Entre le terrain et le musée : Légitimation partielle du street-art et appropriation intermédiaire de lespace.
Auteur / Autrice : | Anton Olive |
Direction : | Sylvie Mazzella, Gisèle Sapiro |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Sociologie |
Date : | Soutenance en 2024 |
Etablissement(s) : | Aix-Marseille |
Ecole(s) doctorale(s) : | École Doctorale Espaces, Cultures, Sociétés (Aix-en-Provence) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : MESOPOLHIS - Centre méditerranéen de sociologie, de science politique et dhistoire |
Jury : | Président / Présidente : Sylvia Girel |
Examinateurs / Examinatrices : Sylvie Mazzella, Delphine Naudier, Marie-Hélène BACQUé, Gisèle Sapiro, Jean-Yves Authier | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Delphine Naudier, Marie-Hélène BACQUé |
Mots clés
Résumé
Ce travail interroge laccroissement spectaculaire des projets légaux de street-art dans les villes françaises et européennes dans la dernière décennie. Après une phase de retournement progressif du stigmate social et artistique associé au graffiti à partir des années 2000, on assiste en effet à une explosion de festivals et de parcours de street-art promus par les municipalités depuis la deuxième partie des années 2010. Lenquête qui soutient cette recherche porte sur le suivi de différents projets de ce type, réalisés dans les villes de Paris, Marseille et Bruxelles. Elle repose sur un large volet qualitatif (entretiens, immersion auprès dacteur·ices en charge des projets, observations directes dans les lieux concernés), complété à plusieurs reprises par des traitements quantitatifs (ACM, statistiques descriptives). Lobjectif général est ainsi dentrer en détail dans lhomologie entre dimensions sociales, symboliques et morphologiques de lespace urbain, pour documenter empiriquement les processus menant à des tentatives dappropriation symbolique de certains quartiers par lart, et pour les confronter à leurs effets réels. En revenant sur lhistoire de lautonomisation dune pratique spécifique du street-art, et en rendant compte de létat actuel du champ du street-art français, la thèse sattache dans un premier temps à identifier une nouvelle phase de la légitimation de cet art, caractérisée par sa prise en charge par les pouvoirs publics locaux dans le cadre de politiques de développement urbain. On montre comment se construisent des coalitions dacteur·rices qualifiées de « développementalistes » au sens de Clarence Stone, qui se fédèrent autour dune conception instrumentale du street-art et de ses effets dans la ville. Sans constituer lunique manière de créer des projets de street-art, cette forme développementaliste acquiert une position hégémonique dans lespace de la production des fresques murales, et tend à déterminer une modalité dominante de production de street-art dans lespace urbain, marquée par une forte hétéronomie. La deuxième partie du travail sattache alors à identifier les effets esthétiques de cette hégémonie développementaliste, dans le type de fresques produites. En proposant une méthodologie danalyse du contenu iconographique des uvres, on met en lumière la manière dont simpose une uniformité esthétique, caractérisée par la recherche constante de consensus formel, que lon peut considérer comme la transcription esthétique de limpératif de consensus qui préside à lélaboration de ces projets. Cette iconographie développementaliste simpose progressivement et sélargit à un nombre croissant de paysages urbains différents, au point quelle semble être investie par les acteur·rices concerné·es dune propension intrinsèque à opérer une transformation urbaine. La dernière partie de la thèse tente alors de poser empiriquement la question de ce pouvoir transformateur des fresques de street-art. Limposition dans l'espace de formes esthétiques investies dun pouvoir symbolique de développement urbain conduit-telle nécessairement à un renouvellement effectif de la population des lieux concernés, et dès lors à des logiques de gentrification ? En sappuyant notamment sur des méthodes issues de la sociologie de la réception, on propose ici dobjectiver le caractère plus ou moins marquant du street-art dans la ville en partant des usages concrets de lespace urbain engagés par les (multiples) pratiques de visites liées au street-art. Puis on mobilise un cas particulier dinstitutionnalisation dun projet de street-art vandale dans la périphérie parisienne pour interroger lévolution des usages urbains associés à ce processus. On conclut plutôt quà un inévitable phénomène de gentrification, à la structuration et au développement dappropriations intermédiaires de lespace urbain.