Thèse en cours

Enquête philosophique sur l'objet ornemental : la nature morte à l'ère du kitsch capitaliste

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Auteur / Autrice : Justine Dupuy
Direction : Pierre-Henry Frangne
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Philosophie, Esthétique, Arts
Date : Inscription en doctorat le 28/10/2020
Etablissement(s) : Rennes 2
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Arts, Lettres, Langues (Bretagne)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : Histoire et Critique des Arts (Rennes)

Résumé

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La deuxième moitié du XVIIIe siècle voit éclater ce que l'on nomme aujourd'hui la querelle berlinoise de l'ornement. Cette crise esthétique amène avec elle un bouleversement normatif en ce qui concerne les productions artistiques et industrielles de l'époque : l'ornement est-il secondaire, superflu et contingent, ou bien relève-t-il d'une cosmétique nécessaire pour faire émerger le décoratif ? La frontière entre les beaux-arts et les arts appliquées s'en trouvera bouleversée, et de cet ébranlement émergera des pratiques ainsi qu'un corpus théorique importants relevant des arts industriels. A la suite des travaux menés sur le sujet et dans le prolongement des recherches sur la culture matérielle et la théorie critique, nous enquêtons sur la prolifération des objets décoratifs dans nos intérieurs du XIXe siècle jusqu'à nos jours. Cette étude se fonde sur un examen du rapport entre la secondarité essentielle de l'ornemental et sa profusion au cœur de l'esthétique capitaliste contemporaine à travers ses occurrences propres (en tant qu'objets décoratifs) et ses représentations (en tant qu'images issues de la tradition picturale de la nature morte). Par objet ornemental, nous entendons tout objet dont la finalité relève de la décoration et dont l'existence dépend entièrement d'un intérieur à orner. En ce sens, le concept trouve son principe dans l'inessentiel, si cher au productivisme capitaliste. Car l'objet que nous qualifions d'ornemental relève moins des arts décoratifs que de la production massive d'objets de décoration industrielle, ces marchandises de moindre prestige désignées chez d'autres comme le bibelot, la pacotille, la babiole, le colifichet... Notre projet s'ancre avant tout dans une analyse philosophique qui déterminera les implications esthétiques, artistiques, culturelles, politiques, et sociologiques de l'objet ornemental sur les pratiques et les goûts des individus. La recherche s'organise autour de quatre axes. Le premier vise à considérer l'objet ornemental comme le résultat d'un mode industriel de production capitaliste que nous qualifions de kitsch en ce qu'il permet une prolifération parergonomique du décoratif. Le deuxième consiste à montrer que les modalités d'apparition de l'objet ornemental répondent à l'esthétique du bibelot, de la camelote, du simili, c'est-à-dire du kitsch en tant qu’esthétique du fallacieux. Le troisième axe propose une vue d'ensemble des représentations et des mises en scène des objets ornementaux depuis l'apparition de la nature morte picturale jusqu'aux natures mortes publicitaires inondant les espaces urbains et les espaces numériques, de l'étal de magasin jusqu'aux scénographies du quotidien dans les intérieurs de la masse. Le quatrième et dernier axe questionne les effets de la prolifération de l'ornemental sur la subjectivité et le goût des consommateurs et consommatrices.