Les parfums du corps en France entre 1350 et 1500
Auteur / Autrice : | Élodie Pierrard |
Direction : | Bruno Laurioux |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Histoire |
Date : | Inscription en doctorat le 20/09/2022 |
Etablissement(s) : | Tours |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Humanités et Langues (Centre-Val de Loire ; 2018-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre d'études supérieures de la Renaissance (Tours ; 1956-....) |
Mots clés
Résumé
La thèse consacrée aux parfums du corps en France entre 1350 et 1500 couvre les deux derniers siècles du Moyen Âge. Ce sujet mêle l'histoire des techniques et l'histoire culturelle, celle du corps, de la perception et des sens. Il concerne tous les produits odorants permettant de parfumer le corps, depuis les parfums liquides jusqu'aux substances parfumant les vêtements, en passant par les objets odorants portés sur le corps ou encore les cosmétiques parfumés. L'environnement olfactif des sociétés passées fait actuellement l'objet d'un intérêt à la fois académique et tourné vers la médiation vers le grand public, par exemple avec le projet européen « Odeuropa ». Malgré cet intérêt renouvelé, peu de travaux ont abordé les parfums liés au corps, en particulier durant la fin du Moyen Âge. Dans les années 1980-1990, des travaux historiques ont pourtant démontré leur importance, notamment Le miasme et la jonquille d'Alain Corbin, consacré à l'interaction entre l'odorat et l'imaginaire social de la fin de l'époque moderne à la période contemporaine. Il montrait que les parfums étaient alors au coeur des grands bouleversements entourant le rapport au corps. Concernant le Moyen Âge, Jean-Pierre Albert a abordé le sens symbolique des aromates dans la culture chrétienne en se basant sur l'étude du chrême. Des travaux ont traité plus récemment les parfums du XVIIe siècle jusqu'à l'époque contemporaine, mais pour l'époque médiévale, nous avons peu d'études, et elles restent ponctuelles et dispersées. L'étude des parfums du corps dans l'espace français des XIVe et XVe siècles constitue donc un angle mort de la recherche. Les deux derniers siècles du Moyen Âge marquèrent une période de profonds bouleversements sociaux, politiques et économiques, entraînant un changement du rapport au corps dans un contexte culturel bouleversé. Le XIVe siècle fut notamment marqué par la peste noire. Les bains et les étuves étaient alors prohibés car ils étaient réputés ouvrir les pores de la peau et laisser ainsi entrer les maladies. L'étude des parfums du corps dans le cadre cette période charnière permettra de combler le manque historiographique que laisse l'absence de travaux approfondis sur les parfums à la fin du Moyen Âge. Plusieurs questionnements guideront les recherches relatives à cette thèse. Quelles pouvaient être la place et la signification des parfums ? La fin du Moyen Âge a-t-elle posé les bases à la fois techniques et culturelles de leur usage ? Quel fut le rôle des parfums dans les changements des cultures du corps ? L'étude sera structurée autour de trois grands axes de recherche : l'aspect technique avec la fabrication et la consommation des parfums, les usages thérapeutiques, l'utilisation comme parure du corps. Je replacerai également les parfums dans leur environnement mental en examinant la façon dont l'odorat était perçu à l'époque, notamment grâce aux traités médicaux. J'étudierai les ingrédients qui composaient les parfums, leur provenance, leur fabrication et leur distribution. En plus de retracer les composants et la réalité concrète des parfums, cette analyse montrera l'importance qu'ils occupaient dans le commerce et l'artisanat. J'aborderai ensuite les implications thérapeutiques des parfums, en particulier pour explorer le lien entre maladie et parfum, notamment à travers le prisme du traitement de la peste noire. Je me pencherai également sur leur usage « profane », en examinant le rôle des odeurs corporelles dans les perceptions sociales, ainsi que le rapport des parfums avec l'art de la parure et la séduction du corps (l'ajout de poudres aromatiques dans les teintures pour cheveux de Guy de Chauliac, les 2 conseils de lavage des vêtements de Mondeville, le lien qui existait entre odeur et sexualité dans les discours .). Pour poser les jalons de ce sujet neuf, je multiplierai les approches et les sources. J'utiliserai notamment un manuscrit de la fin du XVe siècle conservé aux archives départementales de la Sarthe. Ce document a fait l'objet d'une édition critique littéraire par Florence Dufournier, mais il n'a pas été étudié sous l'optique du parfum. Il contient cependant des recettes de vins et de confitures mais aussi d'autres préparations, pour confectionner par exemple des parfums, des eaux parfumées, des pommes de senteur, des savons ou encore des poudres odorantes pour parfumer le linge. Je me baserai également sur les recueils de métiers, en particulier Les métiers et corporations de la ville de Paris et le recueil des Ordonnances des rois de France de la 3e race, afin de rechercher des textes relatifs à des métiers liés aux parfums, par exemple les apothicaires. Mon corpus s'enrichira d'inventaires après décès. Je prendrai pour point de départ les actes notariés et je commencerai par utiliser la base de données RENUMAR, développée par le CESR et regroupant des actes d'archives des XIVe, XVe et XVIe siècles issus du fonds des notaires de Tours et des archives départementales d'Indre-et-Loire. Je chercherai aussi des recueils du XVe siècle de type livres de secrets et des manuels de commerce pour mettre en exergue des produits du grand commerce international relevant la parfumerie. Lors de la première année de mon doctorat, je constituerai, dépouillerai et transcrirai mon corpus de sources. Je consacrerai la deuxième année à l'analyse, à l'interprétation et au croisement des sources, et j'effectuerai la rédaction de la thèse durant la troisième année.