Haïti et la CARICOM : essais sur les limites et le potentiel de l'intégration économique
Auteur / Autrice : | Jean Sergo Almonord |
Direction : | Étienne Billette de Villemeur, Alrich Nicolas |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences économiques |
Date : | Soutenance le 27/06/2024 |
Etablissement(s) : | Université de Lille (2022-....) en cotutelle avec Université d'État d'Haïti |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences économiques, sociales, de l'aménagement et du management (Lille ; 1992-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : LEM - Lille Économie Management |
Jury : | Président / Présidente : Hélène Maisonnave |
Rapporteur / Rapporteuse : Hélène Maisonnave, Jovis Wolfe Bellot |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Après une ample introduction sur Haïti et la CARICOM, cette thèse regroupe trois essais d'économie internationale pour éclairer les problématiques et le potentiel du pays et de la région.Le premier essai est une discussion critique de la théorie classique de David Ricardo sur l'avantage comparatif, examinant le rôle des différences de revenu sur le commerce international. En s'affranchissant de l'hypothèse restrictive généralement adoptée de « préférences homothétiques » selon laquelle les ménages consacrent une fraction constante de leur revenu à l'achat de chaque bien ou service qu'ils consomment, le rôle de la demande (et donc la distribution des revenus) pour expliquer le flux des échanges est réaffirmé. Un modèle simple démontre qu'un pays pauvre peut être exclu des échanges malgré ses avantages comparatifs, même en l'absence de barrières commerciales telles que les droits de douane ou les coûts de transport.Les pays encore dominés par l'agriculture de subsistance tendent à avoir un faible taux d'ouverture, car l'essentiel de leur production est consommé localement et les biens de consommation produits à l'étranger leur restent inaccessibles. En revanche, les pays spécialisés dans les services touristiques ont tendance à avoir un taux d'ouverture élevé, car ils exportent l'ensemble de ces services qui servent à financer l'importation d'une grande partie de leur alimentation et des biens de consommation, qui ne sont pas produits sur place. En somme, indépendamment de leur taille, le niveau d'ouverture économique des pays à bas revenus dépend largement de leur spécialisation.Une autre implication cruciale du modèle est que seuls les pays les plus riches peuvent vraiment profiter des avantages du commerce international. Le commerce apparait comme un moteur de divergence plutôt que de convergence, car il tend, dans certains cas du moins, à accentuer les inégalités entre les nations. Certains pays profitent de la croissance mondiale alors que d'autres, bien qu'étant proches géographiquement, semblent s'en éloigner irrémédiablement.Le deuxième essai souligne les vulnérabilités découlant de la spécialisation touristique de nombreux pays des Caraïbes. Bien que cette spécialisation leur ait permis de bénéficier de la croissance des pays riches, elle les expose également à tous les chocs susceptibles d'affecter ce secteur. La pandémie de Covid-19 a tragiquement révélé cette fragilité, comme en témoigne la chute du PIB clairement reliée à l'importance du tourisme dans chacun de ces pays. Les économies caribéennes ont été directement impactées par les restrictions de voyage imposées par les pays d'origine des touristes, sans avoir leur mot à dire. Ainsi, en plus de la fragilité intrinsèquement liée à la spécialisation, ces pays se sont retrouvés en grande partie privés de leur souveraineté en matière de politique économique, ce qui est particulièrement problématique quand il y a divergence d'intérêt.Le troisième essai explore une avenue potentielle pour le développement d'Haïti. Malgré les intentions affichées de la CARICOM, les échanges commerciaux au sein de la communauté restent très limités et les bénéfices attendus des accords de Chaguaramas tardent à se concrétiser. Les pays des Caraïbes présentent peu de complémentarités et pourraient n'être que des destinations touristiques concurrentes sans liens entre elles, s'ils ne bénéficiaient pas de l'effet d'appartenance à la communauté Caraïbéenne qui les rend visibles au niveau international.Nous soutenons que l'artisanat haïtien pourrait enrichir l'industrie touristique de la région. Haïti possède un avantage comparatif évident dans ce domaine en raison de sa main-d'œuvre abondante par rapport aux autres pays de la région. Il pourrait donc tirer parti des retombées de l'industrie touristique prospère de ses voisins, alors que ces derniers ont tout intérêt à favoriser un tourisme plus culturel, à la fois plus rentable et plus durable que le tourisme de masse.