Agir pour la reconnaissance du dommage écologique des marées noires : attachements, stratégies et justification. Cas de l'Amoco Cadiz et de l'Erika
Auteur / Autrice : | Claire Bouteloup |
Direction : | Laurent Mermet |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences de gestion |
Date : | Soutenance le 30/11/2015 |
Etablissement(s) : | Paris, AgroParisTech |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Agriculture, alimentation, biologie, environnement, santé (Paris ; 2015-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre des sciences de la conservation (Paris ; 2003-....) - AgroParisTech (Nancy) |
Jury : | Président / Présidente : Anne-Caroline Prévot-Julliard |
Examinateurs / Examinatrices : Laurent Mermet, Anne-Caroline Prévot-Julliard, Franck-Dominique Vivien, Laura Centemeri, Julien Weisbein, Laurent Thévenot | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Franck-Dominique Vivien, Laura Centemeri |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
En quarante ans, la Bretagne a subi en moyenne un naufrage de pétrolier tous les cinq ans. A chaque marée noire, le dommage écologique génère des mobilisations massives, des controverses sur la scène publique et la remise en cause des dispositifs de régulation. Malgré son évidence sensible, ni le régime international d'indemnisation (FIPOL) ni le Droit national n'intègrent l'atteinte environnementale comme motif supplémentaire de responsabilité financière pour les opérateurs. Les dommages de la pollution sont pris en compte à travers, d'un côté, les préjudices économiques et matériels et, de l'autre, les dommages purs à la biodiversité, sous la forme d'actions de restauration des milieux naturels. Les critiques pointent la faiblesse de la dissuasion : les coûts d'une marée noire pour les acteurs du transport maritime pétrolier sont considérés dérisoires au vu des profits et donc peu incitatifs à des comportements plus prudents. Elles réclament également la reconnaissance des dommages écologiques par le Droit, qui ouvrirait la possibilité de conséquences juridiques et économiques concrètes aux faits de pollutions et l'indemnisation des atteintes à l'environnement.Cette recherche s'intéresse aux processus de changement vers la reconnaissance des dommages écologiques des marées noires. Il ne s'agit pas de questionner l'efficacité de la prise en compte des dégradations environnementales par le dispositif de gestion ou les voies juridiques susceptibles de soutenir son intégration dans le Droit - déjà largement explorées - mais d'étudier les réalités du dommage écologique et d'analyser les actions de changement mises en oeuvre par des acteurs pour susciter leur reconnaissance. Cette analyse est conduite à partir de deux cas d'étude, la marée noire de l'Amoco Cadiz (1978) et celle de l'Erika (1999).Nous explorons une voie alternative et élargie de compréhension des atteintes de la marée noire, en considérant que la marée noire endommage aussi des relations plurielles entre hommes et environnement. Grâce à la sociologie pragmatique développée par Thévenot dans L'action au pluriel (2006) nous montrons les réalités plurielles du dommage écologique en termes d'attachements d’hommes à des non humains, que ni la description des écologues, ni celle des attachements de type marchand ne parviennent à saisir. Par ailleurs, à partir d'une analyse stratégique de la gestion de l'environnement (Mermet et al., 2005), nous étudions la manière dont les acteurs élaborent l'action de changement et comment celle-ci porte le dommage écologique. Nous nous intéressons tout particulièrement à la manière dont les enjeux de l'action induisent certains choix de qualification du dommage au tribunal.La recherche propose ainsi de nouvelles connaissances sur le dommage écologique, qui pourraient en renouveler la définition (intérêt théorique). Questionner les atteintes aux attachements pourrait également ouvrir une voie intéressante pour soutenir de nouvelles formes de justification sur la scène publique et favoriser la reconnaissance juridique des dommages écologiques (intérêt opérationnel). Enfin, elle articule deux cadres de pensée jusque-là disjoints en sciences humaines et qui se révèlent complémentaires. En donnant à voir les réalités plurielles, individuelles et collectives, des dynamiques environnementales, cette recherche propose d'enrichir la compréhension de la mise en oeuvre d'une action de changement au-delà des analyses de l'action collective (Cefaï, 2007).