Thèse en cours

Histoire comparée de la justice militaire : France, Prusse, Allemagne unifiée (1857-1920)

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Auteur / Autrice : Lara Thom
Direction : Sébastien Le gal
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Histoire du droit
Date : Inscription en doctorat le 01/10/2024
Etablissement(s) : Université Grenoble Alpes
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale sciences juridiques
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre d'Etudes sur la Sécurité Internationale et les Coopérations Européennes

Résumé

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En 1857, sous le Second Empire, Napoléon III fait promulguer le Code de la justice militaire pour l'Armée de Terre. Ce code a des objectifs précis pour rapprocher la justice militaire de la justice ordinaire, d'optimiser son fonctionnement et l'armée, et s'inscrivit dans la continuité de la loi sur l'état de siège de 1849. Il est une réaction aux troubles révolutionnaires de 1848 qui ont provoqué la chute de Louis-Philippe, roi des Français, et de la monarchie de Juillet. Louis-Napoléon Bonaparte, devenu président par la première application du suffrage universel masculin en France, réussit à gagner les faveurs de la population rurale française. Il légitime son coup d'État par le soutien populaire. Il renforce son nouveau pouvoir diplomatique grâce à la victoire partagée dans la guerre de Crimée, aux côtés des Ottomans et des Anglais contre les Russes. Il cherche à appliquer une nouvelle politique d'ouverture vers le monde en s'orientant vers le « libéralisme économique » à l'anglaise, en développant les chemins de fer au service des exportations françaises et des entreprises, qui élargissent leurs industries dans les années 1850 et 1860. Le Second Empire est une période de prospérité économique et de reconquête diplomatique. Les guerres sont menées principalement à l'étranger : d'abord en Crimée (1854-1856), puis en Italie (1859) et au Mexique (1862-1867) durant la guerre de Sécession qui déchire les Etats-Unis. Ses interventions s'étendent jusqu'en Extrême-Orient (Corée, Cochinchine, Japon). La conquête de l'Algérie continue et fait de progrès. Napoléon III tente de rattraper le retard en matière de colonisation et de faire concurrence à l'Angleterre après que l'armée française eut été réduite à la suite de la défaite de Napoléon Bonaparte (1815) et la perte du premier empire colonial français. Napoléon III s'inscrivit dans la tendance des années 1830 et l'accélère grâce au développement technologique, rapide et inarrêtable. Le progrès technique de l'armement se met au service de l'armée française. Cependant, un autre pays poursuivit des aspirations similaires et met un frein à la France : la Prusse. Son ascension fut vertigineuse : le Danemark (1864), l'Autriche (1866), puis la France (1870), sont vaincus successivement en très peu de temps. Ces guerres sont connues, dans l'espace germanophone, sous le terme des « Vereinigungskriege » (guerres d'unification). La défaite à Sedan (1er et 2 septembre 1870) marque la chute de Napoléon III et donne lieu à une guerre cruelle, à des soulèvements incontrôlables, à une répression violente et à un nouveau régime, la Troisième République. La Prusse officialise l'unification avec les royaumes de Bavière, du Wurtemberg et le grand-duché de Bade. En 1872, l'Empire allemand, déclaré dans la galerie des Glaces à Versailles, suit l'exemple français et promulgue le « Militärstrafgesetzbuch für das Deutsche Reich » (le Code pénal militaire pour l'Empire allemand). Les deux pays se haïssent, et s'inspirent. La période étudiée dans le cadre d'une thèse s'étend donc de 1857, année durant laquelle fut donc promulguée le Code de la justice militaire pour l'Armée de Terre française à l'initiative de Victor-Adrien Foucher, à 1920, année durant laquelle l'article 106 de la nouvelle constitution de la République de Weimar a justifié la suppression de la justice militaire en Allemagne : l'élément comparable disparaît ainsi. Deux guerres seront approfondies qui marquent durablement l'histoire de la relation franco-allemande. Deux armées se font face, et chacune a une administration propre, une justice propre, une stratégie propre pour maîtriser les troupes, pour aboutir à la victoire... ou à la défaite. La justice militaire est réformée à plusieurs reprises, comme dans l'Empire allemand, pour l'adapter aux objectifs de chacun. Le sujet de comparaison juridique touche autant à l'histoire du droit interne de la France et de l'Allemagne qu'à l'utilisation du droit au niveau international pour imposer un certain modèle : En France, les crises telles que les troubles intérieures, les guerres, les affaires judiciaires telles que le jugement du maréchal Bazaine, sont des moments de mutation profondes qui mettent à l'épreuve la justice militaire et le bon fonctionnement des institutions juridictionnelles. La justice militaire sert à la défense intérieure. En Allemagne, le code de 1872 sert à Berlin d'imposer sa domination politico-juridique sur les régions allemandes du sud, de la même manière que la codification a servi la France napoléonienne au début du XIXe siècle à exporter son modèle juridique en Europe et de dominer sur le peuple, de construire un État fort basé sur le Droit. La méthode appliquée dans cette thèse est très concrète : l'efficacité de la justice militaire, de ses institutions juridictionnelles et de ses peines est observée et évaluée à partir de cas précis dans un cadre temporel donné. Ces cas de justice militaire française seront comparés avec la justice militaire allemande, en temps de paix et en temps de guerre. La thèse aspire à devenir une étude à la fois juridique, institutionnelle, mais aussi sociale et accessible, concrète et claire, dans le but d'établir une comparaison de l'histoire juridique de la relation franco-allemande et d'approfondir l'étude de l'armée qui était un sujet longtemps méprisé par l'historiographie française et allemande.