Thèse en cours

Henry Monnier, des vies déguisées

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Auteur / Autrice : Cyrille Rollet
Direction : Jean-Claude Yon
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Histoire, textes, documents
Date : Inscription en doctorat le 01/09/2023
Etablissement(s) : Université Paris sciences et lettres
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'École pratique des hautes études
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Savoirs et Pratiques du Moyen Âge au XIXe siècle (Paris)
établissement opérateur d'inscription : École pratique des hautes études (Paris ; 1868-....)

Mots clés

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Résumé

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Henry Monnier (1799-1877), petite figure du monde culturel du XIXe siècle, n'est essentiellement connu que par deux études déjà fort anciennes (Champfleury, 1879 et Aristide Marie, 1931). Chacun de ces deux auteurs avaient courageusement tenté, avec les moyens du temps, une biographie mais également une tentative de catalogage de l'ensemble de sa vaste production artistique et littéraire. Caricaturiste comme dessinateur plus classique, pratiquant le portrait à la plume ou au graphite tout autant que les scènes de genre à la gouache, illustrateur d'ouvrages, littérateur spécialisé dans les scènes dialoguées mais surtout comédien itinérant, l'image de Monnier est restée assez floue. Au mieux, il n'est plus dans les mémoires que l'un de ces nombreux primesautiers et gais mystificateurs de la fin de la Restauration et du début de la Monarchie de Juillet, devenus, comme il se doit, bedonnants sous le Second Empire. Triste trajectoire, figée par le psychologisme de ces nécrologies paresseuses qui rappellent à l'envi et sans recul que le créateur de Joseph Prudhomme aurait fini par s'identifier à son personnage. La messe est dite, pour parler en apophtegme comme l'un de ses Diseurs de riens. Il est vrai que la multiplication de ses pratiques artistiques et ses trop rares succès, toujours très éphémères, sont un frein à une franche appréhension mémorielle. Le dédain profond des contempteurs de la génération suivante, n'ayant que mépris pour son petit genre (Baudelaire en tête) tout autant que celui de la plupart des Balzaciens du XXe siècle, le ressuscitant pour mieux l'enterrer (à l'exception notable d'Anne-Marie Meininger), ne peuvent susciter de réel engouement pour un artiste dont on ne voit plus guère les œuvres, un écrivain qu'on ne lit plus et un acteur décédé avant l'invention du cinéma. Il y a bien une grêle entrée « Henry Monnier » dans la plupart des dictionnaires, mais à quoi bon ? La raison d'être de ce travail, outre le plaisir de découvrir un énième petit maître de l'époque romantique, est heuristique. Il s'agit d'envisager la question de la biographie en histoire à travers l'exemple d'un artiste aux activités nombreuses, irréductibles les unes aux autres. L'une d'entre elle, la comédie à travestissements, métaphorise à souhait ces identités diverses et concomitantes. Ces facettes sociales d'Henry Monnier seront donc envisagées successivement, sans le vieil artifice idéaliste de mise au jour d'une identité personnelle forcément unifiée. Il y a donc bel et bien un Monnier citoyen de son temps, familialement et géographiquement ancré, un Monnier caricaturiste, un Monnier écrivain, un Monnier comédien, un Monnier dessinateur. Chacune de ses occupations sociales révèle un trajet spécifique tout en se croisant, s'entremêlant, au gré des hasards et des nécessités du moment. La dimension purement intime de sa vie, éternel angle mort de toute biographie, bienséance et absence de sources se faisant la courte échelle, vient rappeler, par son absence notable, l'impossibilité intrinsèque de tout discours achevé. L'effet kaléidoscopique et éclaté de cette vie, tout aussi originale que n'importe quelle autre, sera logiquement nié par les annexes. À travers une tentative de remise à jour du catalogage de son œuvre et des « étapes » biographiques redevenues linéaires, la chronologie se réimposera, in fine, comme obligation à la fois académique et idéologique. M. Prudhomme se croira sauvé : la lisibilité aura l'air de régner à nouveau.