Thèse en cours

Le ''camp'' dans la création artistique contemporaine

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Auteur / Autrice : Aymeri Duler
Direction : Valérie Mavridorakis
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Histoire de l'art
Date : Inscription en doctorat le 01/10/2024
Etablissement(s) : Sorbonne université
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Histoire de l’art et archéologie (Paris ; 1992-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre André Chastel (Paris)

Mots clés

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Mots clés libres

Résumé

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Dans ses « Notes sur le camp », publiées en 1964 dans le magazine américain Partisan Review, Susan Sontag élabore des pistes de compréhension de cette notion difficile à saisir. Cette étude fondamentale émerge dans le contexte américain des années 1960, marqué par la contestation des hiérarchies entre les arts savants et populaires, comme nous pouvons le constater dans le Pop art. Le camp y est caractérisé comme sensibilité à la fois tendre et ironique pour des objets dont une forme excessive prime sur le fond ou la fonction. Le terme servira alors à désigner un ensemble d'objets et de pratiques hétéroclites, tels que les lampes Tiffany, la mode des années 1920, ou encore le film King Kong (1933) réalisé par Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack. De la sorte, ce terme constituerait une sensibilité esthétique fondée sur un goût pour des effets théâtraux et affectés. Dans son essai, Susan Sontag esquisse une rapide histoire de la notion, lui donnant pour origine les fastes de la cour de Versailles au XVIIe siècle. Ce faisant, elle ignore le milieu d'origine du terme, à savoir la communauté homosexuelle masculine qui l'emploie depuis la fin du XIXe siècle. En réponse à cette conception, d'autres théoriciens tels qu'Esther Newton, Richard Dyer et Jack Babuscio chercheront à revendiquer le camp en tant que catégorie purement homosexuelle. Selon eux, le terme désigne une sensibilité homosexuelle résultant d'une réponse humoristique au stigmate de l'homosexualité masculine. À partir de là, deux approches concurrentes du camp se dessinent : d'un côté, une conception esthétique initiée par Susan Sontag en 1964 ; de l'autre, une approche socio-historique réservant le camp à son milieu gay d'origine en l'élargissant potentiellement à d'autres emplois queers . Or, bien qu'une littérature abondante existe déjà sur ce terme, les auteurs ont tendance à se positionner d'un point de vue socio-historique ou esthétique sans faire dialoguer ces deux approches qui, pourtant, ont toutes deux conditionné les usages du terme. Par ailleurs, il n'existe à ce jour aucune étude visant à reconstituer une histoire du camp depuis son contexte initial gay anglo-saxon jusqu'à ses répercussions dans d'autres espaces linguistiques. Ainsi seule une étude historique approfondie pourrait-elle éclairer les nombreuses questions relatives aux multiples usages et définitions du camp. Dans cette perspective, ce projet de recherche suit le double objectif de retracer une histoire complète du camp dans ses variations définitionnelles, et d'enquêter sur les modes d'expression artistique de cette sensibilité. En effet, avant la fin de la Seconde Guerre mondiale, le camp semble circonscrit au mode de vie homosexuel, dont l' « esthétique de l'existence » peut transparaître dans certaines photographies, caricatures et descriptions littéraires d'époque. Par la suite, c'est l'émergence d'une culture de consommation de masse dans la seconde moitié du XXe siècle qui paraît avoir permis l'entrée du camp dans le champ de l'art. À cette époque, les cinéastes expérimentaux Kenneth Anger, Jack Smith ou encore Andy Warhol investissent cette sensibilité dans un fastueux de pacotille — celui qui sera ensuite théorisé par Susan Sontag en 1964.