Cinétique de recombinaison des plasmas hors-équilibre azote-argon
Résumé
Prédire les transferts d'énergie entre un plasma d'azote en recombinaison et son environnement est un enjeu majeur pour des applications telles que la rentrée atmosphérique, la combustion assistée par plasma, la fusion par confinement magnétique, et le traitement de surface. Ces transferts dépendent en partie de la densité de populations des états excités de N et N₂.Cette étude se concentre en particulier sur les phénomènes collisionnel-radiatifs importants pour la rentrée atmosphérique terrestre des véhicules spatiaux à hypervitesse v > 10 km/s. La prédiction du flux radiatif incident sur l'arrière-corps souffre de très larges incertitudes, que ce travail vise à quantifier et à réduire.En situation de déséquilibre fort, les populations des états électroniques et vibroniques de l'azote atomique et moléculaire (N et N₂) ne suivent plus une distribution de Boltzmann et dépendent des processus collisionnels et radiatifs. Nous avons développé un modèle collisionnel-radiatif électronique-spécifique pour N et vibronique-spécifique pour N₂, capable de prédire la densité des principaux états radiatifs de N/N₂ en fonction des paramètres du plasmas (températures, pression, degré d'ionisation). Le modèle inclut les processus-clés responsables du peuplement et dépeuplement des états excités.Le modèle CR est ensuite utilisé pour prédire les distributions internes hors-équilibre de N et N₂, mesurées récemment dans une expérience de recombinaison au laboratoire EM2C. L'expérience consiste en un plasma de N₂/Ar, initialement en équilibre thermodynamique local à ~7000 K et 1 atm, dont on force le refroidissement à ~5000-3000 K en quelques centaines de microsecondes par injection dans un tube refroidi par eau, de diamètre 1 cm et de longueur 10 ou 15 cm. A la sortie du tube, la surpopulation Sion de {N⁺, électron} vis-à-vis de N atteint ~10⁴-10⁵, et la surpopulation Sdiss de N(⁴S*) vis-à-vis de N₂(X,v=0) atteint ~10²-10³. Le modèle est capable de prédire la densité du 5ème multiplet de N (10.7 eV), principale source de rayonnement sur l'arrière-corps, à 20% près, et la densité des niveaux entre 11.7 et 12.2 eV à un facteur ~2-6 près. Ces différences sont faibles en comparaison du facteur de surpopulation Sion. Les simulations reproduisent les distributions vibrationnelles de N₂(B) et N₂(C) à un facteur 3 près, c'est-à-dire avec une marge d'erreur très inférieure au facteur de surpopulation Sdiss. Trois processus-clés, dont une étude plus approfondie des coefficients de réaction serait souhaitable pour améliorer les prédictions, sont mis en évidence.