Thèse en cours

Identification d'émotions positives chez le cheval

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Auteur / Autrice : Romane Phelipon
Direction : Léa Lansade
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Sciences de la Vie et de la Santé
Date : Inscription en doctorat le 15/11/2022
Etablissement(s) : Tours
Ecole(s) doctorale(s) : Santé, Sciences Biologiques et Chimie du Vivant - SSBCV
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : PRC - Physiologie de la Reproduction et des Comportements

Mots clés

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Résumé

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Le bien-être des chevaux dans le domaine équestre est une préoccupation croissante dans les pays occidentaux. Les acteurs professionnels de la filière souhaitent être transparent concernant le niveau de bien-être des chevaux de compétition de haut niveau. A défaut de savoir caractériser précisément ce qu'est un « Happy Athlete », il existe différents indicateurs de bien-être/mal-être chez le cheval dans son milieu de vie, mais également lorsqu'il est monté par un cavalier, même si ces derniers sont encore peu développés. Il faut noter qu'à l'heure actuelle ces indicateurs concernent très rarement le cheval de haut niveau et sont essentiellement focalisés sur les états de mal-être et d'inconfort au travail, plus que des états plus positifs de bien-être ou de confort. Concernant les indicateurs de bien être dans le milieu de vie du cheval, de nombreux travaux ont été réalisés et ont conduit à l'élaboration de plusieurs outils de mesure. On peut notamment citer le protocole proposé dans le cadre du programme européen AWIN (Animal Welfare Indicators, AWIN Horse, 2015) qui a permis d'aboutir en 2020 au protocole “Cheval Bien-être” issu d'une collaboration entre l'IFCE, l'INRAE et l'Université de Milan. Ce protocole inclut aussi bien des indicateurs dits « animal centrés » (des mesures prises sur l'animal lui-même), que des indicateurs relatifs à l'environnement. Parmi les mesures dites « animal-centré », on peut citer des mesures d'apathie, d'anxiété, de stéréotypies ou d'agressivité (Ruet et al. 2019) ainsi que des indicateurs de santé (boiteries, blessures). Concernant les mesures relatives à l'environnement, ils prennent en compte le type d'hébergement, d'alimentation ou encore la possibilité de contacts sociaux. Ces mesures sont issues d'une littérature scientifique abondante qui montre que les conditions d'hébergement des chevaux sont des facteurs essentiels à prendre en compte lorsque l'on aborde le sujet de bien-être équin (Sarrafchi & Blokhuis, 2013). Par exemple, un hébergement qui limite les déplacements cause une diminution de leur densité osseuse (Meakim et al., 1981) ainsi qu'une plus grande chance de développer des stéréotypies pour les chevaux qui sont en plus hébergés seuls (Cooper et al., 2000). De plus, les conditions d'hébergement inadaptés au regard des besoins de l'espèce peuvent amener à modifier le budget temps des chevaux lié à l'alimentation, le temps de déplacement et leur rythme circadien (Greening et al., 2021). Leur perception envers l'humain peut alors être altéré par, pouvant engendrer des comportement d'agressivité mais aussi d'apathie, d'hypervigilance et de stéréotypies (Heleski et al., 2002; Ribeiro et al., 2019; Ruet et al., 2019; Sarrafchi & Blokhuis, 2013; Werhan et al., 2012). Sur le cheval au travail, là aussi quelques études ont permis de définir des indicateurs qui sont de deux types. Tout d'abord, on peut répertorier les indicateurs dits « animal-centré » qui sont basés sur les comportements, postures, ou encore sur les expressions faciales du cheval monté. Certains travaux ont permis d'identifier quels comportements s'expriment en cas de douleurs physique, ce qui a permis de créer un répertoire comportemental du cheval en état d'inconfort ou de douleur. Ce répertoire est basé sur différents indicateurs comme la position des oreilles, l'ouverture des yeux, la démarche ou le rythme des allures (Dyson, 2021; Mullard et al., 2017). Ces répertoires ont pu être complétés par l'analyse des muscles faciaux, qui montrent chez le cheval une large gamme d'unités d'actions faciales possibles (Wathan et al., 2015) et qui permettent d'avoir une indication des états de douleur ou de fatigue, y compris chez le cheval au travail (Dyson, 2021; Mullard et al., 2017, Trindade et al. 2020). Le second type concerne les indicateurs liés aux conditions de travail des chevaux (harnachements, méthode d'entrainement …). Enfin, des travaux scientifiques ont permis de faire le lien entre évaluation du bien-être/mal-être du cheval dans son milieu de vie et lorsque le cheval est au travail. Ils montrent que les chevaux qui expriment les quatre principaux états de mal-être du cheval dans son box (stéréotypies, hypervigilance, apathie, agressivité) sont associés à des indicateurs d'états affectifs négatifs pendant l'équitation, qui se traduisent par des modifications du comportement et de la locomotion (Ruet et al., 2020). Cela laisse supposer une certaine interdépendance entre état de mal-être dans l'environnement de vie et comportements au travail, mais qui reste encore à explorer. On peut également noter que les indicateurs que l'on retrouve dans la littérature scientifique, sont donc presque exclusivement des indicateurs de mal-être du cheval, à défaut d'avoir trouvé des indicateurs de bien-être. Mais peut-on parler du bien-être animal en se contentant d'une absence de mal-être ? Si quelques pistes comme les comportements d'ébrouements (Stomp et al., 2018) ou le niveau d'ocytocine (Lansade et al., 2018) ont été abordés chez le cheval au repos, ce sujet de recherche reste peu fourni, notamment chez le cheval monté à haut niveau. Le premier objectif sera de recueillir l'avis des acteurs du haut niveau sur ce qu'est un ‘Happy Athlete' et plus précisément comment ils évaluent qu'un cheval est dans un état de confort lorsqu'il est monté en compétition. Le but est de déterminer s'il y a consensus entre eux ou non, et comprendre sur quels observables ils se basent pour le déterminer. Pour répondre à ce premier objectif, nous interrogerons différentes catégories de personnes : cavaliers de haut niveau, directeurs techniques, entraineurs, juges des compétitions, vétérinaires, public ainsi que des scientifiques internationaux spécialisés dans l'analyse du comportement et du bien-être. Ainsi, nous pourrons déterminer s'il y a consensus au sein de chacune de ces catégories de personnes, mais aussi entre ces catégories. Pour cela, nous les interrogerons sur ce qu'est pour eux un « Happy Athlete » à l'aide d'un questionnaire fermé qui sera développé en début de projet. Puis nous leur ferons visionner via une plateforme dédiée et créée spécifiquement pour le projet, une série d'images identiques de chevaux au travail afin de leur demander de les classer les unes par rapport aux autres sur un axe de confort > inconfort. Le second objectif consistera à déterminer si ce que le cheval montre en piste (ses attitudes, postures, comportements) reflète son état de bien-être dans son environnement de tous les jours (évaluation de son bien-être dans son milieu de vie habituel). Pour cela, nous ferons trois types de mesures sur les chevaux. Le premier consistera à observer le comportement des chevaux en piste lors des compétitions, en se basant sur les indicateurs d'inconfort existant (Dyson et al. ). Le second sera de faire ce même type de mesure lors de séances d'entrainement. Et le troisième type de mesures sera d'évaluer le bien-être des chevaux dans leur milieu de vie en nous basant sur le protocole cheval bien-être ainsi que sur des mesures de budget-temps. Cette dernière évaluation mêle des indicateurs de type ‘animal-centré' et aussi des indicateurs basés sur l'environnement (ex. quantité de fourrage, temps passé en liberté). L'objectif sera alors de croiser les indicateurs mesurés sur le cheval en compétition, avec ceux mesurés lors de l'entrainement et dans le milieu de vie afin de déterminer s'il y a des relations (ex. un cheval qui montre très peu de signes d'inconfort en piste est-il un cheval qui montre peu/pas de comportements anormaux dans son écurie (stéréotypies, apathie ….) ou dont les besoins sont les mieux respectés ?). En d'autres termes, est-ce que l'on peut considérer qu'un cheval est un « happy-athlete » dans l'ensemble de sa vie (dans son écurie, à l'entrainement …), simplement en le regardant lors des compétitions, et vice-versa ? Cette série d'observations en compétition, à l'entrainement et dans les écuries nous permettra également de faire un état des lieux du bien-être des chevaux de haut-niveau, en rentrant au cœur des pratiques afin de comprendre les particularités du mode de vie et d'entrainement de ces chevaux. Enfin ce travail nous permettra de constituer une collection importante de films de chevaux de haut niveau en compétition et à l'entrainement, ce qui nous servira de base de travail pour rechercher de nouveaux indicateurs de bien-être, spécifique au cheval monté (indicateurs basés notamment sur les postures, la locomotion et les expressions faciales) qu icomposera l'axe du troisième objectif.