Intelligence artificielle et preuve pénale
Auteur / Autrice : | Dorian Gandolfo |
Direction : | Jean-Baptiste Perrier |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | En droit spécialité Droit privé |
Date : | Inscription en doctorat le 01/10/2024 |
Etablissement(s) : | Aix-Marseille |
Ecole(s) doctorale(s) : | Ecole Doctorale Sciences Juridiques et Politiques |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : LDPSC - Laboratoire de droit privé et sciences criminelles |
Mots clés
Résumé
Rédiger une thèse dans laquelle la notion de « preuve » figure dans l'intitulé amène inévitablement à questionner ce sujet sous un angle épistémologique où la Vérité est débattue, la preuve étant définie comme « ce qui sert à établir qu'une chose est vraie ». Or, l'ajout de l'épithète « pénale » au mot preuve, compte tenu du caractère intrusif des actes autorisés par le Code de procédure pénale, place le respect des libertés individuelles au centre de la manifestation de la Vérité. C'est dans ce double rapport que la présente recherche devrait aborder l'introduction de l'intelligence artificielle dans l'enquête pénale. La manifestation de la « Vérité » est chère au droit pénal dans la mesure où elle est présentée comme un objectif poursuivi par l'enquête pénale et légitime l'exécution d'actes intrusifs portant atteinte aux libertés individuelles. Or, à l'aune du développement de l'intelligence artificielle, cette quête de vérité pourrait être doublement influencée. Elle pourrait l'être directement, lorsque cette nouvelle technologie est mise au service de la constatation d'infractions pénales et la recherche de leur auteur, mais aussi indirectement, puisque la massification du recours à l'intelligence artificielle générative amoindrit la confiance accordée à des preuves numériques ou matérielles. D'une part donc, la présente recherche vise à identifier et à conceptualiser de manière générale les diverses techniques par lesquelles l'intelligence artificielle pourrait participer à la production et à la récolte de preuves. Ces techniques pourraient aussi bien être utilisées dans l'objectif de planifier l'enquête pénale afin d'optimiser l'efficacité des services d'enquêtes, que s'apparenter à une nouvelle technique d'enquête per se. Dès lors, la présente recherche devrait aboutir à une conceptualisation générale capable d'optimiser l'encadrement de l'intelligence artificielle et son efficacité, ainsi que de mesurer les atteintes aux libertés individuelles auxquelles son utilisation porterait. Ainsi, peut-on consacrer l'usage de l'intelligence artificielle dans une enquête pénale ? Quel est son coût, sa vertu, ses faiblesses ? Cette consécration doit-elle reposer sur des dispositions précises visant expressément chaque système d'intelligence artificielle ou peut-elle être admise par des dispositions générales ? Comment cette évolution technologique peut-elle aboutir à modifier l'équilibre du procès pénal ? D'autre part, l'étude proposée veut analyser l'impact que le développement de l'intelligence artificielle pourrait avoir sur la fiabilité des preuves produites devant les juridictions répressives. En effet, de nombreuses preuves recueillies devant les juridictions sont des preuves numériques. Leur falsification était jusqu'alors fastidieuse et demandait un savoir technique qui restreignait le nombre de personnes pouvant y avoir recours. Or, le développement de l'intelligence artificielle et notamment de l'intelligence artificielle générative permet la production d'écrits, de vidéos ou d'éléments sonores qui pourraient, à moyen terme, nuire à la crédibilité des preuves produites. Face au développement des « deep fakes », la possibilité de produire toutes sortes de documents par une intelligence artificielle altèrera la valeur de ces documents qui attestaient jusqu'alors, par leur simple présence, de la réalisation d'un fait ou de l'authenticité d'un acte ; ils pourraient désormais être envisagés avec plus de scepticisme que de confiance. Dès lors, faudra-t-il soumettre systématiquement toutes les preuves avancées par les parties à une détection de faux ? Le respect du contradictoire qui traditionnellement garantit l'authenticité des preuves peut-il à lui seul assumer cette charge ? Sinon, quels pourraient être les mécanismes permettant de garantir que les preuves produites devant les juridictions soient authentiques ?