Le travail, un objet d'attention pour le Conseil d'administration ? Une monographie en trois terrains
Auteur / Autrice : | Sébastien Winston |
Direction : | Pierre-Yves Gomez |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Sciences de gestion |
Date : | Inscription en doctorat le 10/10/2017 |
Etablissement(s) : | Lyon 3 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences économiques et de gestion (Lyon ; 2007-....) |
Mots clés
Résumé
En se focalisant sur la discipline du dirigeant, sur l’évaluation par les « nombres », et sur la création de valeur financière depuis les années 1980, la gouvernance s’est rendue comme « aveugle » à la réalité de l’entreprise et du travail. Par ailleurs, la clinique du travail enseigne que fondamentalement, le « travail réel » est invisible aux regards extérieurs. Si la connaissance du travail est impossible, nous faisons toutefois l’hypothèse que le Conseil d’administration peut y porter son attention. Le concept d’attention nous permet de saisir le travail non tel qu’il est ou devrait être, mais tel qu’il est perçu par le Conseil. Mobilisant la théorie de la firme basée sur l’attention (Ocasio, 1997), nous nous posons les questions de recherche suivantes : Quel est le contenu de l’attention au travail portée par le Conseil ? Quels sont les supports interindividuels, organisationnels, et institutionnels de l’attention au travail portée par le Conseil ? Pour répondre à ces questions, nous menons trois études empiriques. Considérant premièrement les indicateurs comme les dépositaires d’une « attention cristallisée », nous analysons le contenu des principaux référentiels extra-financiers (ESG) aujourd’hui disponibles. Considérant ensuite les rapports annuels d’entreprise comme les dépositaires d’une « attention mise en scène », nous analysons le contenu de dix années de rapports d’entreprises du CAC 40 et testons les relations entre la composition du Conseil et le contenu ainsi mis au jour. Considérant enfin le Conseil comme le dépositaire d’une « attention discutée », nous menons des entretiens afin d’étudier les dynamiques de l’attention au travail qui ont cours parmi les administratrices et administrateurs. Au niveau du contenu de l’attention, notre recherche met en évidence trois représentations du travail : le travail comme comportements à contrôler ; comme risques à gérer ; et comme capacités à valoriser. Nos résultats illustrent les nuances et ambivalences de chacune de ces manières de porter attention au travail. Au niveau des supports, nous montrons particulièrement l’impact de la composition du Conseil sur l’orientation de l’attention, en nous attardant sur le statut, l’expérience professionnelle, et le genre des membres du Conseil. Nous identifions par ailleurs le rôle important des dispositifs informationnels et des normes externes dans la construction de l’attention au travail. Nous tirons de ces résultats des propositions, dont nous précisons la validité et les limites. Du point de vue des enseignements théoriques, ces résultats permettent de mettre en évidence, par le biais de l’attention, le travail tel qu’il est perçu et appréhendé dans la diversité de ses problématiques au niveau du Conseil. Ils offrent l’occasion par ailleurs de relire le rôle du Conseil à la lumière de son attention au travail. Enfin, nos résultats renforcent l’hypothèse de la littérature selon laquelle l’attention n’est pas seulement un phénomène de la cognition individuelle, mais aussi un phénomène distribué à travers l’organisation. Du point de vue des enseignements pratiques, nos résultats indiquent des problématiques et solutions par le biais desquelles les praticiens de la gouvernance d’entreprise peuvent porter leur attention sur le travail. Afin de favoriser l’attention au travail, nos résultats invitent également à diversifier la composition du Conseil et à développer des dispositifs informationnels tels que les comités spécialisés.