La microdiversité : moteur de l'adaptation de Limnospira (Cyanobactérie) du lac Dziani (Mayotte) ?
Auteur / Autrice : | Amaury Le vern |
Direction : | Cécile Bernard, Sébastien Halary |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Sciences de l'environnement |
Date : | Inscription en doctorat le 01/10/2024 |
Etablissement(s) : | Paris, Muséum national d'histoire naturelle |
Ecole(s) doctorale(s) : | Sciences de la nature et de l'Homme : évolution et écologie |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Molécules de Communication et Adaptation des Microorganismes |
Equipe de recherche : Cyanobactérie, Cyanotoxine, Environnement |
Mots clés
Résumé
Les populations de bactéries sont constituées d'une multitude de génotypes différents, que l'on appelle la microdiversité. Celle-ci est considérée comme un facteur fondamental de l'adaptation microbienne. Une population de pico-cyanobactéries océaniques peut par exemple coloniser différentes niches écologiques, dépendantes de la latitude et de la profondeur, aux conditions environnementales spécifiques (e.g. intensité lumineuse, température, concentration en nutriments), car les génotypes qui la composent possèdent des capacités adaptatives distinctes. Même à l'échelle réduite d'un lac ou d'un étang, cette microdiversité est observée, sans que l'on en comprenne l'impact sur la partition de niche, dans ces milieux en apparence homogènes (isotropes). Elle pourrait cependant jouer un rôle dans l'adaptation des populations aux variations temporelles et spatiales des conditions environnementales. L'écologie et la dynamique des cyanobactéries lacustres est devenue ces dernières années une problématique majeure ; les épisodes d'efflorescences - des densifications massives de leur population - voient en effet leur fréquence et leur intensité augmenter en raison des changements globaux. Ces phénomènes perturbent profondément le fonctionnement de ces écosystèmes, et certains génotypes, produisant des molécules toxiques, ont des effets délétères pour la faune et les humains, avec de graves conséquences socio-économiques et sanitaires. Le lac Dziani Dzaha à Mayotte, est un lac de cratère hypersalin formé il y a environ 5 500 ans, qui fait l'objet d'un suivi interdisciplinaire depuis plus de 10 ans. Cet écosystème est largement dominé par la cyanobactérie Limnospira platensis, qui forme une efflorescence permanente dont la densité exceptionnelle conduit à un rapide contraste des conditions dans la colonne d'eau. Par exemple, dès 50 cm de profondeur l'essentiel de la lumière visible est absorbée et le taux d'oxygène diminué de moitié. En 2020, à la suite d'une éruption volcanique sous-marine, à 50 km des côtes, une infiltration d'eau de mer dans le lac a conduit à des changements majeurs tels qu'une diminution du pH (9.5 à 8.5) et de la salinité (70 à 56 psu). Une étude préliminaire a montré que les souches planctoniques de Limnospira platensis (isolées de la colonne d'eau) présentent une remarquable diversité génétique. La comparaison de leur génotype, permet de regrouper ces souches en fonction de leur date de prélèvement, pré- ou post- séisme, suggérant une dynamique temporelle de la microdiversité potentiellement associée à une adaptation aux nouvelles conditions environnementales de pH et de salinité. D'autres génotypes, benthiques, colonisent le sédiment et les stromatolithes en périphérie du lac, où les conditions (e.g. température, lumière) sont distinctes. Comparé aux souches planctoniques, le seul représentant actuellement séquencé possède un génotype très distant. Ces résultats préliminaires permettent d'émettre l'hypothèse d'un lien entre microdiversité, diversité fonctionnelle et capacités adaptatives de Limnospira, aux différentes niches du lac Dziani. L'objectif de la thèse est d'utiliser l'écosystème original du lac Dziani pour mieux comprendre le rôle joué par la microdiversité des cyanobactéries dans les mécanismes de partition de niche et d'adaptation aux variations temporelles de conditions environnementales changeantes.