Thèse en cours

L'oralité judiciaire dans l'ancien droit français

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Sofiane Zaakoune
Direction : Philippe BonfilsJulien Broch
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : En droit spécialité Droit privé
Date : Inscription en doctorat le 01/12/2023
Etablissement(s) : Aix-Marseille
Ecole(s) doctorale(s) : École Doctorale Sciences juridiques et politiques (Aix-en-Provence)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : LDPSC - Laboratoire de droit privé et sciences criminelles

Résumé

FR  |  
EN

L'oralité judiciaire dans l'Ancien Droit français La généralisation récente des cours criminelles départementales serait un coup considérable porté à l'oralité des débats devant la cour d'assises. Pourtant, l'oralité, consacrée pendant la Révolution française, était et reste un « principe » essentiel de la procédure pénale, consacré aux plus hauts niveaux, un gage de son caractère à la fois équitable et démocratique. Soucieux de rassembler des Français déchirés après dix années de troubles révolutionnaires, Bonaparte a souhaité, au moment de l'élaboration du Code d'Instruction criminelle de 1808 (abrogé en 1958) donner satisfaction aux tenants de l'ordre ancien (au niveau de l'instruction préalable : tête-à-tête entre le juge et le prévenu, dans le plus grand secret) et ceux de l'ordre nouveau (au niveau de l'instruction à l'audience : faculté de contredire oralement). Le recours à l'Histoire s'impose donc, si l'on entend comprendre comment s'est « négociée » l'architecture procédurale contemporaine. Il semble donc pertinent de retracer les développements successifs de l'oralité dans l'Ancien Droit, depuis l'époque franque jusqu'à l'adoption du Code pénal des 25 septembre-6 octobre 1791. Si, dans un premier temps, les cours laïques lui ont été favorables, ainsi qu'à l'accusatoire, la redécouverte du droit romain au XIIe siècle a conduit les villes italiennes à renouer avec la procédure extraordinaire (Ordo iudiciorum publicum) du Bas-Empire. Leurs homologues françaises vont progressivement leur emboîter le pas, et ce d'autant plus que l'Inquisition (et donc la procédure inquisitoire) s'est développée dans le Midi pour traquer les hérésies. Les raisons de ce changement profond méritent d'être mises en lumière. Il ne s'est pas agi, en effet, uniquement d'extorquer, y compris par la torture, « la » vérité. D'autres considérations sont entrées en ligne de compte pour justifier l'isolement de l'accusé, son tête-à-tête avec le juge : par exemple, la nécessité de prévenir les subornations de témoins. Ce surplomb judiciaire est allé croissant, jusqu'à la grande ordonnance criminelle de 1670. Un déséquilibre procédural, au détriment de l'accusé, a été flagrant (absence de l'avocat, connaissance tardive des charges et témoignages, etc.). Des stratégies de contournement ont existé (par ex. les factums : défenses judiciaires écrites et répandues dans l'opinion publique). L'étude des textes juridiques, de la doctrine et de la jurisprudence devrait permettre de mieux savoir quelle a été le degré d'atteinte aux droits de la défense et par quels moyens et dans quelles conditions celle-ci a pu faire malgré tout, et dans une certaine mesure, entendre sa voix. La dénonciation du secret et les propositions de réforme faites par les criminalistes des Lumières et par les philosophes mérite aussi qu'on s'y attarde car c'est en réaction à ce qui a été présenté comme un « abus » que les révolutionnaires ont proclamé le caractère oral, public et contradictoire de la procédure. La configuration « savoir-pouvoir », pour parler comme M. Foucault, qui a vu le jour, doit beaucoup aux débats du XVIIIe siècle.