L'effet utile dans le contentieux administratif
Auteur / Autrice : | Cathy-Anne Rhety |
Direction : | Pascale Idoux, Denis Chabert |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Droit Public |
Date : | Inscription en doctorat le 01/10/2022 |
Etablissement(s) : | Université de Montpellier (2022-....) |
Ecole(s) doctorale(s) : | Ecole doctorale Droit et science politique |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : CREAM - Centre de Recherches et d'Etudes Administratives de Montpellier |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
Il existe, en droit administratif français, différents recours contentieux prédéfinis et dotés d'un régime juridique qui leur est propre et duquel découlent les pouvoirs susceptibles d'être mis en uvre par le juge. Il appartient ainsi aux administrés d'emprunter la voie de droit adéquate et adaptée à leurs prétentions. Ces différentes voies de recours ont été conceptualisées par l'ancien vice-président du Conseil d'Etat Edouard Laferrière à la fin du XIXème siècle qui distingue les différents contentieux selon les pouvoirs du juge. Parmi cette classification, majoritairement reprise en droit positif tant par le Conseil d'Etat que par le législateur, deux contentieux dominent : le recours pour excès de pouvoir et le recours de plein contentieux. Toutefois, les évolutions successives du contentieux administratif français, illustrées notamment par l'octroi au juge de l'excès de pouvoir d'un pouvoir d'injonction, d'un pouvoir de modulation des effets dans le temps de ses décisions, d'un pouvoir de régularisation et, plus récemment, d'un pouvoir d'abrogation conduisent sans cesse, à travers une littérature abondante, à la remise en cause de cette distinction centenaire des contentieux . Récemment, ce débat doctrinal a été relancé par l'arrêt Association des Américains accidentels rendu par le Conseil d'Etat réuni en Assemblée le 19 juillet 2019 (CE, Ass., 19 juillet 2019, nos 424216, 424217, Association des Américains accidentels). Dans cette décision, le juge de l'excès de pouvoir mobilise la notion « d'effet utile » pour justifier une nouvelle évolution de son office : la possibilité, pour le juge de l'excès de pouvoir, de statuer en se plaçant à la date de son jugement. Au-delà, cette volonté, expressément affirmée par le Conseil d'Etat de rendre des décisions dotées d'un « effet utile », se manifeste à travers d'autres récents arrêts tels que la jurisprudence Société Eden (CE, 21 déc. 2018, n° 409678, Société Eden) permettant au requérant de hiérarchiser ses prétentions à l'occasion de sa requête, mais également les arrêts Stassen (CE, 28 fév. 2020, n°433886, M. Stassen) et Elena (CE, Sect., 19 nov. 2021, Association des avocats Elena France et autre, nos 437141, 437142) accordant la possibilité au juge administratif d'apprécier de façon dite « dynamique » la légalité de l'acte qui lui est soumis en déplaçant son analyse le long d'un curseur temporel allant de la date de la décision à la date à laquelle il statue. Cependant, il convient de constater que si cette notion « d'effet utile » est également utilisée par d'autres juges tels que le Conseil Constitutionnel ou encore la Cour de justice de l'Union européenne, celle-ci ne revêt aucune définition en droit administratif français et semble être utilisée par le Conseil d'Etat dans une finalité toute autre. En effet, au-delà de présenter un intérêt pour l'issue du litige qui oppose les parties ou pour l'exécution des décisions, il y a lieu de relever, en adoptant un angle de vue plus finaliste, voire performatif, que l'objectif « d'effet utile » que s'assigne le juge administratif, constitue pour lui un argument, difficilement contestable, pour justifier des modifications prétoriennes de son office. Cela est un signal fort de la vitalité de la source jurisprudentielle en droit du contentieux administratif et témoigne de la volonté du Conseil d'Etat de garder la mainmise sur la détermination du régime applicable aux différents offices du juge administratif. Dans cette mesure, ''l'effet utile'' semble être un éléments primordial de la transformation à l'uvre du contentieux administratif et un nouveau prisme d'analyse de ce contentieux dont il convient de se saisir.