Thèse en cours

'Le déséquilibre contractuel entre professionnels de la distribution. Étude comparative entre le droit marocain et le droit français.'

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Auteur / Autrice : El mahdi Taimouri
Direction : Frédéric BuyMeriem Benis
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : En droit spécialité Droit privé
Date : Inscription en doctorat le 15/01/2021
Etablissement(s) : Aix-Marseille en cotutelle avec Université Hassan 2 de Casablanca, Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales de Casablanca
Ecole(s) doctorale(s) : École Doctorale Sciences Juridiques et Politiques (Aix-en-Provence)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : CDE - Centre de Droit Economique

Résumé

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Les deux systèmes juridiques, français et marocain, divergent fondamentalement sur la question du déséquilibre contractuel entre professionnels de façon générale et, spécifiquement, en matière de distribution. L'étude de ce constat suppose l'adoption, à l'occasion de nos recherches de thèse, d'une approche tant comparative (1) que critique (2). 1) Approche comparative : Si les législations marocaine et française s'accordent sur le caractère innommé des contrats de distribution (franchise, concession exclusive et distribution sélective), il en est autrement de l'appréhension juridique des rapports de force caractérisant les relations contractuelles entre partenaires de ce domaine. Alors que le droit français admet que certains professionnels puissent se trouver dans un état de vulnérabilité nécessitant un « rééquilibrage » des dispositions contractuelles, la position du droit marocain, en revanche, demeure empreinte d'objectivisme. Le législateur marocain place en effet les professionnels sur un pied d'égalité érigeant en toutes circonstances les principes classiques et sacro-saints d'autonomie de la volonté et de force obligatoire du contrat. Ce décalage est d'autant plus interpellant qu'il traduit une situation de droit comparé relativement rare, les deux ordres juridiques étant largement harmonisés en matière de droit des affaires. La grande réforme marocaine initiée à la fin du siècle précédent est effectivement d'inspiration française. Concrètement, le sujet du déséquilibre contractuel entre professionnels de la distribution occupe la scène juridique française depuis près de quarante ans. D'abord apparue à travers la législation consumériste (loi Scrivener en 1978 et sa fameuse notion de « non-professionnel »), la problématique s'est par la suite étendue au volet des pratiques restrictives de concurrence avec l'article L. 442-1, I, 2° du Code de commerce (ancien article L. 442-6, I, 2° issu de la LME de 2008). Dans cette mouvance, le législateur civiliste est également intervenu en 2016 par le biais de la réforme du Code civil. À travers cette réforme, la théorie de l'autonomie de la volonté semble avoir cédé le trône à l'équilibre contractuel qui s'est notamment imposé à travers les nouveaux articles 1171 (consacrant la lutte contre les déséquilibres significatifs) et 1195 (admettant la révision judiciaire du contrat pour imprévision). Face à un tel décalage des deux législations étudiées, française et marocaine, les interrogations suivantes ne sauraient être éludées : → Laquelle des deux positions législatives (à supposer que l'inertie du législateur marocain soit intentionnelle et réfléchie) est-elle la plus efficiente ? → Dans quelles mesures et, le cas échéant, par quels moyens la jurisprudence marocaine comble-t-elle l'absence de mécanismes protecteurs spécifiques ? Doit-elle s'inspirer en ce sens des avancées de la jurisprudence française ? → La doctrine marocaine a-t-elle initié, à l'instar de la doctrine française, un véritable débat sur la question ? En tout état de cause, une analyse critique s'impose. 2) Analyse critique : La position du droit français, dans son orientation protectionniste de la partie faible au contrat de distribution, est certes louable car garante d'équité contractuelle. Mais elle n'en demeure pas moins critiquable en ce qu'elle n'aboutit qu'au détriment de la sécurité juridique. En effet, la prise en compte de la faiblesse de certains professionnels engendre l'éclatement de cette catégorie (avertis, profanes…). Quant à la consécration législative de la protection, elle se traduit par la multiplication de textes spécifiques souvent imprécis à l'origine d'une imprévisibilité des décisions judiciaires. À l'opposé, la neutralité caractéristique du droit marocain, à l'ère d'une mondialisation génératrice d'inégalités structurelles profondes entre opérateurs économiques, n'est pas sans contrevenir à l'impératif de justice contractuelle que les principes traditionnels du droit civil ne sont plus à même de garantir. Un juste milieu entre l'inertie du droit marocain et l'interventionnisme du droit français devrait donc être recherché. Nous tâcherons d'orienter notre étude en ce sens. Pour ce faire, nous tenterons de nous projeter dans une étude de lege ferenda en vue de déterminer, d'une part, dans quelles mesures le législateur marocain et, à défaut, le juge, devraient-ils s'imprégner des avancées réalisées par leurs homologues français sur la question traitée, et, d'autre part, de proposer des instruments de nature à corriger les imperfections des deux systèmes juridiques réunis.