La fabrique de la destination pour études de «Chypre-Nord» : le nation-building et les politiques d'attractivité à l'épreuve des parcours de mobilité (1986 - 2023)
Auteur / Autrice : | Théotime Chabre |
Direction : | Sylvie Mazzella, Élise Massicard |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Sociologie |
Date : | Inscription en doctorat le 02/10/2017 |
Etablissement(s) : | Aix-Marseille |
Ecole(s) doctorale(s) : | École Doctorale Espaces, Cultures, Sociétés (Aix-en-Provence) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : MESOPOLHIS - Centre méditerranéen de sociologie, de science politique et d'histoire |
Mots clés
Résumé
La mise en destination d'un territoire ne renvoie-t-elle qu'à des phénomènes économique et migratoire ou participe-t-elle plus largement à la formation de l'État ? Cette thèse vise, à partir d'une perspective de sociologie historique du politique, à explorer cette question à la frontière de la science politique, de la sociologie des migrations et de celles de l'enseignement supérieur. Nous partons d'un travail de terrain qualitatif multi-situé de 8 mois fondé sur des observations et des entretiens semi-directifs, appuyé par un travail archivistique et statistique. Nous nous focalisons sur un territoire qui représente un cas d'école en la matière et nous permet de rendre particulièrement visible le croisement des thématiques qui nous intéresse : le nord de l'ile de Chypre, territoire contesté depuis 1974, reconnu internationalement comme partie de la République de Chypre et contrôlé par une administration qui se considère Etat indépendant sous le nom de République Turque de Chypre du Nord depuis 1983. En parallèle des tractations et des tensions politiques liées à ce conflit politico-territorial, le nord de Chypre est devenu de manière ''banale'' un lieu de passage et d'installation pour de nombreuses populations étrangères, nourrissant une économie de services et favorisant la production d'un imaginaire territorial faisant de ''Chypre-Nord'' une destination distincte. Dans quelles mesures s'articulent la formation contestée d'un État distinct dans le nord de Chypre et l'émergence de « Chypre-Nord » comme destination? En nous concentrons sur l'attractivité des universités sur le territoire, nous reconstruisons le processus socio-historique qui a mené à la popularité de ''Chypre-Nord'' comme destination alternative à la frontière de l'Union européenne pour des dizaines de milliers d'étudiants étrangers des Suds depuis le milieu des années 2000. Pour cela, nous questionnons les thèmes classiques du conflit territorial (conflit ethnique, occupation étrangère, gouvernance internationale des conflits), tout en interrogeant la mise en lien entre le conflit, l'insertion du système universitaire local dans la gouvernance transnationale de l'enseignement supérieur et l'organisation collective des populations migrantes. Le travail de thèse repose sur une approche renouvelée du gouvernement des territoires contestés et de l'interaction entre construction nationale et formation des dynamiques migratoires. Le choix d'intégrer l'étude des mobilités liées à l'enseignement supérieur dans un processus de ''mise en destination'' permet par ailleurs de déspécialiser notre compréhension des mobilités étudiantes. Il nous offre la possibilité de les réinsérer dans des processus migratoires plus larges que sont la hiérarchisation évolutive des populations migratoires, l'engagement des populations étrangères dans les dispositifs d'attractivité et dans le marché du travail local ainsi que la formation de destinations de transit. En d'autres mots, nous faisons l'étude de l'intégration de cette entité politique contestée dans la mondialisation, et de la traduction locale et internationale de la formation de la destination de ''Chypre-Nord'' en termes politiques.