Mieux comprendre et prédire la composition des communautés d'espèces communes et leur distribution spatiale : réponses complexes à l'environnement et associations d'espèces
Auteur / Autrice : | Clément Valle |
Direction : | Frédéric Jiguet |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Sciences de la conservation |
Date : | Inscription en doctorat le 01/10/2020 Soutenance le 16/01/2024 |
Etablissement(s) : | Paris, Muséum national d'histoire naturelle |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences de la nature et de l'Homme - Évolution et écologie (Paris ; 1995-....) |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
Dans le contexte de déclin de la biodiversité, mieux comprendre et prédire la distribution spatiale des espèces et la composition de leurs communautés est un défi majeur pour mesurer l'état de la biodiversité, anticiper ses trajectoires et guider les mesures de conservation. L'enjeu est de caractériser finement les niches écologiques des espèces se décomposant en une dimension abiotique (leurs réponses à l'environnement abiotique) et biotique (leurs interactions). De nombreux programmes de conservation s'appliquant à de larges étendues spatiales, il est important de les décrire à une échelle macroécologique. Bien que l'importance théorique de ces facteurs abiotiques et biotiques soit reconnue, mieux comprendre et prédire leur impact sur les distributions spatiales des espèces à travers de vastes étendues couvrant divers gradients environnementaux reste un défi conceptuel et technique. S'agissant de réponses complexes à des facteurs environnementaux différents mais liés, potentiellement en interaction, l'enjeu est de i) mieux comprendre et décrire leur complexité, en interrogeant notamment leur linéarité, et ii) distinguer l'influence relative des facteurs abiotiques et biotiques dans ces réponses. Dans cette thèse, l'étude de ces mécanismes sous-jacents de la niche écologique des espèces repose sur l'analyse de corrélations statistiques entre données empiriques, avec des modèles statistiques de distribution de niche (SDMs). Les trois jeux de données mobilisés proviennent de suivis de communautés d'espèces communes (oiseaux, chauve-souris et chiroptères, arbres et plantes de la strate herbacée), à l'échelle de la France métropolitaine (de plusieurs centaines à milliers de sites pour chaque taxon). Premièrement, nous avons analysé la réponse complexe de ces trois premiers taxons à certaines composantes abiotiques de leurs habitats en étudiant l'effet de petits éléments boisés dans les paysages agricoles. Nos résultats décrivent la réponse complexe, non-linéaire et modulée par le contexte paysager, de la biodiversité agricole à ces éléments paysagers. Ceci nous permet de formuler des recommandations génériques de planification spatiale en conservation de la biodiversité en milieu agricole, éclairant la décision publique à un moment crucial à l'échelle européenne (PAC 2023-2027, Stratégie Biodiversité Européenne 2030,...). Deuxièmement, nous avons étudié la capacité d'inférer des interactions biotiques (de type compétition), à partir de données de co-abondance à fine résolution des communautés d'oiseaux communs, en utilisant des modèles de distribution jointes d'espèces (jSDM). Ces associations d'espèces inférées par nos modèles différaient des attentes théoriques en termes d'interactions biotiques, validant ainsi les critiques antérieures de la littérature sur ces modèles. Cependant, nous avons démontré que ces associations pouvaient capturer une information précieuse sur des facteurs environnementaux, non décrits et difficilement mesurables in situ, influençant la distribution des espèces. Cette information permet d'établir des prédictions conditionnelles (i.e., prédire la distribution spatiale de l'abondance/occurrence d'une espèce en fonction de celle connue d'une/d'autres espèces). Pour illustrer leur pertinence à large échelle, nous avons montré l'importance de l'identité des arbres de la canopée dans l'explication et la prédiction spatiale de la distribution des espèces de la strate herbacée. Cet exemple met en lumière l'importance de ce lien inter-strate et constitue un cas d'application empirique rare de ces prédictions conditionnelles. Cette thèse a ainsi permis de franchir une étape importante pour l'intégration des associations d'espèces dans les modèles de distribution de niche, à une échelle macroécologique. Elle contribue aussi à la réflexion sur la complexité croissante des différents SDMs et la nécessité d'en comparer les avantages respectifs pour la compréhension ou la prédiction de ces communautés.