Étude longitudinale et multiomique à la recherche de biomarqueurs fécaux ou salivaires associés au Syndrome d'Entérocolite Induite par les Protéines Alimentaires (SEIPA) chez l'enfant
Auteur / Autrice : | Anaïs Lemoine |
Direction : | Muriel Thomas, Karine Adel-Patient |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Génétique et génomique |
Date : | Soutenance le 02/07/2024 |
Etablissement(s) : | Sorbonne université |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Physiologie, Physiopathologie et Thérapeutique (Paris ; 2000-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Microbiologie de l'Alimentation au Service de la Santé humaine (Jouy-en-Josas) |
Jury : | Président / Présidente : Angèle Soria |
Examinateurs / Examinatrices : Guillaume Lezmi, Lisa Giovannini-Chami, Martin Larsen | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Stéphane Hazebrouck, Aude Remot |
Mots clés
Résumé
Contexte : Le SEIPA est une allergie alimentaire non IgE-médiée particulière, répondant à des critères diagnostiques précis. Le traitement est l'éviction des aliments en cause. Il n'existe pas de biomarqueur sérique confirmant le diagnostic, ou prédisant l'acquisition de la tolérance. Seul le test de provocation par voie orale (TPO) permet d'évaluer régulièrement la tolérance à l'allergène en cause. L'évolution est le plus souvent favorable chez l'enfant vers l'âge scolaire. Cependant, la sévérité des symptômes et l'absence d'IgE spécifiques justifient une recherche sur le SEIPA pour mieux comprendre la physiopathologie. Hypothèses : Le SEIPA serait associé à une dysbiose digestive, une dysimmunité locale au niveau digestif, une inflammation intestinale chronique, et une augmentation de la perméabilité intestinale. L'inflammation et la perméabilité seraient majorées lors d'une réaction allergique aiguë. Après acquisition de la tolérance, tous ces paramètres reviendraient à la normale. Objectifs : Décrire de manière longitudinale les microbiotes fécaux et salivaires des patients pédiatriques avec un SEIPA, pendant l'allergie et après la tolérance, ainsi que des biomarqueurs d'intérêt évaluant l'inflammation, la perméabilité et la dysimmunité digestive, comparativement à une cohorte de référence. Matériels et méthodes : Des prélèvements fécaux et salivaires ont été collectés chez les enfants avec un SEIPA suivi dans plusieurs hôpitaux de l'AP-HP, après le diagnostic sous régime d'éviction, et après acquisition de la tolérance, ainsi que chez des témoins appariés aux mêmes âges (ratio 1:1). Des prélèvements de selles supplémentaires ont également été récoltés avant et après les TPO. La composition du microbiote a été analysée par séquençage du gène de l'ARN r16s (V3-V4). La fonction du microbiote fécal a été estimée par dosage des acides gras à chaine courte (AGCC) (chromatographie en phase gazeuse). La calprotectine fécale, la neurotoxine dérivée des éosinophiles (EDN), les IgA sécrétoires fécales, et la zonuline fécale ont évalué l'inflammation, l'immunité et la perméabilité intestinale (ELISA).Résultats principaux : De décembre 2019 à mai 2023, 38 patients ont été inclus (âge moyen : 1,3 ans). A l'inclusion, les patients allergiques avaient une dysbiose fécale et salivaire, s'exprimant par une diminution de l'alpha-diversité, une béta-diversité différente, plusieurs genres bactériens différents, et une augmentation de l'abondance relative de l'acétate par rapport aux témoins appariés. Les patients allergiques n'avaient pas d'inflammation intestinale sous régime d'éviction (calprotectine, EDN), mais seulement de manière aiguë et transitoire après une réaction allergique. Les taux d'IgA sécrétoires fécales étaient plus élevés chez les patients allergiques que chez les témoins ou chez les patients tolérants. La zonuline était similaire entre les patients et les témoins. Après acquisition de la tolérance, chez les 22 patients devenus tolérants, les microbiotes fécal et salivaire se sont rapprochés partiellement de ceux des témoins. Les AGCC et les IgA sécrétoires se sont normalisés (augmentation de l'abondance relative du butyrate, baisse du taux d'IgA). Conclusions : D'après les résultats de cette cohorte, et selon les données antérieures de la littérature scientifique, les enfants avec un SEIPA ont une dysbiose intestinale avant le début de l'allergie, une dysbiose intestinale et salivaire pendant l'allergie jusqu'à l'acquisition de la tolérance, puis un retour du microbiote proche de celui d'enfants sains. La réponse immunitaire adaptative locale est exagérée au cours de la pathologie, avec une augmentation des IgA sécrétoires fécales chez les individus allergiques par rapport aux témoins, et une normalisation après la tolérance. Le rôle exact de ces IgA n'est pas clairement identifié.