Thèse soutenue

Dyslexie développementale et méthodes de remédiation : Conception et évaluation d'un programme d'intervention multimodale et multi-componentielle fondé sur les approches phonologique, visuo-attentionnelle et intermodalitaire

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Auteur / Autrice : Karine Harrar-Eskinazi
Direction : Sylvane FaureBruno De Cara
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Psychologie
Date : Soutenance le 28/06/2023
Etablissement(s) : Université Côte d'Azur
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sociétés, humanités, arts et lettres (Nice ; 2016-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire d'anthropologie et de psychologie cliniques, cognitives et sociales (Nice ; 2016-)
Jury : Président / Présidente : Fanny Meunier
Examinateurs / Examinatrices : Brigitte Stanké
Rapporteurs / Rapporteuses : Franck Ramus, Séverine Casalis

Résumé

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Parmi les troubles du langage écrit, la dyslexie développementale est définie comme un trouble spécifique de l'apprentissage du langage écrit dont les répercussions sur les apprentissages scolaires, durables et délétères, nécessitent des réponses thérapeutiques efficaces. Les études sur la remédiation de la dyslexie développementale sont généralement fondées sur l'hypothèse causale d'une altération plus ou moins exclusive d'un processus cognitif sous-jacent. Or, chez la majorité des lecteurs dyslexiques, de multiples déficits cognitifs sous-jacents, variables selon les individus, seraient simultanément responsables des troubles comportementaux de la lecture et de l'orthographe. Ainsi, une multifactorialité étiologique de la dyslexie développementale entraîne une hétérogénéité sémiologique qui s'exprime dans une variabilité clinique très complexe dont les contours imprécis peuvent entraîner un diagnostic incertain, ce que nous avons nommé variabilité nosographique.Dans ce contexte théorique et à la lumière des modèles à déficits multiples de la dyslexie développementale, nous avons élaboré un protocole de remédiation multimodale et multi-componentielle ciblant à la fois les processus cognitifs sous-jacents audio-phonologiques, visuo-attentionnels et intermodalitaires et les troubles de la lecture et de l'orthographe, selon une approche qui combine plusieurs entrainements conçus en fonction du profil sémiologique individuel. Grâce à la participation de 94 orthophonistes, nous avons évalué les bénéfices de ce protocole à partir d'un essai clinique, multicentrique, longitudinal, randomisé, croisé, mené en trois phases sur une durée totale de 16 mois, auprès de 144 lecteurs dyslexiques âgés de 8 à 13 ans. Lors de la première phase, les participants répartis aléatoirement en deux groupes, ont bénéficié pendant 2 mois de consultations de rééducation orthophonique hebdomadaires sans entraînement intensif. Lors de la deuxième phase, les participants ont bénéficié, outre leur suivi hebdomadaire, de trois types d'interventions intensives informatisées d'une durée de deux mois chacune. Les deux premières interventions ciblent les processus audio-phonologiques et visuo-attentionnels (dont l'ordre est contrebalancé entre les deux groupes) puis sont suivies d'une intervention qui cible les processus intermodalitaires. La construction des trois programmes d'entraînement s'est appuyée sur la littérature scientifique, l'expertise des orthophonistes, la plainte du patient (décision partagée de soin) et sur le contexte environnemental. Lors de la troisième phase, les interventions intensives ont été interrompues et les consultations hebdomadaires de rééducation orthophonique maintenues pendant deux mois. A l'issue du protocole de remédiation, les effets de l'intervention multimodale et multi-componentielle intensive ont montré une amélioration significative de l'efficience en lecture (d de Cohen=2,3), de la compréhension en lecture (d de Cohen=0,9) et de l'orthographe (d de Cohen=0,78), comparée à une rééducation orthophonique hebdomadaire (première phase), et ce quel que soit l'ordre des interventions. L'analyse de cas multiples a révélé qu'à l'issue du protocole de remédiation 52 % des participants n'avaient plus de trouble de la lecture. En conclusion, nos résultats montrent l'efficacité d'une remédiation intensive multimodale et multi-componentielle dans le traitement de la dyslexie développementale. Ces résultats confirment le caractère davantage curatif que compensatoire de nos interventions et ouvrent une nouvelle piste pour la remédiation de la dyslexie développementale.