Aux origines de la sigillographie. Le sceau et l'antiquaire du Grand Siècle.
Auteur / Autrice : | Anna Mikhalchuk |
Direction : | Michelle Bubenicek, Laurent Hablot |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Etudes médiévales |
Date : | Inscription en doctorat le 01/10/2024 |
Etablissement(s) : | Université Paris sciences et lettres |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale de l'École pratique des hautes études |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre Jean Mabillon |
établissement opérateur d'inscription : École nationale des chartes (Paris) |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
L'héritage des antiquaires a un grand potentiel épistémologique. Il permet en premier lieu de documenter l'état des connaissances historiques des hommes de lettres au XVIIe siècle. En outre, leurs papiers, conservés dans les collections du Cabinet des Manuscrits de la BnF ainsi que dans les archives et bibliothèques municipales renferment des copies de documents, chartes ou actes perdus. L'intérêt des intellectuels, principalement français, mais aussi italiens, allemands, flamands, du XVIIe siècle ne porte en effet pas seulement sur les faits du passé eux-mêmes, qui retenaient l'attention des chroniqueurs médiévaux, mais sur l'analyse des sources documentaires. Les collections des antiquités, en particulier les monnaies, médailles, enfin, les sceaux ainsi que les récits contenus au sein des ouvrages historiques traités, histoires provinciales, généalogiques, ecclésiastiques, urbaines intègrent de manière croissante une approche critique, et ce, dès avant le traité de Jean Mabillon De Re Diplomatica (1681). Les antiquaires inventent la notion de « pièces justificatives » des faits passés, pièces parmi lesquelles les sceaux occupent une place importante : leur matérialité singulière, les images qu'ils contiennent, susceptibles de frapper l'imagination des érudits, leur permettent d'échapper, avec les chartes qu'ils scellent, à l'oubli des siècles. Les motifs de l'intérêt des antiquaires pour les sceaux peuvent être différents, selon la personnalité de chacun : les uns en tirent les portraits des souverains, les autres essaient de prouver grâce à eux l'ancienneté d'une noble famille provinciale, les troisièmes en font les monuments glorieux de l'histoire de leur patrie, les restes les étudient avec les chartes correspondantes. Quoi qu'il en soit, les antiquaires les collectionnent, les inventorient, les décrivent et les copient au cours de leurs études historiques. En analysant le discours sigillographique publié ou resté manuscrit dans les imposantes collections de papiers ainsi que toutes sortes de représentations sigillaires (croquis, dessins préparatoires, gravures) faites par eux-mêmes ou leurs habiles collègues, le travail de thèse vise à apprécier le niveau des connaissances sigillographiques au XVIIe siècle. Les antiquaires, selon toute apparence, n'étaient pas de simples collectionneurs des objets anciens, mais de véritables érudits avant l'érudition. Avant le « père des sciences auxiliaires » que fut indéniablement Jean Mabillon, de quelle nature était l'exactitude des représentations des images sigillaires faites par les ouvriers spéciaux, comment étaient approchées leurs techniques de fabrication, quelle était l'ampleur des archives étudiées par les antiquaires, et dans quelle mesure avaient-ils accès aux sceaux médiévaux ? La thèse vise également à démontrer que l'autre technique utilisée, avec le dessin, pour transmettre l'image sigillaire, et qui fut très largement utilisée au XIXe s., celle du moulage, fut en réalité inventée au XVIIe siècle, d'où la question qui se posait, dès cette époque, du choix entre le moulage et le dessin. Les antiquaires au cours de ces travaux balancent entre l'impartialité historique et la dépendance aux commandes du pouvoir royal, à celles des pouvoirs locaux ou des familles nobles ; en n'oubliant pas encore celle de leur appartenance à la communauté religieuse ou tout simplement, celle de leur appartenance sociale, ce qui influence y compris sur leurs recherches sigillographiques, bien que le poids du sceau en tant que l'argument de tel ou tel camp dans ces « guerres sigillographiques » augmente progressivement au cours du Grand Siècle. Enfin, les antiquaires, percevaient-ils ou non les sceaux comme sources historiques ? Les réponses à de telles questions donneront la possibilité de juger le rôle de la génération « prémabilonnienne » dans le développement de la sigillographie en général.