La fabrique de la sécurité : les interactions des préventeurs et préventrices entre siège et sites
Auteur / Autrice : | Emilie Bisbau |
Direction : | Pascal Ughetto, Jean-Christophe Le coze |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Sociologie |
Date : | Inscription en doctorat le 02/04/2024 |
Etablissement(s) : | Université Gustave Eiffel |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Organisations, marchés, institutions (Créteil ; 2010-) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : LATTS - Laboratoire Techniques, Territoires, Sociétés |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
Cette recherche portera sur les interactions des préventeur·rices exerçant dans les entreprises à risques. Notre travail d'analyse de leur activité se fera dans une perspective organisationnelle en s'interrogeant sur l'organisation de la relation entre le siège et les sites industriels ou les chantiers. Acteurs et actrices incontournables de la sécurité, ils pratiquent leur activité dans des contextes marqués par une montée des normes, des standards et des process et donc par une bureaucratie (au sens sociologique) de plus en plus forte, particulièrement dans les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE). Il s'agira ici de questionner comment dans cet univers fortement réglementé et empreint de bureaucratie ils peuvent construire, déployer et animer une politique de prévention et d'anticipation mêlant à la fois une sécurité réglée et une sécurité gérée. Dans un environnement de travail de plus en plus règlementé, les préventeur·rices voient une montée de bureaucratie qui tend à créer dans leur activité un fossé entre une sécurité du travail et une sécurité opérationnelle (Rae & al., 2019), qui peut pour certains professionnels contribuer au renforcement d'un certain « blues » dans leur pratique (Le Coze, 2024). La tendance des organisations à tenter de régler par anticipation et formellement les exigences multiples qu'elles se donnent ou qui sont imposées (objectifs économiques ambitieux, contraintes réglementaires, vigilance face aux risques s'étendant désormais y compris à la cybersécurité) favorise la production de standards qui pose la question de l'articulation avec les situations propres aux sites. Quelle conciliation possible avec les contextes spécifiques aux sites ? Comment arbitrer entre les normes centrales et les contraintes et enjeux des sites en tant que préventeur·rices ? Notre sujet nous place à la croisée de plusieurs types d'apports classiques de la sociologie, et des sciences sociales plus généralement : l'analyse des organisations, de leurs dynamiques et en particulier des relations d'acteurs, l'analyse de l'activité, l'analyse des dynamiques de métier et des identités professionnelles. Nous situerons notre approche à ce croisement, en arrimant l'enquête à une analyse de l'activité des professionnels de la prévention dans un champ multidisciplinaire et marqué par la safety science (Le Coze, 2019). L'entreprise choisie comme terrain d'enquête est une industrie à hauts risques. De façon appropriée au sujet de la thèse et à notre problématique, elle se trouve avoir mis en place une réorganisation dans le but, entre autres, de décentraliser l'activité de ses préventeur·rices du siège afin de les rapprocher des sites. Ce changement organisationnel constitue un terrain particulièrement adapté à la compréhension de ce qui se joue dans le métier de préventeur du point de vue des interactions entre siège et sites. Il a également l'avantage de révéler potentiellement les transformations qui seront opérées en termes de représentations de leur pratique et du métier plus généralement ou encore de la construction et l'application des règles. Avoir accès à une structure en mouvement et la suivre grâce à une approche ethnographique, c'est aussi voir comment la fabrication de la sécurité peut être amenée à évoluer. Ce sera l'occasion de se demander si cette décentralisation a permis un nouveau type de structuration permettant la création de lieu(x) d'échanges, d'espace(s) de communication afin de mutualiser les éléments à remonter au siège. On pourra se demander si les préventeur·trices ce sont saisi·es de ce changement pour influencer des normes (Gherardi, 2019). On pourra observer si d'autres outils ou espace(s) ont été déployés pour descendre des informations de manière uniforme à des sites aux caractéristiques très différentes.