Thèse en cours

Le sionisme chez Sartre, Levinas et Derrida

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Auteur / Autrice : Zoé Grange-marczak
Direction : Marc Crépon
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Philosophie
Date : Inscription en doctorat le 01/09/2023
Etablissement(s) : Université Paris sciences et lettres
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Lettres, Arts, Sciences humaines et sociales (Paris ; 2010-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Pays germaniques Transfert culturels et Archive Husserl
établissement opérateur d'inscription : Ecole normale supérieure

Résumé

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Le sionisme est une idée et un mouvement politique, nés à la fin du XIXᵉ siècle, et selon lesquels les juifs sont une nation unifiée qui doivent établir un État autonome sur un territoire précis. En 1948, l'État d'Israël est proclamé, et s'ensuit immédiatement la première d'une longue série de guerres et de conflits avec les pays de la région. Ce sont ces évènements qui interrogent Sartre, Levinas et Derrida, qui ont chacun à leur manière cherché à comprendre et à éclairer le sionisme à la lumière des notions de judaïsme et d'antisémitisme. Aucun des trois n'a proposé d'ouvrage systématique sur l'État d'Israël, et la pensée politique des auteurs est à chercher dans des articles de journaux, des interviews, des communications. Des analyses de Levinas pour la presse juive dans les années 1930 aux articles de Derrida pour Le Monde diplomatique au début des années 2000, en passant par les interviews de Sartre pour des journaux étrangers autour de 1967, le sionisme est pour eux une question, qui met en jeu une interprétation des faits historiques que sont le judaïsme et l'antisémitisme, mais aussi des notions philosophiques (État, nation, peuple). Cette thèse cherchera à comprendre comment une notion en pensée politique s'élabore à partir de données historiques et concrètes évoluant constamment ; autrement dit la manière dont un objet géopolitique ou idéologique (le sionisme et l'État d'Israël) devient un problème pour la philosophie. Il faudra s'interroger sur la nature et la valeur des différentes communautés et institutions politiques (la religion, la nation, l'État, la communauté internationale) telles qu'elles sont remises en question par la violence des évènements et les conflits, qui connaissent un paroxysme au xxᵉ siècle. Plus encore, il s'agit d'explorer le rôle de la religion en politique et les réactualisations de cette question, c'est-à-dire comment est-ce qu'un système de croyances et de prescriptions basées sur des textes sacrés influence ou justifie l'ensemble des règles et des institutions collectives. Le judaïsme est d'abord compris comme ensemble signifiant et normatif de règles, de doctrines et d'interprétation du monde : il ne s'agit pas d'une religion agissant seulement à un niveau individuel ou subjectif, mais bien d'une totalité de significations qui structurent la vie sociale. L'antisémitisme, en tant qu'hostilité au judaïsme, est tout d'abord le rejet de ce groupe social par l'ensemble humain plus large au sein duquel il s'inscrit. Hostilité à l'égard du peuple juif qui se traduit en paroles ou en acte, il s'agit d'un phénomène politique structurant pour les juifs et pour la politique mondiale, et particulièrement du sionisme, mouvement qui s'appuie tant sur la définition du judaïsme dans son sens de religion formant communauté (critère positif) que sur celle de l'antisémitisme comme menace pour la survie des juifs (critère négatif). L'une des principales méthodes d'interprétation qui guide ce projet est celui selon lequel les évènements politiques réels interrogent les concepts — en ce qu'ils leur résistent, leur échappent, ou au contraire les illustrent. La création de l'État d'Israël démontre ce principe : avant d'être un fait empirique, elle a existé en tant qu'idée écrite dans des livres, développée dans des articles, justifiée dans des débats. Le point de départ sera donc le sionisme comme une question adressée aux philosophes ; pour l'illustrer, il faudra interpréter et expliciter les propos de ces trois auteurs à la lumière d'un contexte politique et diplomatique informé, à la fois concernant la situation au Moyen-Orient et le cadre spécifiquement français dans lequel tous trois élaborent leurs concepts philosophiques.