Thèse en cours

La mise en œuvre de la justice pénale négociée au regard du rôle prédominant du ministère public : élaboration d'un cadre évaluatif

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Auteur / Autrice : Marc-Étienne O'brien
Direction : Antoine BottonAlexandre Stylios
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Droit
Date : Inscription en doctorat le 01/01/2018
Etablissement(s) : Toulouse 1 en cotutelle avec Université Laval
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Droit et Science Politique
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : IRDEIC - Institut de Recherche en Droit Européen, International et Comparé

Résumé

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Traditionnellement, la justice pénale maintient une nette séparation entre les fonctions de poursuite et de jugement. Le ministère public poursuit, c'est-à-dire évalue la suffisance de la preuve et l'opportunité des poursuites, choisit la qualification juridique appropriée, déclenche les procédures judiciaires, s'assure de leur bon déroulement, choisit la stratégie à adopter au procès, présente sa théorie de la cause au tribunal et exerce, au besoin, les voies d'appel. Le tribunal juge, c'est-à-dire préside les débats, statue sur les questions de procédure, détermine la culpabilité et prononce la peine. Le procès classique, qui incorpore depuis quelques décennies les garanties du procès équitable, est maintenant concurrencé par un nouveau mode de jugement : la justice pénale négociée. Dans ce nouveau cadre, l'État, généralement représenté par le ministère public, encourage l'auteur présumé de l'infraction à consentir à être jugé selon une procédure simplifiée en lui offrant un traitement favorable sur le plan de l'accusation, des faits, de la peine ou de la procédure. L'État et l'auteur présumé épargnent ainsi les aléas et les coûts toujours plus élevés du procès. En plus de bénéficier d'un traitement avantageux, l'auteur présumé s'épargne le stress et la publicité d'un procès. Le recours à la justice pénale négociée suscite toutefois d'importantes préoccupations Premièrement, la justice pénale négociée se concilie difficilement avec les valeurs protégées par le procès équitable. En particulier, la valeur de l'autonomie individuelle est réduite à l'expression du consentement de l'auteur présumé à être jugé par le biais d'un mode de jugement simplifié qui ne présente pas toutes les garanties d'un procès équitable. La réalité de ce consentement, pourtant indispensable à la légitimité de la justice pénale négociée, n'est pas toujours assurée. C'est notamment le cas lorsque la pression exercée sur l'auteur présumé est si importante qu'elle le prive d'un choix réel. Deuxièmement, le fait d'inciter, parfois vigoureusement, les personnes judiciarisées à renoncer à la tenue de leurs procès peut augmenter la proportion de condamnations injustifiées. Enfin, le recours de masse à la justice pénale négociée peut entraîner un durcissement de la réponse pénale, un élargissement de la sphère de répression pénale et d'autres conséquences systémiques. Le fil commun entre ces préoccupations est l'exercice d'une pression par le ministère public sur l'auteur présumé afin de le convaincre de renoncer à la procédure régulière. À un degré supérieur d'abstraction, ce fil commun fait intervenir la valeur fondamentale de l'autonomie individuelle, que les sociétés libres et démocratiques comme le Canada, la France et les États-Unis sont censées protéger. Ce bilan pose le problème de la compatibilité de la justice pénale négociée avec les exigences de l'autonomie individuelle. Afin d'apporter un éclairage à cette question complexe, la présente thèse étudie la mesure dans laquelle le droit au Canada et le droit en France favorisent le respect des exigences de l'autonomie individuelle dans le cadre de la justice pénale négociée. La première partie de la thèse est consacrée au ministère public, véritable maître d'œuvre de la justice pénale négociée. Cette partie s'intéresse aux caractéristiques institutionnelles qui balisent les opérations du ministère public et influencent, parfois subtilement, la manière dont il exerce ses pouvoirs dans le cadre de la justice pénale négociée. Il s'agit des caractéristiques relatives à l'organisation, aux fonctions, aux devoirs et à la responsabilité du ministère public. L'étude de ces caractéristiques invite une réflexion sur une pluralité de thèmes, dont l'indépendance du ministère public, son statut, son devoir de rendre justice et l'effectivité du contrôle de ses activités. La seconde partie de la thèse est consacrée aux deux phases de la justice pénale négociée. Au cours de la phase administrative, le ministère public sollicite le consentement de l'auteur présumé par le biais d'incitations. Au cours de la phase judiciaire, le tribunal est appelé à entériner l'accord des parties et, plus rarement, à les en libérer. L'étude de la justice pénale négociée invite une réflexion sur plusieurs thèmes, dont la nature des incitations qui peuvent être déployées par le ministère public, les exigences relatives au consentement de l'auteur présumé et l'effectivité du contrôle judiciaire. Les droits étudiés sont mis en perspective à l'aide d'apports ponctuels de droit étranger, en particulier de droit américain. (résumé sujet à modifications)