiver et de la thermoregulation sociale dans la réussite ou l'échec de l'hivernation des colonies d'abeilles mellifères. Les outils électroniques développés et les indicateurs associés permettent de dégager des perspectives appliquées pour limiter les mortalités hivernales des colonies. Nous discutons également de l'acceptation de l'apiculture de précision et montrons que les apiculteurs sont prêts à adopter ces outils électroniques, bien que des attentes supplémentaires subsistent. Enfin, nous mettons en exergue l'incertitude entourant l'avenir de l'hivernation, face aux changements climatiques.