Explorer la détresse psychologique chez la population issue de l'immigration maghrébine en France : le rôle des discriminations, des compétences émotionnelles et de l'acculturation
Auteur / Autrice : | Rania Driouach |
Direction : | Constantina Badea |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Psychologie |
Date : | Inscription en doctorat le 10/02/2025 |
Etablissement(s) : | Paris 10 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Connaissance, langage et modélisation |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire Parisien de Psychologie Sociale |
Equipe de recherche : Psychologie sociale des comportements et de la cognition |
Résumé
Ces dernières années, la prévalence des troubles psychopathologiques a considérablement augmenté en France, particulièrement au sein des groupes minoritaires (Gouvernet & Bonierbale, 2022 ; Léon & Beck, 2021 ; McKnight-Eily et al., 2021). Parmi eux, les individus issus de l'immigration maghrébine, sur plusieurs générations, semblent plus vulnérables, présentant une prévalence accrue de troubles anxieux, dépressifs et de troubles liés à l'usage de substances (Pignon et al., 2017). Cependant, les recherches spécifiquement consacrées à la santé mentale de cette population restent insuffisamment développées. Ce travail de recherche s'intéresse au rôle du sentiment de discrimination et de l'acculturation dans la santé mentale des personnes issues de l'immigration maghrébine en France, tout en explorant l'impact des compétences émotionnelles comme facteur modérateur. Deux objectifs principaux structurent ce projet. Le premier vise à comprendre comment le sentiment de discrimination, défini comme une perception d'injustice liée à l'appartenance à un groupe spécifique (Xiong et al., 2021), affecte la santé mentale des personnes issues d'immigration et leurs stratégies d'acculturation. Le second propose de développer et tester une thérapie cognitive-comportementale (TCC) adaptée à cette population, prenant en compte leurs spécificités culturelles. L'acculturation, qui désigne le processus par lequel un individu adopte des éléments de la culture dominante tout en préservant sa culture d'origine (Berry, 1997), peut se décliner en différentes stratégies : assimilation, séparation, intégration ou marginalisation. Le sentiment de discrimination, souvent ressenti dans des domaines tels que l'emploi ou les interactions sociales, tend à réduire l'intégration, une stratégie pourtant associée à un meilleur bien-être psychologique (Badea et al., 2011 ; Yoon et al., 2013). L'intégration peut en effet atténuer l'impact négatif de la discrimination en renforçant des ressources psychosociales comme le sentiment de contrôle personnel ou l'estime de soi (Moradi & Risco, 2006). Par ailleurs, les compétences émotionnelles jouent un rôle central dans la gestion des émotions et des interactions sociales. Ces compétences, qui incluent la reconnaissance, l'expression, la compréhension et la régulation des émotions (Mikolajczak et al., 2020), peuvent se retrouver moins développées chez les populations minoritaires en raison de l'exposition à un stress chronique lié à la discrimination (Vargas et al., 2017). Ce déficit contribue à accentuer la détresse psychologique et complique les processus d'acculturation. Ce projet de recherche se propose d'examiner comment les compétences émotionnelles pourraient atténuer les effets négatifs du sentiment de discrimination sur la santé mentale de la population issue de l'immigration maghrébine. À travers une revue systématique de la littérature, une enquête comparative entre populations issues d'immigration et majoritaires, et des essais cliniques, ce travail vise à identifier les facteurs déterminants de la santé mentale dans cette population. Enfin, le développement d'une TCC adaptée intégrera les résultats des études précédentes pour adapter les outils aux difficultés spécifiques en termes de compétences émotionnelles et si possible les éléments culturels adaptés, souvent négligés dans les approches thérapeutiques classiques (McCulloch et al., 2005). En tenant compte des spécificités culturelles, cette thérapie vise à renforcer les compétences émotionnelles et à améliorer la santé mentale des personnes issues de l'immigration maghrébine tout en réduisant les obstacles liés à l'accès aux soins. Ce travail se propose ainsi de contribuer à la compréhension des liens entre discrimination, acculturation et santé mentale, tout en proposant des outils concrets pour améliorer le bien-être des populations issues de l'immigration.