Thèse en cours

La délibération éthique en réanimation

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Auteur / Autrice : Romain Miguel Montanes
Direction : Bertrand QuentinDavid Smadja
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Philosophie pratique
Date : Inscription en doctorat le 02/11/2023
Etablissement(s) : Université Gustave Eiffel
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Organisations, marchés, institutions
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire Interdisciplinaire d'étude du Politique Hannah Arendt (Créteil)

Mots clés

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Résumé

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Environ un patient sur six admis en réanimation finit par y mourir. Le plus souvent, il meurt suite à une décision, par les soignants, d'arrêter ou de ne pas introduire une de ces techniques. Ces décisions sont d'une difficulté particulière. Leurs conséquences, le décès probable du patient, sont immense et elles requièrent d'être entourées de précautions particulières. Si une telle décision est prise alors qu'il ne le faudrait pas, le patient peut décéder indûment. Si une telle décision n'est pas prise alors qu'il le faudrait, la poursuite de soins sans bénéfice escompté l'expose à des souffrances injustifiées, donne de faux espoirs aux proches et consomme une grande quantité de ressources qui pourraient manquer à d'autres patients. En France, ces décisions sont encadrées par la loi du 2 février 2016 qui stipule qu'en réanimation, chez un patient incapable de s'exprimer, décider de l'arrêt ou de la non introduction d'un traitement de maintien en vie doit être précédé d'une « procédure collégiale ». Le mot collégial pose problème du fait de son caractère flou. Certes, on comprend que la loi nous commande que ces décisions soient discutées, c'est-à-dire délibérées, à plusieurs. Mais la notion de collégialité soulève des questions auxquelles il semble difficile de répondre rapidement. Qu'est-ce qu'être collégial ? Comment l'être en réanimation ? Peut-on justifier, d'une manière ou d'une autre, qu'une délibération collective permet de prendre plus souvent, voire à chaque fois, une bonne décision ? Nous reviendrons sur l'intérêt épistémique de la discussion collective. Nous présenterons ensuite le modèle de l'éthique de la discussion d'Habermas selon lequel, la discussion argumentée est au fondement de l'agir moral. Nous remarquerons que la rencontre de ce modèle avec la réalité de l'hôpital soulève des problèmes considérables. Premièrement, les inégalités entre les soignants régnantes à l'hôpital entravent considérablement la possibilité d'une délibération libre et égalitaire. Deuxièmement, l'éthique de la discussion ne prend pas en charge les décisions dans les situations de dilemme moral telles que nous les rencontrons à l'hôpital. Enfin, la dévalorisation radicale des intuitions morales à laquelle Habermas procède ne permet pas de rendre compte du phénomène des intuitions morales des soignants qui sont pourtant au principe de la réflexion morale en situation dans les services hospitaliers. Quatrièmement, des problèmes de la délibération ont été soulevés par des auteurs de science politique comme les phénomènes de polarisation de groupe et de comparaison sociale dont le rôle au cours de la délibération à l'hôpital n'a pas été étudié. Nous proposons d'explorer ces questions au cours de notre travail de thèse, en recourant aux auteurs de la philosophie et de la théorie politique.