Étude aspectuelle des particules adverbiales et prépositionnelles de l'anglais : projet de formalisation de l'interface syntaxe-sémantique.
Auteur / Autrice : | Alexandre Fauchere |
Direction : | Lionel Dufaye |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Langues et littératures étrangères |
Date : | Inscription en doctorat le 02/09/2013 |
Etablissement(s) : | Paris Est |
Ecole(s) doctorale(s) : | Ecole doctorale Cultures et Sociétés (Créteil ; 2010-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : LISAA - Littératures Savoirs et Arts |
Résumé
SUJET : Étude aspectuelle des particules adverbiales et prépositionnelles de l'anglais : projet de formalisation de l'interface syntaxe-sémantique. OBJECTIFS : Le système des prépositions et des particules constitue une thématique désormais centrale des recherches en grammaire anglaise. Ce sujet a en effet fait lobjet dun regain dattention lors des 15 dernières années en France (C. Chauvin, E. Corre, L. Dufaye, J.-J. Franckel, E. Gilbert, M.-L. Groussier, D. Paillard, G. Ranger ) comme dans les pays anglo-saxons (notamment aux Etats-Unis) dans le courant cognitiviste (V. Evans, R. Langacker, D. Lee, S. Lindstromberg, E. Sweetser, A. Tyler ). Certaines approches ont mis laccent sur la question de syntaxe (par exemple B. Cappelle, C. Chauvin), dautres, plus nombreuses, ont exploré la dimension sémantique. Ce projet de thèse a pour objectif de proposer un modèle danalyse qui intègre ces deux niveaux danalyse ; le projet nest pas tant de montrer dans quelle mesure syntaxe et sémantique sarticulent, que de proposer une analyse qui décrit les indices syntaxiques comme partie intégrante de la sémantique. ENJEUX SCIENTIFIQUES : En sinspirant à la fois de travaux hérités de la Théorie des Opérations Enonciatives (notamment L. Dufaye, J.-J. Franckel, E. Gilbert, D. Paillard) et des travaux cognitivistes américains (notamment A. Goldberg, R. Jackendoff, E. Sweetser), un enjeu scientifique de cette thèse vise à établir des ponts inter-théoriques entre les résultats obtenus dans ces deux grands courants. Ayant travaillé principalement en syntaxe à lUniversité de Pennsylvanie (A. Kroch, D. Embick ) et en sémantique à lUniversité de Californie à Berkeley (Hyman, Lakoff, Sweetser ) pendant deux ans tout en faisant mes recherches dans la continuité de mes études à Paris 7, il est effectivement apparu quil existe une forte compatibilité entre ces deux écoles qui pourra à terme déboucher sur une collaboration et des projets internationaux, notamment avec les personnes avec qui je suis resté en contact. ARGUMENTAIRE : La relation syntaxe/sémantique Dans le cadre de mon mémoire de Master 2, javais analysé lalternance possible entre les groupes prépositionnels en WITH et les adverbes, dans la construction de la valeur de manière en anglais contemporain. Lexemple prototypique avec lequel javais commencé mon travail de recherche était la paire « with care » / « carefully ». Javais tenté de rechercher toutes les différences entre ces deux structures, tant au niveau de la syntaxe que de la sémantique et de la pragmatique. Mes conclusions sur cette alternance (ou parfois limpossibilité de lun ou lautre) dans la construction de la manière avaient été les suivantes : - La manière est une valeur résultant dune modification dune occurrence de procès sur le paramètre qualitatif. - Ladverbe de manière semble avoir une sémantique repérable, ce qui nest pas le cas du groupe prépositionnel. - La position antéposée de ladverbe et du groupe prépositionnel semble être une prise en charge énonciative forte, à la manière des compléments de phrase : il y aurait une subjectivité très forte dans les cas dantéposition. - Il semblerait que le groupe prépositionnel en WITH soit intimement lié avec la notion dagentivité. Il est par exemple presque impossible de le trouver avec des verbes dont le sujet est impersonnel (it was raining a lot). De même, de façon générale, le groupe prépositionnel en WITH apparaît peu avec les procès non-bornés (appelés « états » dans les grammaires traditionnelles), qui généralement ont un sujet non-agentif. - Le groupe prépositionnel en WITH est être la trace dune opération de détermination de largument source dun procès. En ce sens, il est orienté vers la source, alors que dautres valeurs, comme le moyen, sont orientées plutôt vers le but. - Ladverbe de manière, à linverse, ne semble pas être lié à largument source, mais simplement à une perception dun procès. Il pourra en ce sens modifier les verbes avalents du type rain, mais également les procès dont la source est non-agentive. - Le groupe prépositionnel fonctionne donc dans un schéma à deux pôles (caractérisation de largument source engagé dans un procès), alors que ladverbe de manière entre dans un schéma à un pôle (caractérisation dun procès). - Au-delà de la valeur de manière, dautres valeurs construites par la préposition WITH ont montré des similitudes. Par exemple, la valeur instrumentale peut marquer une intentionnalité forte dun participant, ce qui est tout à fait compatible avec la notion dagent. Pour mon prochain travail de recherche dans le cadre du doctorat, jaimerais partir de cette citation dAlain Deschamps : Il faut pouvoir donner à ces marqueurs des représentations abstraites, les formes schématiques. Lemploi des marqueurs dans un contexte donné suppose quil existe une compatibilité entre leur forme schématique et le schème dopérations en jeu. Les valeurs constatées sont la résultante de cette compatibilité et doivent pouvoir être expliquées par la mise en relation de la séquence dopérations et de la forme abstraite. En effet, il me semble crucial dans lanalyse de marqueurs, de pouvoir postuler une forme schématique, qui viendrait recouvrir lensemble des utilisations de tel ou tel marqueur. Jaimerais me concentrer sur les particules de langlais, ce qui couvre notamment les prépositions et les particules adverbiales. Dans cette perspective, lanalyse des phrasal verbs sera un des points importants, avec notamment une réflexion sur la particule elle-même. Par exemple, que dire des cas où la même particule peut être utilisée en préposition et en particule adverbiale (avec un phrasal verb donc) ? Cest ce travail que Lionel Dufaye a par exemple commencé à entreprendre pour OVER : 5. There was ice over the river. 6, The river iced over. Pour ces deux exemples, il distingue la syntaxe prépositionnelle (en 5.) de la syntaxe postpositionnelle (en 6.), et explique que le premier exemple fait ressortir un cas de localisation de lélément ice, alors que le second fait apparaître une dimension télique : on a un changement détat de river. Cependant, si les deux agencements syntaxiques sont différents, le marqueur reste le même, et il sagit de trouver la forme schématique lui correspondant, et qui pourrait justifier telle ou telle utilisation en contexte. Pour OVER, Lionel Dufaye avance trois propriétés qui sont la présence du repéré (ice) dans le voisinage du repère (the river) (le repéré est en différenciation avec le repère), laltérité qualitative (une valeur supérieure du repéré pour le spatial), et le parcours extensionnel (pour les cas où il ny a pas de relation haut/bas). Cest dans cette optique que jaimerais continuer mes recherches, à savoir dans un premier temps le lien entre la syntaxe entre la sémantique : que nous dit lagencement syntaxique sur les opérations énonciatives en jeu avec un marqueur défini ? Y a-t-il des positions syntaxiques qui correspondent forcément à une valeur (télicité, localisation, etc.) ? Dans un second temps, et ce point est intimement lié au premier, jaimerais minterroger sur la notion de forme schématique, en analysant différentes particules de langlais. En effet, beaucoup dentre elles semblent montrer des similitudes mais parfois aussi des différences. Dans un autre travail , Lionel Dufaye a montré que ladverbe AWAY, malgré ses différentes utilisations (parfois presque opposées en sémantique), possédait un invariant dont la propriété centrale était dêtre un intervalle, dans le sens où une distance est établie entre un trajector (« repéré ») et un landmark (« repère »). Il y a pour la plupart des particules des utilisations où une valeur en particulier semble ressortir dans des contextes spécifiques, et pas dans dautres. Prenons par exemple DOWN et UP dans ces exemples trouvés sur le Corpus of Contemporary American English (COCA) : (1) The turn came about in my mind when I visited Ross Perot and Dr. Haley with my undersecretary of health in Dallas, Texas shortly after I was confirmed as secretary. And we sat down for hours and discussed the possibility of a neurological issue as opposed to a stress issue. (2) The small room held a keyboard and the outdated communications system. I sat for hours fascinated by the way the screen lit up as I tapped the keys. (3) After the children were asleep, he and April sat up for hours in bed talking. Les résultats du COCA sont les suivants : Sat down for hours : 1 Sat for hours : 37 Sat up for hours : 1 Ceux du moteur de recherche Google sont les suivants : Sat down for hours : 53 200 Sat for hours : 833 000 Sat up for hours : 704 000 On voit donc que des exemples comme (1) présentent un tôt dacceptabilité plus réduit que lexemple sans particule, et que celui avec UP dans la recherche Google. Dans la perspective de mon travail de recherche en doctorat, jaimerais aborder ces questions selon plusieurs angles. Par exemple, il me semble que « sat down for hours » nest pragmatiquement pas aussi bon que « sat for hours », dans le sens où DOWN ici semble marquer de la télicité. En effet, « sit down » se traduirait par « sasseoir », alors que « sit » tout seul correspondrait plus à « être assis », et donc à un procès atélique, cest-à-dire qui na pas de fin inhérente naturelle qui lui est associée (pas de changement détat en résumé). Pour UP, le cas pourrait sembler similaire à DOWN, mais le nombre élevé doccurrences sur Google peut être lindicateur que quelque chose se passe avec UP mais ne se passe pas avec DOWN. Il semblerait quil ny ait pas autant de télicité dans sit up que dans sit down, notamment parce que sit up semble indiquer une situation attendue mais non effective, et que sit down semble simplement montrer le mouvement passant dune position debout à une position assise. Il y a donc un lien apparent entre laspect télique et lutilisation des particules : DOWN marque du télique avec sit, et UP ne marque pas ce type daspect. Ainsi, on pourra facilement avoir I was sitting up for hours alors que I was sitting down for hours nest pas pragmatiquement recevable, puisque sit down signifie la fin du mouvement, et que le sujet I subit un changement détat. La question de laspect sera donc centrale dans mon travail de recherche, car il semblerait que certaines particules soient fréquemment porteuses dun type daspect, alors que leur « opposé » (ici DOWN et UP par exemple) ne lest pas toujours. La question du verbe principal utilisé sera également fondamentale dans les analyses en contexte, même si le but ultime du travail sera in fine de trouver une valeur invariante pour une particule donnée. Cette invariant, que je traiterai à laide des outils de la Théorie des Opérations Enonciatives pourra permettre une meilleure compréhension du système des particules de langlais, dans une perspective de formalisation qui peut être utile notamment à lenseignement de langlais en tant que langue étrangère. Pour la recherche de données, je me propose de poursuivre ce que jai auparavant commencé lors de mes travaux de recherche de Master. En effet, jai déjà pu collecter un nombre important dénoncés originaux, trouvés sur des corpus en ligne sur internet (British National Corpus, Corpus of Contemporary American English, etc.), voire des transcriptions originales de locuteurs natifs, que jai pu noter lors de mes séjours à létranger. Mon projet de recherche est de ce fait déjà entamé grâce à mes travaux précédents, et cest en toute confiance que jenvisage de le finir au terme des trois années de doctorat. En résumé, mon travail de recherche de doctorat suivra les grandes lignes suivantes : - La poursuite de mes recherches de Master 2 sur la préposition WITH - Le lien syntaxe / sémantique / pragmatique pour les particules de langlais, dans une perspective en synchronie - La question des particules qui permettent de marquer un aspect - La formalisation du système des particules en anglais selon les outils de la Théorie des Opérations Enonciatives dAntoine Culioli