Thèse soutenue

Territorialisation du secteur laitier et régimes de concurrence : le cas des montagnes françaises et de leur adaptation à l'après-quota

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Auteur / Autrice : Marie Dervillé
Direction : Gilles Allaire
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences Economiques et Sociales
Date : Soutenance le 10/04/2012
Etablissement(s) : Paris, AgroParisTech
Ecole(s) doctorale(s) : Ecole doctorale Agriculture, Alimentation, Biologie, Environnement, Santé (Paris ; 2000-2015)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : UP1102 - Systèmes Agraires et Développement Rural
Jury : Président / Présidente : Daniel-Mercier Gouin
Examinateurs / Examinatrices : Gilles Allaire, Gilles Bazin, Vincent Chatellier, Anne Richard
Rapporteurs / Rapporteuses : Pierre Dupraz, Martino Nieddu

Résumé

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La hausse progressive des quotas laitiers jusqu’à leur suppression prévue en 2015 conduit à la perte, pour les producteurs laitiers, d’un outil de gestion de la concurrence entre producteurs et entre territoires. Ces évolutions politiques et la transformation consécutive des marchés peuvent remettre en cause la pérennité de la production laitière, en particulier dans certaines zones de montagne. L’objectif de ce travail est de proposer un cadre conceptuel d’analyse du changement de forme de concurrence dans le secteur laitier et de le valider empiriquement avec le cas des montagnes françaises.L’approche institutionnelle retenue permet de construire des outils analytiques et d’explorer le rôle de l’action collective, à différentes échelles, dans la capacité de réponse des territoires de montagne. Dans ce cadre, les régimes de concurrence désignent l’arrangement institutionnel des dispositifs de coordination, recouvrant à la fois les instruments publics et les structures de coordinations (professions, interprofessions et standards) ainsi que les dispositifs et acteurs de l’innovation. Ces institutions et, donc, ces régimes de concurrence se déploient à différentes échellesgéographiques. La France laitière étant diversifiée, ces arrangements institutionnels varient d’un territoire à l’autre, selon les modèles de production et d’entreprise, l’orientation des marchés, la nature des structures professionnelles et interprofessionnelles et, d’une manière générale, selon les relations entre acteurs des filières. Les systèmes régionaux de production se caractérisent donc par différents régimes de concurrence. L’extension de la notion de bien commun et l’adaptation du concept de régime de droits de propriété à la capacité à exercer un contrôle sur les prix (propriété intangible) permettent de déterminer la capacité des producteurs à accéder aux deux biens communs à l’origine de la différenciation d’un régime de concurrence : la structure de gouvernance (à l’origine d’une capacité d’innovation) d’une part et la réputation collective (à l’origine d’une prime de marché) d’autre part.La différenciation régionale des régimes de concurrence nous conduit à proposer une hypothèse empirique sur le devenir des bassins de production de montagne : leur viabilité pourrait reposer sur l’activation de ressources collectives sectorielles et territoriales spécifiques, permettant une différenciation des formes et des espaces de concurrence. Dans les systèmes déjà partiellement différenciés (Savoie(s) et Jura), les innovations pourraient être incrémentales alors qu’elles risquent de devoir être radicales dans les autres zones (Massif Central, Pyrénées, reste des Alpes).Une analyse des stratégies d’acteurs, réalisée à plusieurs échelles géographiques, et reposant sur la combinaison d’études de cas et de méthodes économétriques, apporte une vision nouvelle de la diversité des mécanismes territoriaux de la restructuration laitière.Quarante-trois territoires de montagne, regroupés en quatre principaux ensembles – montagne à AOC forte, montagne à potentiel AOC, montagne générique dense, montagne générique peu dense – sont distingués et cartographiés. Ces différences territoriales montrent que le cadre juridique proposé par l’acteur public dans le cadre du Paquet lait n’est pas suffisant pour assurer la stabilité des marchés après la suppression des quotas, en particulier dans les zones difficiles sans régime de concurrence différencié. Ce cadre juridique repose en effet sur une incitation (i) au développement de relations contractuelles entre opérateurs de la filière et (ii) à la constitution d’organisations de producteurs. Il ressort qu’il sera nécessaire d’accompagner en parallèle les producteurs dans la construction d’une offre de lait et de services territorialisés, offre qui doit être adaptée à la demande des industries et des pouvoirs publics (collectivités locales, État, Europe).