Thèse soutenue

Les mouvements du neutre dans le théâtre de Bernard-Marie Koltès

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Auteur / Autrice : Guillaume Fargas
Direction : Christophe Bident
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Arts de la scène
Date : Soutenance le 03/06/2022
Etablissement(s) : Amiens
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale en Sciences humaines et sociales (Amiens)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherche en arts et esthétique (Amiens ; 2008-....)
Jury : Président / Présidente : Yannick Butel
Examinateurs / Examinatrices : Marion Boudier, Christophe Triau
Rapporteur / Rapporteuse : Amos Fergombé, Isabelle Moindrot

Mots clés

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Mots clés contrôlés

Résumé

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Mon travail de recherche sur ''Les mouvements du neutre dans le théâtre de Bernard-Marie Koltès'' a pour objectif de démontrer la pertinence de la notion de ''neutre'' dans l'approche dramaturgique de Koltès, avec la création scénique d'un ''fragment'' de la pièce ''Dans la solitude des champs de coton''. Le théâtre de Koltès trouve son origine dans le désir et se répète dans une présence physique en suspension. Pour l'auteur, l'acteur ne cesse d'envisager de quitter la scène, toujours en mouvement, en tension vers autre chose, en proie au désir et à son absolu. Face à cette réalité, et à la nécessité de l'écrire sur la scène, il fallait remonter à une autre source, les spectacles de ''Dans la solitude des champs de coton'' réalisés par Patrice Chéreau et sentir l'écart entre la première et dernière version afin de nommer l'émergence matérielle d'une épure du désir qu'incarnent les deux acteurs dans un espace vide au milieu de la lumière. Ce nom est pour moi le neutre car ce dernier, par nature, échappe à toute définition, à tout classement. Il est selon la conception de Barthes, ce qui déjoue le paradigme, et permet la suspension, ''l'épochè''. Il est la respiration nécessaire face à la surabondance de signes, face à la nécessité de la position, face à l'enfermement du vouloir-saisir. Avec Barthes, Blanchot propose une autre perception, plus littéraire car liée à l'écriture. Elle est présente dans la thèse car elle est dans la perception profonde de l'univers de Koltès, dans la nuit, dans l'ombre, dans le néant, ni le clair, ni l'obscur, et qui surprend toujours à la limite entre l'être, l'abîme et l'écriture. En m'appuyant sur ces deux approches, la première partie étudie le champ conceptuel du neutre dans les dimensions suivantes : le paradigme, l'espace, le personnage, le langage et le genre. Pour chacun de ces items, il ressort une incapacité à définir le conflit dans les pièces de Koltès qui reste toujours en suspension, de cerner un espace physique et unique, d'établir une interprétation des personnages, de comprendre la langue dans sa réalité signifiante ou encore de jouer selon une identité établie, sexe et/ou genre. La deuxième partie aborde la part perceptuelle du neutre à savoir son désir et l'amour qui peut l'accompagner. Elle est le lieu de la résonance entre les œuvres de Koltès, ''La Marche'', ''La nuit juste avant les forêts'' et ''Dans la solitude des champs de coton'' et l'œuvre de Roland Barthes, ''Fragments d'un discours amoureux''. Les trois œuvres dramatiques se retrouvent dans les figures du discours amoureux, ''s'abîmer'', ''l'épochè'' et le ''Non-Vouloir-Saisir''. La résonance entre les œuvres et les figures permet d'augmenter leur intensité, d'éclairer leur lecture et de rendre compte de l'aspect physique, sensible du neutre dans sa puissance de désir face à l'autre. Cette partie apporte la preuve du montage sensible inhérent à la mise en scène de Koltès, la nécessité d'entrer dans la nuit, celle que décrit Saint Jean de la Croix dans ''La Nuit Obscure'', la ''bonne'' nuit qui échappe à tout vouloir-saisir et laisse l'autre dans sa liberté, dans sa beauté. Riche de ces deux parties, de ces deux temps, la troisième partie s'écrit comme une épreuve, celle de la scène et de la mise en scène d'un fragment de ''La Solitude'' afin de retranscrire sur le plateau ces dimensions du neutre. En partant du travail de Chéreau, j'ai pris le temps d'interroger le statut du texte, théâtre ou non-théâtre, le désir présent entre les deux personnages dans leurs langues, leurs corps invisibles à travers la danse, l'art martial et le tango et enfin l'espace entre lumière et ombre. Ces étapes nous conduisent à une création qui reprend les figures de Barthes (l'Abîme, l'épochè et le Non-Vouloir-Saisir) afin de les interpréter sur la scène et de vérifier la pertinence matérielle du neutre dans la mise en scène de l'écriture de Koltès mais aussi son ouverture sur l'amour comme enjeu du dialogue entre le Dealer et le Client