Thèse soutenue

Magnétisme, électricité, spiritisme : l'imaginaire du fluide dans le théâtre du XIXe siècle

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Auteur / Autrice : Pauline Picot
Direction : Mireille Losco-Lena
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Langues et litteratures francaises
Date : Soutenance le 01/12/2021
Etablissement(s) : Lyon
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Lettres, langues, linguistique, arts (Lyon ; 2007-....)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : Passages XX-XXI (Lyon ; 2007-....)
établissement opérateur d'inscription : Université Lumière (Lyon ; 1969-....)
Laboratoire : Passages XX-XXI / XXI
Jury : Président / Présidente : Céline Frigau Manning
Examinateurs / Examinatrices : Romain Piana
Rapporteurs / Rapporteuses : Jean-Claude Yon, Isabelle Moindrot

Résumé

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Sueur, larmes, salive : le lien que l’on fait ordinairement entre fluide(s) et théâtre est celui des substances corporelles tangibles que produit l’organisme de l’acteur. Or durant une longue séquence culturelle qui se déploie en France de la fin du XVIIIe siècle aux premières décennies du XXe siècle, le théâtre se passionne pour un autre fluide : celui qui, invisible et impalpable, circule dans et entre les corps. Entrelaçant le scientifique au spectaculaire et le spirituel à l’érotique, trois modèles prégnants dans la société française du XIXe siècle placent en effet ce motif au cœur de leurs manifestations : la théorie du magnétisme animal – et son fluide universel garant de bonne santé –, l’électricité – encore appréhendée comme un « fluide mystérieux » (Beltran et Carré), et la pratique du spiritisme – avec ses émanations de fluides fantomatiques et autres ectoplasmes. Ce faisant, magnétisme, électricité et spiritisme fabriquent le modèle d’un corps perméable, traversé par un courant mystérieux et lui-même capable de transmettre ce courant à d’autres corps en présence. Or le théâtre est l’endroit privilégié pour le déploiement de cette représentation : il peut non seulement évoquer les prodiges inquiétants du fluide via le répertoire dramatique, mais également convoquer, dans le discours critique qui commente la représentation, le passage d’un courant entre scène et salle dont la perception constituerait le paroxysme de la séance théâtrale. Sur le plan thématique, le réseau d’images inédites offert par le magnétisme, l’électricité et le spiritisme permet à certains auteurs dramatiques du XIXe siècle de questionner le phénomène d’un rapport sans toucher ; d’une influence à distance qui s’exerce à la fois dans les champs thérapeutique et érotique. Sur le plan de la représentation, l’imaginaire du fluide fournit au spectateur de quoi formuler la sensation de subjugation éprouvée à se tenir en foule dans l’hic et nunc de la séance théâtrale, mais lui donne surtout le moyen d’exprimer sa fascination pour l’acteur qu’il décrit, pour la première fois, comme un être magnétique capable d’électriser son public. Ce faisant, cette thèse résolument ancrée dans le XIXe siècle se propose de faire l’archéologie de catégories fondamentales du lexique théâtral contemporain (l’énergie, la présence), rattachant ainsi des notions que l’on pense très actuelles à une séquence culturelle plus ancienne. Ce travail entend donc démontrer que magnétisme, électricité et spiritisme – trois modèles distincts traversés par le motif commun du fluide – fournissent de nouveaux outils pour penser la fascination au théâtre, mais également la fascination du théâtre.