Etude des mécanismes de libération des particules virales du Virus Respiratoire Syncytial
Auteur / Autrice : | Tristan Jaouen |
Direction : | Delphine Sitterlin |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Sciences de la vie et de la santé |
Date : | Inscription en doctorat le 30/09/2023 |
Etablissement(s) : | université Paris-Saclay |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Structure et dynamique des systèmes vivants (Gif-sur-Yvette, Essonne ; 2015-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Infection et inflammation |
Référent : Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
Les infections par le virus respiratoire syncytial (RSV) constituent un problème majeur de santé publique. Le RSV est la principale cause d'infections virales respiratoires sévères de l'enfant dans le monde. Il est à l'origine de plus de 33 millions cas de bronchiolites chez l'enfant de moins de 5 ans dans le monde. Il est également responsable de pathologies respiratoires sévères chez les sujets âgés ou immunodéprimés. Il n'existe pas de vaccin à ce jour, et le manque de données structurales et fonctionnelles sur les protéines virales et sur certaines étapes du cycle viral est un frein à l'élaboration d'antiviraux efficaces. Le RSV est un virus à ARN enveloppé qui infecte les cellules ciliées des voies respiratoires. La particule virale est constituée d'une enveloppe lipidique qui contient les deux glycoprotéines F et G. La protéine de matrice M est localisée sous l'enveloppe en interaction avec la bicouche lipidique. A l'intérieur de l'enveloppe est présente la ribonucléoprotéine virale (ou RNP), constituée de l'ARN génomique de polarité négative, encapsidé par la nucléoprotéine N, et associé aux protéines du complexe polymérase (P, L et M2-1). Le cycle du virus se déroule uniquement dans le cytoplasme de la cellule et nous avons établi que les étapes de transcription/réplication se déroulent dans des « usines virales » appelées corps d'inclusion (1,2). De nouvelles RNPs sont produites dans ces corps d'inclusions puis exportées vers les sites de bourgeonnement du virus situés à la membrane plasmique par une voie dépendante de Rab11 (3). Plusieurs travaux mettent en évidence le rôle prépondérant de l'actine et notamment du complexe ARP2/3 au niveau des sites de bourgeonnement (4). L'étape de bourgeonnement est suivie de la libération des particules virales après scission des membranes. Les mécanismes moléculaires qui sous-tendent la scission membranaire et in fine la libération des virions dans le milieu extra cellulaire sont inconnus. Pour de nombreux virus enveloppés (dont HIV, virus Ebola, virus de la rage), la scission membranaire est dépendante du complexe cellulaire protéique ESCRT. Ce complexe intervient dans de nombreux processus de scission membranaire, tels que la libération des endosomes à l'intérieur des corps multivésiculaires « MVB », ou le processus d'abscission en fin de mitose. Classiquement, le recrutement du complexe ESCRT au niveau des sites de bourgeonnement est assuré par les protéines de matrice des virus qui jouent un rôle central dans les dernières étapes du cycle viral. Dans le cas du RSV, nous savons que la scission membranaire est indépendante de la voie ESCRT (5). Elucider les mécanismes de la libération des virions du RSV est crucial pour une meilleure compréhension de la multiplication de ce virus mais permettrait plus largement de découvrir de nouveaux mécanismes de scission membranaire ESCRT indépendants détournés par des virus enveloppés et de préciser le fonctionnement de voies cellulaires de scission membranaire encore mal décrites. L'étude de la scission membranaire du RSV est complexe, étant donné que le RSV a la particularité de former deux types de particules virales, i) des filaments viraux présents à la surface des cellules infectées pour lesquels l'étape de scission membranaire n'est pas nécessairement finalisée (ces filaments seraient infectieux et propageraient l'infection de proche en proche par formation de syncytia) ii) des virions détachés des cellules ayant eux finalisés le processus de scission membranaire. Pour ces raisons, nous avons mis en place au laboratoire un test particulier permettant de séparer les virions libres, des virions associés aux cellules. Grâce à ce test, nous avons récemment démontré que la protéine cellulaire Drebrin est impliquée dans l'étape de libération des particules virales. La Drebrin est une protéine que l'on retrouve au niveau des lamellipodes, associée à l'actine, la tropomyosine et le complexe ARP2/3. De manière intéressante, des études ont démontré que cette protéine favorise la formation d'ectosomes (vésicules extracellulaires se formant au niveau de la membrane plasmique par un mécanisme distinct de celui des exosomes) par une voie ESCRT indépendante (6,7). Nous avons également mis en évidence une relocalisation de la Drebrin à la membrane plasmique dans les cellules infectées par le RSV, par le biais de son interaction avec la protéine de matrice M. Le projet de thèse a pour objectif de mieux caractériser l'implication de la Drebrin et de ses partenaires cellulaires dans le mécanisme de scission mais également de mettre en place une approche globale permettant de comprendre les mécanismes qui dirigent cette étape finale du cycle viral. Ce projet se décomposera en plusieurs axes : 1/ Dans un premier temps, nous préciserons l'interaction entre la protéine Drebrin et la protéine de matrice M. Cette interaction a pour l'instant été mise en évidence par co-immunoprécipitation, nous chercherons à confirmer cette interaction par des approches plus directes : i/ approche in cellulo de reconstitution d'activité luciférase, « split luciferase complementation assay » ii/ approche in vitro via la production de protéines recombinantes. Nous rechercherons également les domaines protéiques des protéines M et Drebrin impliqués dans cette interaction. Nous préciserons aussi la localisation subcellulaire de M et de la Drebrin notamment en utilisant des lignées stables exprimant la protéine Drebrin fusionnée à une étiquette et en les infectant avec des virus recombinants fluorescents (outils maitrisés au laboratoire). Ces outils nous permettront de réaliser de la microscopie à haute résolution pour analyser si la Drebrin se localise à la base des filaments viraux comme attendu pour une protéine impliquée dans la scission membranaire. 2/ Le processus de scission nécessite une courbure importante de la bicouche lipidique qui est classiquement généré par l'action coordonnée de plusieurs protéines. Pour découvrir les acteurs de cette voie, nous avons comparé les interacteurs de la Drebrin dans des cellules infectées versus non infectés par des expériences d'immunoprécipitations et une analyse en spectrométrie de masse. En effet, cette protéine se relocalisant à la membrane durant l'infection, il est fort probable que les interacteurs de la Drebrin soient aussi impliqués dans ce processus. Dans un premier temps nous analyserons l'implication de ces protéines candidates dans la libération des virions. Pour ce faire nous inhiberons l'expression des protéines candidates par ARN interférence et quantifierons la libération des virons par le test mis en place au laboratoire. Une analyse plus fine du rôle de la ou des protéines ainsi identifiées dans la libération des virions sera ensuite réalisée. 3/ Finalement, nous pourrons aussi envisager une approche globale indépendante de l'implication de la Drebrin. Rappelons que le RSV possède la particularité de former des filaments viraux attachés à la surface des cellules infectées pour lesquels l'étape de scission membranaire n'est pas nécessairement finalisée. Il s'agirait ici d'isoler ces structures et d'en déterminer la composition protéique. En effet, il est fort probable que dans ces structures soient présents des composants cellulaires impliqués dans ces étapes de scission membranaire. Cette analyse pourra être complété par l'analyse en parallèle des virions libres dont la composition pourrait être différente. Pour cela, nous construirons des virus recombinants permettant l'expression d'une protéine d'enveloppe G fusionnée à la GFP. Nous séparerons les deux types de particules virales en utilisant le test décrit et nous les purifierons par cytométrie en flux ou chromatographie d'affinité afin d'analyser leur contenu protéique par spectromérie de masse. En conclusion, ces trois axes permettront de mieux définir les mécanismes de la libération des virions du RSV, dont l'originalité par rapport à d'autres virus enveloppés est déjà connue.