A la recherche d'une sémiotique de la culture néolithique. Herméneutique par abduction et couplage, sur le chemin des haches en jadéite alpine.
Auteur / Autrice : | Thomas De Charentenay |
Direction : | Pierluigi Basso, Eric Thirault |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Sciences du langage mention sémiologie |
Date : | Inscription en doctorat le 01/12/2023 |
Etablissement(s) : | Lyon 2 |
Ecole(s) doctorale(s) : | 3LA - Lettres, Langues, Linguistique et Arts |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : ICAR - Interactions, Corpus, Apprentissages, Représentations |
Equipe de recherche : Interactions, Cogntions |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
Nous nous attachons à mieux comprendre la culture néolithique européenne, c'est-à-dire à lever le voile sur les pratiques sociales signifiantes (Greimas 1984) de cette époque. Pour cela notre focale se porte entre 5 300 av. n.e et 3 000 av. n.e, en particulier sur deux activités humaines : d'une part l'installation de sites mégalithiques comme à Carnac ou Stonehenge, et d'autre part le transport de haches en jadéite alpine à travers l'Europe à partir des seules carrières italiennes, en passant par le Morbihan. Les archéologues nous le confirment, ces deux activités sont liées dans la société élitaire hiérarchisée dès le Vème millénaire av. n.e (Jeunesse 2016a). Dans ce contexte, comment étaient organisées les interactions entre individus à grande distance, et en particulier comment assurait-on la mise en uvre de sites mégalithiques et le transport des haches à travers tout un continent ? Pour aborder cette question nous proposons de reprendre les traces matérielles visibles sur les sites mégalithiques et au long du transport des haches en jadéite au néolithique en Europe, en tentant de les interpréter. Les préhistoriens parlent directement d'objets-signe à propos des haches en jadéite (Cassen 2017, Gauthier 2017) déposées par exemple dans des tombes élitaires mégalithiques. A propos des aménagements mégalithiques, ils classent les pierres dressées comme vecteurs de communication publique (Jeunesse 2016b). On note le qualificatif de technologies d'échange de savoirs et d'images pictographiques (Kelly 2015) à propos de monuments remarquables ou de gravures néolithiques. Les haches en jadéite alpine sont l'objet d'analyses morphologiques (Pétrequin 2012, 2013) dénotant le parcours géographique de l'objet. L'archéologie parle de Carnac-style axeheads. Ce qui reste indécis est le sens précis des dalles gravées de signes réguliers au néolithique, des cercles et des alignements de mégalithes, des activités de transport et de dépôt de haches à cette époque. Même si ces artefacts sont de nos jours classés par les archéologues eux-mêmes dans la catégorie des signes, symboles, signaux ou icônes, il reste à combler cette incertitude entre signe interprétable et interprétation formulée et vérifiée. Pour proposer là un sens ou des sens possibles, un point de vue externe à l'archéologie et spécialisé dans l'interprétation des signes semble utile. Nous en appellerons donc à la sémiotique comme technique et comme point de vue, appliquant ses méthodes à un objet nouveau : la culture néolithique dans son expression la plus visible. Claudine Olivier, linguiste à l'Université Lyon 3, a orienté en 2022 ce travail vers les techniques d'abduction telles que décrites par Peirce (Peirce 1883, 1903) et formalisées par Eco (Eco 1984) pour l'élaboration d'une sémiotique spécifique. Pour les artefacts repérés (sites mnémoniques néolithiques, dalles gravées au néolithique), nous élaborons de façon progressive des critères d'inclusion et un plan de pertinence permettant de sécuriser le cadre d'analyse. Des premiers critères, fondés par l'archéologie et la pragmatique, ont été présentés lors du colloque Scène(s)' organisé par Lyon 3 en Mai 2023 (poster de recherche). A partir d'une sélection fine, nos objets jouent alors le rôle de niches écologiques (Basso 2017), pôle d'attraction pour nos hypothèses et nos interprétations. Nous souhaitons aboutir à une proposition de sémiotique spécifique au sens d'Eco (Eco 1984), et livrer une base de données de signes, mis en relation (couplage). Nous serons attentifs à identifier les conditions de possibilité d'une taxonomie de signes répartis en icônes, signaux et concepts. Des archétypes devront incarner ces propositions, dans des cas d'emploi munis de leurs liens clairs vers une métasémiotique (Hjelmslev 1975) explicitant les bases culturelles, techniques et géographiques mises en jeu.