« Je tiens maintenant le sens de l'ordalie » : la négociation du sens de la grandeur dans La Tragédie du roi Christophe et Le Cahier d'un retour au pays natal d'Aimé Césaire

“ I now hold the meaning of the ordeal ”: negotiating the meaning of greatness in Aimé Césaire's La Tragédie du roi Christophe and Le Cahier d'un retour au pays natal.

• Auteur / Autrice : Faustine Lastécouères
• Direction : Antony Soron
• Type : Projet de thèse
• Discipline(s) : Littératures francophones
• Date : Inscription en doctorat le 31/08/2024
• Etablissement(s) : Sorbonne université
• Ecole(s) doctorale(s) : Littératures françaises et comparée
• Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre d'étude de la langue et des littératures françaises

Mots clés

Mots clés libres

Debout

Ordalie

Sacré

Césaire

Serreau

Négritude

Standing

Ordeal

Sacred

Césaire

Serreau

Negritude

Résumé

La Tragédie du roi Christophe, publié en 1963, a toujours été commentée comme une fuite en avant dans la violence et la tyrannie, suggérant qu'elle ne serait qu'une démonstration de l'échec politique d'un roi victime d'une irrépressible folie des grandeurs. Pourtant, la fin de la pièce, qui procède aux solennelles funérailles du roi dont le corps n'est pas couché mais étrangement « debout » et « tourné vers le Sud », invite à approfondir le sens de ce qui était à l'œuvre dans cette quête désastreuse. L'échec politique de Christophe passerait ainsi au second plan, derrière un ordre de signification plus ouvert qui permettrait de sauver le personnage de manière posthume : sa mort révélant, non pas l'échec, mais la conduite ordalique de celui qui voulait prouver la grandeur de son peuple. Or, le motif de l'ordalie est bien au cœur de l'écriture césairienne. Il apparaît explicitement dans son premier ouvrage publié en 1939, Cahier d'un retour au pays natal, dans un moment clef d'illumination qui convertit le sens de l'expérience poétique en épreuve de grandeur : « Je tiens maintenant le sens de l'ordalie : mon pays est la « lance de nuit » de mes ancêtres Bambaras. ». La formule se donne comme réflexion sur la nécessité d'échapper aux représentations coloniales et elle est traversée par de nombreuses lectures anthropologiques qui nous amènent à questionner à la fois sa signification, mais également sa fonction dans l'espace textuel : l'ordalie serait-elle une renégociation de la grandeur, qui permettrait de prouver la puissance de la Négritude ?

La Tragédie du roi Christophe (The Tragedy of King Christopher), published in 1963, has always been commented on as a headlong rush into violence and tyranny, suggesting that it is merely a demonstration of the political failure of a king who fell victim to an irrepressible folie des grandeurs. Yet the end of the play, with the solemn funeral of the king whose body is not laid to rest but strangely “upright” and “facing south”, invites us to delve deeper into the meaning of what was at work in this disastrous quest. Christophe's political failure would thus take a back seat to a more open-ended order of meaning that would posthumously save the character: his death would reveal not the failure, but the ordalic conduct of the man who wanted to prove the greatness of his people. The motif of the ordale is at the very heart of Césairienne's writing. It appears explicitly in his first work, published in 1939, Cahier d'un retour au pays natal, in a key moment of illumination that converts the meaning of poetic experience into a test of greatness: “I now hold the meaning of the ordalia: my country is the ‘spear of night' of my Bambara ancestors. The formula is a reflection on the need to escape colonial representations, and is permeated by numerous anthropological readings that lead us to question not only its meaning, but also its function in the textual space: is the ordalie a renegotiation of the 'night spear' of my Bambara ancestors?