Ambivalences du devenir-femme : la figure de l'adolescente dans la littérature contemporaine francophone des femmes
Auteur / Autrice : | Gabrielle Flipot meunier |
Direction : | Anne Tomiche, Andrea Oberhuber |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Littérature comparée |
Date : | Inscription en doctorat le 31/08/2024 |
Etablissement(s) : | Sorbonne université en cotutelle avec Université de Montréal |
Ecole(s) doctorale(s) : | Littératures françaises et comparée |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre de recherche en littérature comparée |
Mots clés
Résumé
Autour des années 1970, l'existence de la jeune fille en tant qu'« être social et fictionnel » (Plet, 2021) paraît menacée : alors que certains auteurs en parlent au passé, comme d'une figure révolue, les historiens se demandent si « la libéralisation des murs [l']effacera » (Knibiehler et al., 1983), considérant l'ambiguïté constitutive de cet âge aux balises déjà incertaines. Or, cette époque voit également les femmes se tailler une place décidément plus importante qu'auparavant en littérature et celles-ci sont nombreuses à s'être depuis approprié la figure de la jeune fille (ou de l'adolescente, comme on la nomme plutôt aujourd'hui, hésitation lexicale symptomatique de son caractère ambigu). Loin de disparaître, celle-ci semble plutôt se renouveler et permettre de penser l'émergence de récits d'apprentissage au féminin, mais aussi de récits de contestation d'un certain apprentissage limitatif. Ma thèse propose donc de s'intéresser à la figure ambivalente de l'adolescente dans les écrits de femmes depuis la deuxième vague féministe, en postulant que ces récits interrogent, selon diverses modalités, la féminité et la condition des femmes contemporaine. Il s'agit d'étudier la mise en récit de la construction d'une identité féminine et de réfléchir aux postures adoptées par ces personnages de jeunes filles dans leur passage d'un âge à un autre alors qu'elles négocient avec un nouvel ensemble de normes et de modèles, tentant tantôt de s'y conformer, tantôt de s'y soustraire ou d'y résister. Entre deux âges, l'adolescente apparaît comme figure par excellence de l'inachèvement, ce qui lui confère l'indéniable pouvoir de porter en elle une multitude de potentialités, dont celle de « mal tourner ». Celles qu'on appelle « bad girls » sont ainsi présentées comme sujets féminins du déraillement, du débordement, de la démesure : au-delà de la « crise d'adolescence », quels ratés la jeune fille peut-elle provoquer au sein du système dans lequel elle évolue en refusant de se plier aux attentes dont elle fait l'objet ? Composé d'uvres d'écrivaines françaises, québécoises et francophones, le corpus de cette thèse peut être envisagé comme un ensemble de récits de formation et de « déformation » (Duzer, 2014). Afin d'étudier le regard que posent diverses générations d'autrices sur le devenir-femme, je m'intéresserai particulièrement à l'écriture du « corps mutant » (Cnockaert, 2003) de l'adolescente, désormais sujet désirant mais aussi objet de nouveaux désirs et de regards inquisiteurs, ainsi qu'aux manifestations scripturaires de la honte et de la colère, affects emblématiques de l'adolescence mais non neutres pour les femmes qui se voient fréquemment renvoyées au premier et découragées du second. Les récits autobiographiques ou autofictionnels du corpus m'amèneront aussi à m'intéresser aux enjeux de l'écriture sur le soi adolescent et je me pencherai également sur la question de l'amitié féminine, qui occupe une place centrale dans plusieurs uvres du corpus à l'étude.