Thèse en cours

La Real Academia Española face à l'innovation linguistique, de 1999 à aujourd'hui

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Auteur / Autrice : Yaël Fenelon
Direction : Sophie Sarrazin
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : ETUDES ROMANES spécialité Etudes hispaniques et hispano-américaines
Date : Inscription en doctorat le 01/09/2023
Etablissement(s) : Montpellier 3
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Langues, Littératures, Cultures, Civilisations (Montpellier ; 1991-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : RESO: Recherches sur les Suds et les Orients

Résumé

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Il s'agira d'analyser les positions de la Real Academia Española (RAE), institution normative espagnole en charge de la régulation de la langue castillane et, partant, instance de légitimation officielle des pratiques linguistiques, face à l'innovation linguistique, que nous définirons provisoirement comme l'ensemble des phénomènes langagiers (graphiques, lexicaux, morphologiques, morphosyntaxiques, syntaxiques) diffusés à une échelle plus ou moins grande de la communauté linguistique mais non encore collectivement acceptés ni implantés. La période choisie (1999 à nos jours) correspond à un changement d'orientation majeur dans l'histoire d'une institution fondée en 1713, et souvent accusée de « castillanocentrisme » : l'engagement dans une politique panhispanique, manifestée jusque dans sa devise qui du « limpia, fija y da esplendor » (‘elle nettoie, fixe et fait rayonner') des origines est devenue « unifica, limpia y fija » (‘elle unifie, nettoie et fixe'), où l'on voit bien se faire jour l'idée d'une norme, d'un bon usage de l'espagnol (« limpia », « fija ») et d'une norme unificatrice, garant de l'unité panhispanique. Ce tournant pris par la RAE est lancé en 1951, avec le regroupement des Académies de la langue espagnole pour former l'ASociación de las Academias de la Lengua Española (ASALE). Cependant, la période choisie commence en 1999, car c'est cette année-là que paraît le premier ouvrage réalisé conjointement par la RAE et l'ASALE, le traité orthographique (Ortografía) ; à sa suite, au cours des premières décennies du XXIe siècle, vont se succéder de nombreuses publications s'inscrivant dans ce nouveau courant : le Diccionario Panhispánico de dudas (sorte de manuel du bon usage de l'espagnol) en 2005, une Grammaire (Nueva Gramática de la Lengua Española) en 2009 et deux éditions de dictionnaires académiques (Diccionario de La Lengua Española) en 2001 (22ème édition) et en 2014 (23ème édition). Cette période de grammatisation qui, comme on le voit, porte sur les trois grands domaines de codification (orthographe, grammaire, dictionnaires), coïncide également avec une mondialisation accélérée des échanges et donc de renégociation des espaces linguistiques, en particulier celui de l'hispanophonie, ce qui confère au panhispanisme linguistique une forte connotation politique, comme l'ont signalé de nombreux travaux. La période se caractérise également par des pratiques linguistiques nouvelles, en pleine mutation, du fait précisément de l'intensification des échanges et de l'intensification des contacts de langues, en particulier avec l'anglais, et de l'accélération de la diffusion de ces pratiques au travers des média traditionnels mais aussi et surtout au travers de ce qu'il est convenu d'appeler les réseaux sociaux. Ainsi, la circulation et l'émergence des innovations linguistiques acquièrent une visibilité que les instances de régulation de la langue ne peuvent ignorer, d'autant que les nouvelles formes de socialité créées par les espaces numériques ont favorisé la construction de réseaux horizontaux et l'émergence de revendications dans le domaine linguistique et discursif (par exemple celles qui promeuvent l'usage du langage inclusif). Parallèlement à cela, la constitution et l'exploitation de corpus oraux ou, plus largement, de corpus rassemblant des pratiques discursives non-normées ont permis ces dernières années d'objectiver et de circonscrire certains de ces usages. Engagée dans un processus de décentralisation, la RAE s'est donc trouvée dans le même temps confrontée à de nouveaux défis. Et c'est précisément cette tension entre, d'une part la revendication d'une ouverture à la variation et, d'autre part, une demande sociale de légitimation d'usages discursifs et linguistiques innovants, que nous souhaitons interroger.