Étudier et transmettre les synergies gestuelles et sonores des battles de hip-hop : une recherche par le design de systèmes d'interaction musicale.
Auteur / Autrice : | Louise Grebel |
Direction : | Frederic Bevilacqua, Sarah Fdili alaoui, Roland Cahen |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Sciences et technologies de l'information et de la communication |
Date : | Inscription en doctorat le 01/09/2024 |
Etablissement(s) : | Sorbonne université |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Informatique, télécommunications et électronique de Paris |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Sciences et technologies de la musique et du son |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
Depuis la troisième vague des interactions humains-machine, caractérisée par l'étude et le développement d'interactions expressives et incarnées, la danse et les systèmes interactifs sonores/musicaux basés sur le geste sont de plus en plus étudiés et développés. Cependant, jusqu'à présent, peu de travaux se sont intéressés aux interactions en jeu dans les battles de hip-hop. Pourtant, cette pratique est exemplaire d'interactions multimodales incarnées, et est par conséquent un terrain culturel et un objet d'étude particulièrement riche. Le danseur hip-hop mobilise d'une part un répertoire gestuel complexe et en constante évolution, co-construit et commun à toute une communauté. Et d'autre part, ses capacités d'écoute musicale lui permettent d'improviser, de réagir à la musique, voire de la sublimer par son mouvement. Le but général de ce projet de recherche par le design, est d'étudier, de caractériser et d'enrichir les interactions gestes-sons, incarnées et définies collectivement, au sein des battles de hip-hop. L'une des motivations de cette démarche est de rendre les bénéfices et la richesse de ces pratiques collectives accessibles à des personnes non-initiées. On sait notamment que la pratique de la danse et de la musique peut renforcer la plasticité cérébrale, réduire ou prévenir des dégénérescence neuronales, améliorer la perception de sa posture et de l'espace, etc. Notre première contribution sera de procéder à une étude de design ethnography (Nova, 2015) des battles de hip-hop afin de caractériser les comportements, les besoins et les intérêts des différents acteurs participants aux battles, danseurs comme spectateurs. Cette étude de terrain permettra d'engager une démarche de design centré-utilisateur, pour définir de nouvelles pratiques et de nouvelles formes d'événements battles, de manière à favoriser l'accès à la pratique du hip-hop pour un public curieux mais non connaisseur. En effet, la multiplication des battles de hip-hop depuis les années 2000 a entraîné une ouverture progressive de ces événements à un public extérieur. Mais ce nouveau public reste, non-initié à la culture hip-hop et aux règles implicites de ces affrontements, et donc extérieur aux battles en quelque sorte. Face à cela, des actions de médiation seraient bénéfiques, et de nouvelles modalités de battles, volontairement inclusives, pourraient permettre à des publics moins représentés (femmes, personnes en situation de handicap) de s'essayer à la pratique de cette danse. Ces événements seront des tremplins vers la communauté hip-hop ou d'autres pratiques musicales et/ou somatiques. La communication autour des enjeux esthétiques, relationnels et sociaux sous-tendus dans ces rencontres pourraient être l'occasion de dialogues autour de la culture hip-hop, entre spectateurs et danseurs. Plus généralement, cela permettra d'initier de nouveaux publics à la danse et à une écoute incarnée (embodied listening) de la musique hip-hop. Notre deuxième objectif est d'augmenter les interactions lors de ces nouveaux événements. Pour ce faire, nous entreprendrons plusieurs phases de conception et de développement de nouveaux artefacts, dont des dispositifs interactifs sonores. Ils pourraient notamment permettre de répondre aux besoins de pratiques émergentes au sein de la danse hip-hop, de leur offrir un espace de rencontre avec des outils technologiques aujourd'hui communs mais non existants du temps de l'émergence du hip-hop, ou encore de faciliter l'accès à ces pratiques pour de personnes non-initiées. Ces dispositifs pourraient par exemple sonifier les intensités et/ou inflexions gestuelles généralement invisibles aux spectateurs. Le son pourrait permettre de qualifier des orientations du corps (axes et obliques), différentes qualités d'énergie employée (saccadée, fluide) afin de distinguer les différents styles de danse hip-hop. Cela nécessitera un travail de design d'interaction, avec un soin particulier apporté au design de geste et au design sonore. La création de ces dispositifs techniques à destination des spectateurs s'appuiera sur l'idée d'interaction forte en agissant sur les boucles d'action-perception-action (Couchot, 2013). Cette transmission d'une expérience active des battles de hip-hop, sera garantie par la proposition de différents scenarii d'interaction, afin de couvrir différents aspects des battles. Nous proposerons également des outils pédagogiques durant ces événements, relatifs à la nomenclature spécifique du hip-hop ou encore au système d'évaluation des battles. Ces événements seront susceptibles d'engager des possibilités collaboratives et créatives entre danseurs et spectateurs. Nous supposons en effet que l'introduction à une activité proprioceptive et sensorimotrice importante est propice à une empathie kinesthésique et sensible des spectateurs envers les danseurs. Finalement, notre troisième objectif est d'évaluer le développement des dispositifs interactifs sonores développés tout au long de la thèse. Il s'agira de créer des mises en situation de type ateliers collaboratifs ainsi que des événements de type battle qui constitueront un cadre d'étude. D'autres usages de ces dispositifs pourront être découverts en favorisant leur appropriation dans d'autres activités, comme l'éducation, la rééducation ou d'autres fins créatives.