Thèse en cours

La Colombie dans la Société des Nations : alliances et stratégies de coopération des petites puissances face à la reconfiguration de l’impérialisme (1919-1939)

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Auteur / Autrice : Christian Casas Garcia
Direction : Clément Thibaud
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Histoire
Date : Inscription en doctorat le 30/10/2018
Etablissement(s) : Paris, EHESS
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales

Résumé

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La participation de la Colombie à la Société des Nations (SdN) illustre les efforts des pays à l’influence limitée, vulnérables face aux grandes puissances, pour s’insérer dans un système international en recomposition, et y faire entendre leurs aspirations et revendications. Loin d’adopter une posture exclusivement subordonnée, la Colombie s’est engagée activement dans les espaces offerts par Genève pour renforcer sa position internationale, malgré les fortes inégalités structurelles qui contraignaient ses capacités d’action. En s’alliant à d’autres petits pays, latino-américains, asiatiques et est-européens, elle a participé à la construction de solidarités visant à contester l’hégémonie des grandes puissances et à promouvoir un multilatéralisme davantage inclusif. À travers ces alliances, ces pays cherchaient à influencer les pratiques de la gouvernance mondiale et à faire reconnaître leurs intérêts dans l’élaboration des normes internationales. Pour analyser la SdN comme un espace propice à la construction d’alliances entre les acteurs des petites puissances, cette thèse adopte une approche à la fois prosopographique et ethnographique. Cette méthode permet d’identifier les dynamiques nationales, régionales et transversales, tout en étudiant les liens tissés par les délégués, tant au sein des instances genevoises que dans des configurations géographiques plus larges. L’objectif est de dresser un portrait précis de la délégation colombienne, en mettant en lumière ses positionnements, ses singularités, ses moyens d’intégration au sein de l’organisation, sa mobilité ainsi que ses convergences avec d’autres dynamiques collectives. De plus, l’étude de la matérialité de l’action diplomatique, à travers les compétences mobilisées, les espaces et les objets utilisés par les acteurs, éclaire les logiques concrètes de solidarité entre les délégations étudiées. Dans un système où Genève, malgré son discours universaliste, participe à légitimer de nouvelles formes d’impérialisme, les acteurs des petites puissances prennent conscience de leur position de vulnérabilité. Face à cette asymétrie, la Colombie cherche à obtenir des garanties concrètes pour défendre sa souveraineté, en s’intégrant aux discussions multilatérales sur les questions d’intérêt commun. Ainsi, les petites puissances s’efforcent de promouvoir un ordre international fondé sur le droit, dans lequel des principes tels que l’arbitrage ou la condamnation des conquêtes territoriales par la force agissent comme un contrepoids à l’hégémonie des grandes puissances et comme un cadre de protection pour les pays faibles. La Colombie ne reste pas inactive face aux dynamiques de domination des grandes puissances. La SdN devient ainsi un espace de tensions, où s’opposent les logiques traditionnelles de l’équilibre des puissances et un discours nouveau en faveur d’un ordre fondé sur la paix, la coopération et la transparence. Toutefois, ces solidarités entre petites puissances restent instables, affaiblies par des tensions régionales, des disparités d’influence et des intérêts parfois divergents. Les opportunités, mais aussi les limites de ces alliances, mettent en lumière la diversité des appropriations des principes de la première tentative du multilatéralisme, chaque acteur cherchant à y inscrire ses intérêts nationaux ou personnels à travers des rapprochements ponctuels, mais significatifs, avec d’autres pays en situation de vulnérabilité.