Thèse soutenue

Les adolescents en situation de témoignage oculaire : d’observations de terrain à l’étude d’un protocole d’audition judiciaire en laboratoire

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Auteur / Autrice : Olivier Dodier
Direction : Magali GinetFanny Verkampt
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Psychologie
Date : Soutenance le 17/10/2017
Etablissement(s) : Université Clermont Auvergne‎ (2017-2020)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale des lettres, sciences humaines et sociales (Clermont-Ferrand)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : Laboratoire de psychologie sociale et cognitive (Clermont-Ferrand ; 1984-...)
Etablissement d'accueil : Université Blaise Pascal (Clermont-Ferrand ; 1976-2016)
Laboratoire : Laboratoire de psychologie sociale et cognitive (Clermont-Ferrand ; 1984-...)
Jury : Président / Présidente : Michel Fayol
Examinateurs / Examinatrices : Fanny Verkampt, Nadège Verrier
Rapporteur / Rapporteuse : Mireille Cyr, Alain Somat

Résumé

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L’objectif de cette thèse était de fournir des recommandations aux professionnels de la justice pour recueillir la parole des adolescents, population de témoin peu étudiée en laboratoire. Pour cela, cinq études ont été conduites. Les deux premières avaient pour objectif de dresser un état des lieux des pratiques des enquêteurs français. Nous avons observé une spécificité des adolescents, notamment en ce qui concerne le recours aux suggestions d’informations. Celles-ci étaient plus fréquemment faites lorsque l’adolescent venait de développer un propos, ce qui n’était pas le cas avec des mineurs plus jeunes. Cela pourrait signifier des objectifs d’audition différents selon l’âge du mineur (Étude 1). Pourtant, les recommandations internationales déconseillent fortement l’usage des suggestions en raison des biais mémoriels qu’elles peuvent entrainer immédiatement comme de manière différée. Ensuite, nous avons montré que les adolescents sont les plus représentés parmi les mineurs témoins et/ou victimes dans les affaires françaises et qu’ils sont généralement perçus comme menteurs et pudiques par les enquêteurs (Étude 2). Une étude conduite avec des gendarmes formés aux techniques de recueil de la parole des mineurs témoins (vs. non formés ; Étude 3) a montré que ces utilisations des questions suggestives seraient dues à une croyance des enquêteurs selon laquelle les suggestions pouvaient aider le mineur à se souvenir et à rappeler des informations, mais aussi (et surtout) permettre à l’enquête d’avancer. Ceci était d’autant plus vrai pour les gendarmes non formés. Pour répondre à ces pratiques inappropriées, mais aussi aux besoins des enquêteurs, nous nous sommes intéressés à deux versions modifiées de l’entretien cognitif (ECM). En effet, ce protocole d’audition est basé sur un questionnement ouvert (plutôt que fermé ou suggestif), et propose des stratégies de récupération efficaces. En favorisant la récupération en mémoire et le rappel des informations, il pourrait alors optimiser leur fiabilité, en vue de les exploiter lors de l’enquête judiciaire. Pour cela, nous avons testé la mnémotechnique du Séquençage (Étude 4), qui a montré ses bénéfices. Nous avons en effet observé une hausse du rappel des informations correctes (vs. entretien structuré ; ES). Toutefois, celle-ci s’accompagnait d’une hausse des erreurs. Un résultat similaire a été observé en testant une version raccourcie de l’ECM pour des événements répétés dans le temps (vs. événement unique ; Étude 5). De plus, cette étude a mis en avant une hausse des affabulations avec l’ECM (comparativement à un ES, et indépendamment de la fréquence de l’événement), mais aussi des confusions entre les différents événements visionnés par une partie des adolescents. Ces augmentations des informations erronées n’entrainaient cependant, dans aucune des deux études, de chute du taux d’exactitude. Ces résultats seront discutés au regard de la littérature scientifique, et des recommandations appliquées seront formulées afin d’aider les enquêteurs à conduire au mieux leurs auditions d’adolescents témoins et/ou victimes.