Thèse en cours

Figures du Double dans la littérature grecque du XXème siècle : La représentation de l'inquiétante étrangeté et la structure convulsive du discours.

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Auteur / Autrice : Anna Alexopoulou
Direction : Constantin Bobas
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Langues et littératures arabes, chinoises, japonaises, hébraique, d'autres domaines linguistiques
Date : Inscription en doctorat le 23/12/2016
Etablissement(s) : Université de Lille (2022-....)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de l'homme et de la société (Lille ; 2006-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre d'Etudes en Civilisations, Langues et Lettres Etrangeres

Résumé

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La thèse est centrée sur l'étude du thème du double dans la littérature grecque. Dans le sillage du modernisme, le double réapparait sous un aspect assez différent, avec le sens psychanalytique du clivage du Moi au travers d'une perception perturbée de la réalité qui s'exprime soit au niveau de phénomènes de xénopathie sous forme d'hallucinations et du sentiment de l'inquiétante étrangeté, soit sous forme du délire paranoïaque de persécution. Cette évolution ne reflète pas seulement un changement fondamental concernant la conception de l'homme, mais aussi une rupture poétique qui se traduit par l'émergence de formes hybrides dans la structure du récit. Le moi est confronté à son propre moi morcelé, et son reflet absolu constitue son langage. La chaîne signifiante du double se brise progressivement jusqu'à son apogée au XXe siècle, où l'éclatement du ''je'' et de son langage s'annonce à infini. La poétique du double met en évidence l'indétermination du sens et l'anéantissement du sujet, non seulement sur le plan de la représentation du double, mais aussi sur le plan langagier, car le double affecte le langage des personnages. Le discours du héros est fragmenté et impersonnel, le double est plus tangible et impersonnel. Au XXe siècle la dissolution du moi se réalise dans une duplication au niveau du langage et pas seulement au niveau de la représentation. Nous serons amenés à nous interroger sur une problématique de l'identité parasitée par des phénomènes d'altération, ce qui devra nous conduire vers un approfondissement linguistique et psychanalytique de la notion du double. Il est remarquable que la mise en fiction du double soit orchestrée comme une polyphonie discordante au sein de laquelle différentes voix émergent et évoluent de manière paradoxale à l'intérieur de la conscience décomposée des protagonistes. Les dialogues intérieurs sont structurés d'une façon qui exprime soit la conscience clivée envahie par un discours dialogique (M. Bakhtine), soit le dialogisme polyphonique qui s'instaure dans le texte à travers le discours du narrateur et le discours des personnages. Les conflits intérieurs évoluent dans une ambiance d'inquiétante étrangeté et de peur. Le sujet s'y perd dans des questions obsédantes et répétitives sans arriver à les reformuler à les inscrire dans un véritable dialogue. Le discours tend à se clôturer sur lui-même et à s'autoalimenter sur un mode autoréférentiel sous l'effet d'exclusion de tout circuit intersubjectif. De plus, on met en évidence la structure langagière du délire selon J.Lacan, dans la mesure où dans la folie, le personnage au lieu d'habiter le langage, est habité par celui-ci, et à la place du sujet parlant s'installe un « sujet parlé ». Dans cette perspective, le discours des héros se caractérise par une profonde perturbation aux effets extrêmement cruels et douloureux, témoignant d' «un désordre provoqué au point le plus intime du sentiment de la vie chez le sujet». Dans de telles situations, ce mode d'intériorisation du langage tend à vider le discours de toute signification vivante et rationnelle et condamne son développement à une stagnation qui résiste à toute relance dialectique dans les situations où la juste perception de réalité devient un enjeu crucial pour les protagonistes. L'usage d'outils conceptuels engagés par la psychanalyse dans le déchiffrage de la structure du discours, nous permettra de mettre en évidence la structure convulsive du discours tenu par les héros et ses doubles. Souvent le discours se réduit, spécialement lors de moments de pure xénopathie, à du non-sens : le sens reste suspendu et inachevé, dès lors que le sujet, se trouve dans l'impossibilité de se représenter dans l'espace du discours par sa propre parole.