Thèse soutenue

Une analyse de corpus qualitative et quantitative de l'acquisition des constructions marquant le topique chez l'enfant français

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Auteur / Autrice : Morgane Jourdain
Direction : Emmanuelle CanutCécile De CatKaren Lahousse
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences du langage
Date : Soutenance le 13/11/2020
Etablissement(s) : Université de Lille (2018-2021) en cotutelle avec KU Leuven (1970-....)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de l'homme et de la société (Lille ; 2006-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Savoirs, textes, langage (Villeneuve d'Ascq, Nord)
Jury : Président / Présidente : Michèle Goyens
Examinateurs / Examinatrices : Emmanuelle Canut, Cécile De Cat, Karen Lahousse, Eve V. Clark, Christine Dimroth, Maarten Lemmens, Elwys De Stefani, Carla Soares
Rapporteurs / Rapporteuses : Eve V. Clark, Christine Dimroth

Mots clés

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Mots clés contrôlés

Résumé

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Cette recherche se donne pour objectif d’analyser l’interaction entre la syntaxe et la structure de l’information (SI) chez l’enfant français. Notre sujet d’étude est la dislocation, une construction indiquant le topique de la phrase (« ce sur quoi porte la phrase »). L’étude est basée sur l’analyse quantitative et qualitative d’un corpus transversal et d’un corpus longitudinal, et sur un modèle de régression logistique et un modèle multinomial. Nos données atteignent un total de 2181 dislocations gauche (1) et droite (2) (DG et DD), produites par 99 enfants entre 1;6 et 7 ans. En comparaison avec les analyses existantes sur les dislocations, il s’agit d’une base empirique très large.(1) Les chats ils font miaou. (Flavie, corpus TCOF, 6;1.4)(2) Où il est le papillon? (Marie, corpus Lyon, 2;1.13)Les principales contributions de cette étude sont les suivantes :1. Les enfants commencent à produire des dislocations avant deux ans, dès les premières productions d’énoncés à deux mots. Jusqu’à 3 ans, les enfants produisent plus de dislocations droite (DD) que de dislocations gauche (DG). A travers un modèle multinomial, nous montrons que la DG est plus fréquente lorsque les enfants produisent des énoncés moins elliptiques, ce qui soutient l’hypothèse que les constructions syntaxiques se développent à partir de la droite (Freudenthal et al., 2010).2. Les constituants disloqués ayant une fonction syntaxique à l’intérieur de la phrase apparaissent plus tôt que ceux n’ayant aucun lien syntaxique avec la phrase (Topiques suspendus), qui apparaissent à 6 ans. Les sujets disloqués apparaissent à 2 ans, un peu avant les objets disloqués (vers 2;6 ans). Dans nos données, les objets disloqués sont significativement plus souvent disloqués dans la périphérie droite, et les sujets disloqués dans la périphérie gauche : les enfants semblent donc sur-généraliser l’ordre des mots SVO (Diessel & Tomasello, 2005).3. Jusqu’à 5 ans, les pronoms sont plus souvent disloqués à gauche, et les syntagmes nominaux à droite. Notre hypothèse est que les syntagmes lexicaux sont plus difficiles à traiter cognitivement par l’enfant que les pronoms (Arnon, 2010). Dans les langues avec un ordre des mots SVO, les constituants ‘lourds’ sont produits en fin de phrase, ce qui pourrait expliquer que les syntagmes lexicaux soient produits dans des DDs chez l’enfant.4. Les enfants produisent des dislocations uniquement pour marquer le topique, et avec des référents actifs, désactivés, ou physiquement présents. Ainsi, comme chez l’adulte (Ashby, 1988), les enfants utilisent cette construction pour marquer le topique, et acquièrent tôt le fait que les topiques doivent être accessibles dans le contexte d’énonciation.5. A l’aide d’un modèle de régression logistique, nous montrons que, comme les adultes, les enfants produisent plus de topiques contrastifs dans les DGs que les DDs. Ils changent de topiques plus souvent avec des DGs, et maintiennent le topique avec des DDs.6. Nous avons testé l’hypothèse selon laquelle cette maîtrise de la SI dans les dislocations chez l’enfant est un effet de la production de constructions syntaxiques concrètes, avec des items lexicaux fixes, comme décrit par la théorie basée sur l’usage (Bannard & Lieven, 2009). Nous montrons que les premières tentatives de dislocation peuvent être décrites comme ayant des fonctions concrètes, comme exprimer la position ou le possesseur d’un objet. Ces fonctions sont elles-mêmes liées à des schémas syntaxiques spécifiques, comme Là X ou X ça. Ces résultats nous conduisent à formuler deux hypothèses (mutuellement exclusives) : (i) la dislocation n’est pas utilisée avec une fonction de marquage du topique dès le début, mais cette fonction se développe à partir de schémas précis ; ou (ii) le concept de topique est présent dès le début de l’acquisition du langage, mais il est d’abord réalisé de préférence à travers des schémas concrets, avec de se généraliser à d’autres contextes