Thèse en cours

Metaxu. La théorie platonicienne de l'intermédiaire

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Auteur / Autrice : Marco Giudetti
Direction : Dimitri El-murr
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Philosophie
Date : Inscription en doctorat le 01/09/2024
Etablissement(s) : Université Paris sciences et lettres
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale École transdisciplinaire Lettres/Sciences
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre Jean PEPIN
établissement opérateur d'inscription : Ecole normale supérieure

Mots clés

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Résumé

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Le présent projet porte sur un concept problématique mobilisé à différents titres par Platon dans ses Dialogues : le concept d'« intermédiaire » (to metaxu, to meson). On peut d'ores et déjà, par souci de clarté, décrire l'intermédiaire comme la réalité ou le terme qui, placé entre deux autres réalités ou termes, soit occupe une position moyenne, soit fait fonction de lien entre ces deux réalités ou termes. Dans le corpus platonicum, il est possible de repérer toute une série de notions fondamentales qui sont explicitement définies ou décrites comme intermédiaires : l'amour, ou le désir , le démon , le thumos , la doxa ou opinion , doxa orthê ou opinion droite , la dianoia , ainsi que la philosophie elle-même . Le philosophe est même intermédiaire en au moins trois sens : 1) normatif ou éthico-politique  ; 2) épistémologique  ; 3) religieux, dans la mesure où intermédiaire entre les hommes et les dieux, il coopère à la réalisation du but de la divinité , à savoir la réalisation du bien dans ce monde. Intermédiaires sont encore : l'âme du monde, l'âme individuelle, le corps du monde, la figure du démiurge (dont la nature n'est certes pas déterminée en tant qu'intermédiaire mais qui accomplit néanmoins une fonction de médiation), les mathématiques (dans le Timée ). De plus, c'est par l'intelligence des intermédiaires que Platon décrit le propre de la méthode philosophique, à savoir la dialectique, qui se distingue en cela de l'éristique. L'intermédiaire permet en effet de distinguer la catégorie logique de contradictoire de celle de contraire : si une chose n'est pas blanche, il ne s'ensuit pas pour autant qu'elle soit noire (Aristote, Cat. X, 12a10-12a20). Qu'il y ait donc un enjeu philosophique de premier plan à définir la notion d'intermédiaire semble clair au vu de l'importance des questions (la nature des états de l'âme, qu'ils soient cognitifs ou volitionnels, la nature de la philosophia, celle de la dialectique…) pour lesquelles Platon la mobilise et des contextes dans lesquels elle apparaît (psychologique, épistémologique, cosmologique, éthique…). Bien que la fréquence de l'emploi d'un terme ne dise rien de son « poids » philosophique ou de son importance conceptuelle dans un corpus, on peut également relever l'ampleur de la fréquence de l'emploi du terme metaxu par Platon, qui apparaît quatre-vingt-treize fois dans les Dialogues (cf. Brandwood 1976), et très souvent précédé de l'article neutre substantivant. Aux occurrences de metaxu, il faut en outre ajouter celles d'autres termes dont la signification n'est pas sans rapport avec l'idée d'intermédiaire : mesos, oudeteros/mêdeteros et amphoteros , ainsi que les doubles négations « oute…oute » et « mête…mête », employées par Platon tantôt pour caractériser l'intermédiaire (voir Aristote, Cat. X, 12a20-25) tantôt le « neutre », concept non directement superposable à celui d'intermédiaire mais qui lui est corrélé. Le présent projet doctoral défend l'hypothèse suivante : il existe, par-delà la diversité des contextes d'apparition de ces termes, une théorie générale platonicienne de l'intermédiaire qui permet de donner au metaxu platonicien la dignité d'un concept philosophique authentique. C'est l'importance qualitative et quantitative de ces instances intermédiaires qui incite à rechercher dans l'œuvre de Platon une théorie générale de l'intermédiaire. Toutefois, bien que les Dialogues soient traversés de fond en comble par ces intermédiaires et que les questions philosophiques sur lesquelles ils sont mobilisés soient essentielles pour la psychologie (tripartition de l'âme), l'éthique (nature de l'amour et du désir) ou encore la cosmologie platoniciennes (la structure de l'âme et du corps de l'univers), Platon ne se préoccupe jamais de thématiser l'intermédiaire en tant que tel. Tout un ensemble de réalités sont ainsi définies comme intermédiaires, mais il manque une définition et une caractérisation explicite de la notion. C'est à cette clarification théorique que le présent projet entend se consacrer et dont il entend défendre la nécessité.