Ecouter les génies et les chauves-souris. Explorer de possibles accords entre les vivants et les savoirs pour penser les émergences zoonotiques en Guinée.
| Auteur / Autrice : | Benjamin Frerot |
| Direction : | Michèle Cros de dory, Alice Desclaux |
| Type : | Projet de thèse |
| Discipline(s) : | Sociologie anthropologie |
| Date : | Inscription en doctorat le 14/12/2020 |
| Etablissement(s) : | Lyon 2 |
| Ecole(s) doctorale(s) : | ScSo - Sciences Sociales |
| Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : LADEC - Laboratoire d'anthropologie des enjeux contemporains |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
Bien que le réservoir animal du virus Ebola constitue toujours une énigme pour les scientifiques, les chauves-souris se voient régulièrement suspectées de jouer un rôle dans les mécanismes d'émergence. Lors de la plus grande épidémie d'Ebola connue à ce jour qui a débuté en Guinée en 2013, c'est la manipulation par un enfant d'une chauve-souris insectivore qui s'est imposée comme l'hypothèse plausible de la transmission initiale du virus. La communication sanitaire, par des messages préventifs incitant à prendre ses distances avec les chauves-souris, participe à la polarisation des perceptions quant aux menaces infectieuses. Au savoir scientifique qui propose une approche occidentale des zoonoses répondraient les savoirs des populations locales, trop vite taxées pendant l'épidémie de fausses croyances ou de pratiques rétrogrades. Cette thèse revient sur ce contexte en Guinée pour examiner, au-delà de cette opposition simpliste et improductive, les possibles points de rencontres entre les manières plurielles de penser et de répondre aux incertitudes zoonotiques. Prendre au sérieux la multiplicité des formes de vies et de connaissances invite à replacer les émergences de pathogènes dans un maillage complexe de processus historiques, écologiques et sociaux où humains et non humains sont amenés à construire de nouvelles alliances. Par le biais d'une anthropologie des zoonoses tournée vers la virologie et le pluralisme ontologique, la recherche propose une ethnographie des formes de cohabitations interspécifiques qui s'éprouvent dans un village peul en Guinée, et interroge comment ces cohabitations peuvent entrer en friction avec le travail des équipes scientifiques qui parcourent le pays pour capturer et échantillonner des chauves-souris. Il s'agit de suivre les rencontres quotidiennes potentiellement pathogènes avec la plus grande chauve-souris d'Afrique devenue émissaire d'un serpent-génie, avec un oiseau nocturne à l'origine de zoonoses historiques et d'attaques en sorcellerie ou encore avec les génies déplacés par la construction d'un barrage hydroélectrique. Toutes ces histoires composites, parfois dissonantes et traversées par des violences épistémiques, invitent à élargir le spectre des causalités susceptibles de faire émerger des environnements pathogènes et, finalement, à questionner les alliances interspécifiques qui composent les conditions d'habitabilité.