Etude des interactions entre cellules tumorales et cellules du microenvironnement pour la compréhension de l'écosystème tumoral du neuroblastome
Auteur / Autrice : | Eva Galateau |
Direction : | Isabelle Janoueix- lerosey |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Sciences du Cancer |
Date : | Inscription en doctorat le 30/09/2022 |
Etablissement(s) : | Université Paris sciences et lettres |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Cancérologie, Biologie, Médecine, Santé |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Cancer, Hétérogénéité, Instabilité et Plasticité |
Equipe de recherche : Diversité et Plasticité des tumeurs de l'enfant (DePiCT) | |
établissement opérateur d'inscription : Institut Curie (Paris ; 1978-....) |
Mots clés
Résumé
Le microenvironnement tumoral représente un élément clé de l'écosystème tumoral dont la complexité doit être comprise pour définir de nouvelles stratégies thérapeutiques, y compris des approches d'immunothérapie. Les avancées récentes dans le séquençage des ARNs au niveau de la cellule unique (scRNA-seq) permettent désormais de définir l'hétérogénéité des écosystèmes tumoraux, non seulement en termes de cellules tumorales mais aussi en termes de cellules immunitaires et stromales. Il a été démontré que les interactions hétérotypiques entre les cellules stromales, immunitaires et tumorales jouent un rôle important dans le maintien, la progression, les métastases et la réponse thérapeutique de la tumeur. Notre équipe a récemment généré des données transcriptomiques sur cellules uniques pour 10 neuroblastomes de 5 patients au diagnostic et 5 patients en rechute. Dans ces biopsies, nous avons obtenu le profil transcriptomique de plus de 20 000 cellules et identifié 6 types cellulaires principaux (cellules tumorales, cellules B et T, cellules myéloïdes, cellules endothéliales et fibroblastes). Nous avons également analysé 3 tumeurs de souris transgéniques TH-MYCN, qui représentent un modèle pertinent de neuroblastome dans un contexte immunocompétent. Nos résultats ont démontré que les tumeurs du neuroblastome des deux organismes ont un microenvironnement caractérisé par une immunosuppression incluant des lymphocytes T dysfonctionnels et une accumulation de cellules immunosuppressives (Costa et al, soumis). Ces travaux fournissent une base de données solide et originale pour mieux comprendre l'écosystème du neuroblastome et proposer de nouvelles stratégies thérapeutiques, ciblant à la fois les cellules tumorales et certains composants du microenvironnement. La stratégie suivante sera appliquée pour comprendre les communications entre les cellules cancéreuses et les cellules du microenvironnement et proposer de nouvelles stratégies thérapeutiques. Une analyse préliminaire à l'aide de l'outil CellPhoneDB (Efremova et al, 2020) qui infère les communications intercellulaires en mesurant l'expression des ligands et des récepteurs dans plusieurs types de cellules (à l'aide d'une base de données de 1396 interactions) a identifié 115 paires récepteur/ligand impliquées dans 444 interactions en considérant les six principales populations dans l'ensemble des données intégrées des 10 biopsies de patients. L'analyse des tumeurs individuelles sera nécessaire pour confirmer les interactions récepteur/ligand détectées dans l'ensemble des données intégrées. Des analyses plus fines seront également réalisées sur des populations définies plus précisément, en particulier pour les cellules myéloïdes pour lesquelles différents sous-populations ont désormais été caractérisées. L'expression des paires de récepteurs et de ligands sera également étudiée à l'aide d'outils plus récents et plus puissants tels que CellChat (Jin et al, 2021), CellCall (Yang Zhang et al, 2021) ou Connectome (Raredou et al, 2022). Certains de ces outils permettent de définir comment les ligands exprimés par une cellule émettrice peuvent induire des changements d'expression génique dans la cellule réceptrice, en identifiant les facteurs de transcription et les gènes cibles impliqués. Plusieurs classes d'interactions seront prises en compte dont les interactions définies entre différents types de cellules immunitaires ou stromales et les interactions définies entre des cellules immunitaires ou stromales et des cellules tumorales. La même approche sera appliquée sur les données obtenues pour le modèle de neuroblastome murin TH-MYCN et les résultats seront comparés entre les tumeurs des deux espèces. En parallèle, nous explorerons le microenvironnement tumoral d'une série de 15 modèles de neuroblastomes PDX pour lesquels des données transcriptomiques en cellules uniques sont disponibles au laboratoire. Ces modèles sont intéressants car ils présentent plus de diversité en termes d'altérations génétiques par rapport au modèle TH-MYCN, même s'ils sont obtenus chez des souris Nude déficientes en lymphocytes T. Dans ces modèles, les interactions seront explorées entre les cellules tumorales humaines et les cellules murines du microenvironnement. Selon les données de la littérature et la conservation potentielle entre les tumeurs humaines et les tumeurs de souris, les paires les plus pertinentes seront sélectionnées pour validation. Des expériences par immunohistochimies seront réalisées pour confirmer l'expression des molécules d'intérêt sur des échantillons FFPE de tumeurs murines ou humaines. Nous accorderons une attention particulière aux candidats qui pourraient être ciblés par des inhibiteurs permettant de neutraliser les cellules immunosuppressives ou perturber les interactions contribuant à l'environnement immunosuppresseur. Des tests fonctionnels seront effectués in vitro à l'aide de systèmes de co-culture, soit dans des conditions classiques 2D, soit dans des conditions 3D, en utilisant une approche Tumor-on-Chip (ToC), en collaboration avec Maria-Carla Parrini dans notre unité. Cette technologie, qui utilise des « puces » contenant des matrices d'hydrogels biomimétiques 3D associées à de la microfluidique, permet de reconstituer partiellement ex vivo la complexité du microenvironnement tumoral et la dynamique cellulaire impliquant plusieurs types de cellules (Nguyen et al, 2018 ; Parrini MC, 2020). Nous prévoyons de co-cultiver des cellules tumorales, des cellules myéloïdes et des lymphocytes T obtenus de nos modèles murins dans ces ToC et d'explorer l'effet de divers inhibiteurs ciblant des interactions spécifiques. Dans cette approche, le suivi de la mort des cellules tumorales est réalisé grâce à des traceurs spécifiques et à leur suivi par vidéomicroscopie. Le rôle d'interactions spécifiques récepteur/ligand pourra également être exploré en utilisant des stratégies de knockdown par si/shRNA des molécules d'intérêt dans les cellules de neuroblastome. Enfin, des expériences in vivo seront mises en place pour déterminer le rôle de certaines interactions et l'efficacité de différents inhibiteurs dans des modèles pré-cliniques relevants, souris TH-MYCN et PDXs. Par ailleurs, nous prévoyons d'utiliser l'anticorps monoclonal anti-GD2 qui induit un mécanisme appelé ADCC (antibody-dependent cell-mediated cytotoxicity) impliquant les cellules NK pour cibler les cellules tumorales. Le GD2 est une molécule lipidique glycosylée appartenant à la classe des glycosphingolipides qui est fortement exprimée à la surface cellulaire des cellules tumorales du neuroblastome. Il a été montré que le dinutuximab, un Ab monoclonal chimérique ciblant le GD2 améliore la survie des enfants atteints de neuroblastome à haut risque, qui ont répondu au traitement d'induction et de consolidation, lorsqu'il est combiné au GM-CSF et à l'IL2 (Yu et al, 2010). Nous avons déjà identifié un rationnel pour deux combinaisons qui devraient augmenter l'activité anti-tumorale NK induite par l'anticorps anti-GD2 et augmenter la prolifération et l'activité des lymphocytes T. Ces combinaisons impliqueront soit des petites molécules, soit des anticorps neutralisants en plus de l'anticorps anti-GD2. L'impact de l'anticorps anti-GD2 et/ou des combinaisons sur le microenvironnement tumoral sera évalué avec des modèles murins utilisant des expériences FACS et/ou RNA-seq sur cellule unique pour déterminer comment le traitement modifie le phénotype des cellules myéloïdes et T. Globalement, ce projet vise à comprendre les communications entre les cellules cancéreuses et les cellules du microenvironnement et comment divers signaux affectent les propriétés et l'identité des cellules réceptrices. Des analyses complémentaires basées sur la transcriptomique spatiale permettront de disséquer l'organisation complexe de la tumeur et de son microenvironnement. Ces analyses nous aideront à définir de nouvelles thérapies qui pourraient neutraliser le microenvironnement tumoral immunosuppresseur chez les patients atteints de neuroblastome.