Thèse en cours

Les représentations de la violence antique dans les séries télévisées

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Nicolas Ben mustapha
Direction : Antonio Gonzales
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Histoire
Date : Inscription en doctorat le 10/11/2021
Etablissement(s) : Bourgogne Franche-Comté
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sociétés, Espaces, Pratiques, Temps (Dijon ; Besançon ; 2017-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut des Sciences et Techniques de l'Antiquité
établissement de préparation : Université de Franche-Comté (1971-....)

Mots clés

FR  |  
EN

Résumé

FR  |  
EN

Ce travail de recherche se trouve au carrefour de nombreuses disciplines scientifiques et au croisement des études historiques, sociologiques et médiatiques. S'il est question premièrement d'histoire culturelle, il s'agira également d'étudier l'histoire militaire, ainsi que l'histoire des médias de masse, l'histoire des représentations culturelles, et ce sans négliger les apports de nombreuses disciplines connexes comme la sémiotique visuelle. Cette pluridisciplinarité permettra de nouvelles approches liées à l'histoire culturelle. Notre problématique s'articulera autour de la question de la réception de l'Antiquité dans la culture populaire des années 1980 à nos jours et plus spécialement sur les mondes dits virtuels et l'influence de ses représentations au sein des communautés en ligne (forums et sites dédiés aux univers de fictions, notamment des jeux vidéo). Nous tenterons de répondre aux interrogations suivantes : Comment sont représentées les traditions de violence de l'Antiquité, dans la culture populaire actuelle et quelles en sont les sources d'inspiration ? Cette Antiquité fictive et virtuelle représente-elle une nouvelle référence pour les générations actuelles ? Les écrans et plus exactement les jeux vidéo inspirés de l'Antiquité rendent-ils le public français plus violents ? Enfin, quels schémas historiques se dégagent des relations virtuelles tissées par les communautés de fan de ces mondes fictifs ? Ce sont, pour certaines, des questions sensibles dont on débat déjà depuis la naissance des médias de masse qui sont au cœur de notre étude, tandis que d'autres nous donnent l'occasion d'éclairer un aspect nouveau de la recherche en science humaine et sociale. La réflexion et la thématique peuvent être porteuses de par l'influence de nos représentations culturelles au sein de notre imaginaire collectif, comme en témoigne le succès grandissant des productions télévisuelles à l'exemple du show télévisé Game of Throne (rappelons qu'une nouvelle série télévisée, abordant le même univers imaginaire, ainsi que plusieurs films sont en cours de production). Les écrans et les loisirs récréatifs, ainsi que les représentations qui en découlent, sont des enjeux de taille pour notre société actuelle : ils transmettent au public des normes, des valeurs et des attitudes. Ils véhiculent aussi parfois de nombreux stéréotypes et clichés pourtant très anciens. La manipulation de l'histoire par les représentations culturelles populaires offre-t-elle de nouveaux référents culturels ? Quels en sont les tenants et aboutissants ? L'explosion de la pratique des jeux vidéo est un fait social dont l'importance est aujourd'hui attestée comme le soulignèrent il y a déjà presque vingt ans, Michel Nachez et Patrick Schmoll1. Ainsi, les chiffres des ventes de consoles et de logiciels de jeux en attestent, lesquels représentent des dizaines de millions d'exemplaires et des centaines de millions de consoles vendus dans le monde chaque année. En France, en 2020, ce sont 2,3 millions de consoles et 27,5 millions de jeux vidéo qui furent vendus. Il s'agit là d'un véritable phénomène de société qui fait encore peu l'objet d'études en sciences humaines et sociales, alors même qu'il prend aujourd'hui une dimension nouvelle et totale. D'une part, il transcende les générations, et d'autre part, parce qu'il offre désormais au collectif des joueurs de pouvoir se rencontrer dans l'espace du jeu, car de très nombreux titres proposent une option de jeu en réseau, et une possibilité de connexion en ligne qui permet de jouer avec d'autres gamers (joueurs) venus du monde entier. De véritables réseaux se mettent en place, et ceux-ci ont déjà fait l'objet de quelques études scientifiques, notamment dans le monde anglo-saxon. On s'interrogera sur les influences de certains jeux en particulier, en raison de leurs thèmes violents. Un second aspect nous frappe : la socialisation virtuelle via la constitution d'un « tissu social » virtuel, in game (en jeu). Les joueurs s'allient au sein de « tribus guerrières », de « clans », de « guildes » liées par la volonté commune d'arriver au but (qu'il soit guerrier, militaire, politique ou idéologique) et par la conviction affichée d'appartenir à un groupe donné. Cette identité inventée agglomère de nombreux éléments culturels et nombre de représentations et où se condensent de nombreuses traditions violentes liées aux formes de la guerre et aux coutumes guerrières notamment celles de l'Antiquité. Nous émettons le postulat que la nature des représentations culturelles historiques des dernières décennies, principalement dans le monde du jeu vidéo, et qui font référence directement ou indirectement à l'Antiquité grecque et romaine induisent des formes de violences au sein du public, et participe à la création d'un imaginaire culturel propre à féconder de nouvelles traditions de violence (réseaux in game, réseaux en ligne, comportements violents en jeu et extériorisé). Les représentations antiques seraient aussi à l'origine de la création de nouveaux « réseaux sociaux » que nous rapprochons du compagnonnage guerrier historique. Aussi, comme dans les mondes grec et romain, la violence ici joue un rôle décisif dans l'établissement de règles sociales (forum, communauté virtuelles en dehors des jeux, et in game). Ces nombreux titres sont en général très orientés autour de la question militaire, or la violence est aussi souveraine des actions guerrières des hommes. Les reconstitutions faites par la l'archéologie renforcent-t-elles la réception qui est faite de l'Antiquité à notre époque ? Cette tradition qui vient de l'Antiquité traduit-elle la réalité ? La fiction influence-t-elle la lecture scientifique ? Il sera donc question d'étudier les formes que prennent ces traditions de violence physiques, psychologiques, symboliques, etc. Enfin, nous souhaiterions apporter un éclairage sur une tendance possible au sein du public, à savoir, cette faculté à rendre subversives des valeurs jugées négatives (identification au Barbare par exemple) par le biais de cette seconde identité que se donne les individus en ligne par le biais de ces communautés virtuelles. Ce sera l'occasion pour nous d'étudier la figure du « barbare » dans les mondes virtuels sans perdre de vu notre questionnement axé sur le sujet de la violence dans l'Antiquité. Les clichés et stéréotypes antiques qui désignent l'Autre (l'étranger, le barbare), étaient fondamentalement négatifs en Grèce et à Rome. C'est l'une des forces des communautés virtuelles : on s'accepte soi, on s'identifie à un groupe mais on affronte d'autres êtres et groupes. Notons que la tradition culturelle populaire des dernières décennies accentue déjà fortement l'image dorée de l'Autre, à travers le prisme du « barbare », et pour ne citer que certains jeux-vidéos : Conan : Hall of Volta (1984) ; Gauntlet (1985); Barbarian (1987), Golden Axe (1989), Sword of Sodan (1989), la saga God of War (depuis 2005), Diablo II (2000), Age of Conan (2008) etc. Aussi, il serait indispensable de croiser notre approche avec les études récentes dans le domaine de la sociologie de la culture (A. Mouchtouris, La violence est-elle irréfutable ? Phénoménologie d'un traitement d'une conduite sociale, 2019) et de la psychologie sociale et cognitive (B. J. Bushman, L. R. Huesmann, Effects of televised violence on aggression, 2001).