Thèse soutenue

Poétique de la métaphore et expérience concentrationnaire : étude sur la littéralisation du trope (Charlotte Delbo, Primo Levi et Varlam Chalamov)
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Auteur / Autrice : Paraskevi Eva Nastou
Direction : Jean-Marie Schaeffer
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Littérature : théorie, histoire
Date : Soutenance le 12/12/2022
Etablissement(s) : Paris, EHESS
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales
Jury : Président / Présidente : Luba Jurgenson
Examinateurs / Examinatrices : Luba Jurgenson, Alexandre Prstojević, Yves Hersant, John Pier
Rapporteurs / Rapporteuses : Luba Jurgenson, Alexandre Prstojević

Résumé

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Comme son titre l’indique, cette thèse tâche à esquisser une poétique de la métaphore dans un corpus d’œuvres issues des camps de concentration nazis et soviétiques. Si nous sommes à même de parler de métaphores, c’est que nous sommes dotés d’un « fonds commun minimum » de paradigmes en matière de leur reconnaissance, ce que s’attachent à démontrer nos analyses dans la première partie de cette thèse. Cette étape plus taxinomique est indispensable afin d’examiner, dans la deuxième partie, la manière dont le contexte, tant référentiel que verbal, favorise de lectures dé-métaphorisantes en suscitant l’étonnement du lecteur et une plus profonde compréhension de cet univers de violence extrême. Mais le mouvement vers la littérarisation de la figure-trope qu’est la métaphore ne concerne pas uniquement les énoncés localisés, perçus comme métaphoriques à première vue : il s’étend aussi à la fameuse « métaphore de l’enfer ». En prenant pour point de départ les théories selon lesquelles la métaphorisation du réel concentrationnaire par la référence à la représentation « enfer » permettrait de dire l’indicible de ce réel, nous avons tâché à démontrer que les emprunts à l’Enfer de Dante et à d’autres représentations de l’outre-tombe acquièrent, en l’occurrence, une référence directe dans la réalité. Enfin, la constante tension entre le littéral et le non littéral et le mouvement vers la littéralisation du trope qu’est la métaphore ne lui fait pas perdre son effet de multiplication de sens, bien au contraire : l’univers concentrationnaire apparaît sous les traits d’un espace non-humain, où l’homme, soumis à la force inhumaine, devient « une chose au sens le plus littéral » (Simone Weil) et où l’enfer comme représentation acquiert sa pleine puissance. Toutefois, cet enfer sur terre qu’est l’univers concentrationnaire, exemplifié dans cette thèse par Auschwitz et la Kolyma, est aussi, à maints égards, un anti-enfer. À cet enfer autre, correspond un nouveau chronotope littéraire, aussi puissant et aussi intemporel que celui constitué par l’Inferno.