Thèse soutenue

Etude des distorsions cognitives et de leurs soubassements cognitifs dans un contexte d’agression à caractère sexuel

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Auteur / Autrice : Romain Bet
Direction : George Andrew Michael
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Psychologie
Date : Soutenance le 08/01/2021
Etablissement(s) : Lyon
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Neurosciences et Cognition (NSCo) (Lyon)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : Laboratoire d’Étude des Mécanismes Cognitifs Lyon
établissement opérateur d'inscription : Université Lumière (Lyon ; 1969-....)
Laboratoire : Laboratoire d'étude des mécanismes cognitifs
Jury : Président / Présidente : Christine Morin-Messabel
Examinateurs / Examinatrices : Catherine Puigelier, Hakim Djeriouat, Sabine Mouchet-Mages
Rapporteurs / Rapporteuses : Nathalie Przygodzki-Lionet, Catherine Blatier

Résumé

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Lorsqu’une personne commet un comportement socialement inadapté, elle cherche peu de temps après à se justifier auprès des autres et à elle-même. Cette justification permettrait de voir les événements sous un autre angle et de se sentir moins coupable. Les justifications données sont souvent biaisées et elles ne rendent pas compte d’un raisonnement de pensée acceptable par la société. Ce type de justification est représentatif de distorsions de la réalité, et elles sont couramment appelées distorsions cognitives. L’objectif de ce travail a été de comprendre les distorsions cognitives et la manière dont elles peuvent expliquer un comportement inadapté. L’agression sexuelle est évidemment un comportement qui ne peut être justifié de façon rationnelle, c’est pourquoi les six études présentées ici sur les distorsions cognitives se sont focalisées sur la compréhension de ce type de comportement. La question générale derrière ces recherches est : comment est-il possible de justifier un tel passage à l’acte ? Pour y répondre, les principaux facteurs explicatifs étudiés ont été les traits de personnalité, l’empathie et l’agressivité. Dans un premier temps, nos données suggèrent qu’une ligne de base existe pour interpréter les distorsions cognitives. Cette ligne de base est constituée de trois éléments qui se retrouvent systématiquement dans toutes distorsions cognitives : un degré de sadisme élevé couplé avec une désagréabilité forte et un degré de psychopathie important. Considérés ensemble, ils rendent alors plus plausibles l’apparition des distorsions cognitives. Cette même ligne de base engendre également un manque d’empathie cognitive, ce qui dans un contexte d‘agression sexuelle peut être interprété par une indifférence vis-à-vis de la victime. Lors du passage à l’acte, différents types d’agressivité peuvent être mis en œuvre, allant d’une passivité à une agressivité proactive. Néanmoins, ces études décrivent que tout type d’agressivité est toujours prédit par au moins une distorsion cognitive, ce qui atteste de l’importance d’investiguer ces justifications biaisées. Dans la littérature, il a été mis en évidence que de mêmes distorsions cognitives se retrouvaient chez différents auteurs d’agression sexuelle. Ces justifications seraient en effet représentatives d’une vision du monde commune, partagée par plusieurs individus. Ces visions du monde qui amènent à avoir des pensées inadaptées sont appelées théories implicites et ont été décrites afin de rendre compte des modes de pensées des agresseurs sexuels d’adultes et d’enfants. La participation d’auteurs d’infraction à caractère sexuel (AICS) à la présente recherche a permis d’investiguer ces théories implicites et distorsions cognitives sous un angle cognitif. Ainsi, des entretiens enregistrés, des questionnaires et des tests cognitifs ont été mis en place. À partir des entretiens, nous avons mis en évidence 9 théories implicites qui pouvaient se retrouver chez les AICS, dont deux nouvelles non décrites jusqu’à présent dans la littérature. La première a été nommée « l’amour » dans laquelle la personne se décrit comme amoureuse de la victime, ce qui explique son passage à l’acte. La seconde est appelée « la bulle » puisque certains participants attribuent leur agression au fait qu’ils étaient dans un autre monde au moment des actes et qu’ils étaient plus spécifiquement dans leur propre bulle, déconnectés de la réalité. Les présentes études permettent également d’attester que les participants AICS témoignent de plus de distorsions cognitives, de plus de traits sombres de personnalité et d’une empathie cognitive réduite comparées à des participants contrôles. Leur reconnaissance des émotions auditives d’autrui semblent également plus faible, d’autant que leurs mauvais résultats pour la reconnaissance de la peur seraient une explication à une agressivité proactive.