Thèse en cours

La France et les ‘Autres' : les voix d'ailleurs dans les airs de cour (1570-1650)
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Auteur / Autrice : Ana beatriz Mujica lafuente
Direction : Philippe CanguilhemEmily Wilbourne
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Musique
Date : Inscription en doctorat le 14/02/2022
Etablissement(s) : Tours en cotutelle avec City University of New York
Ecole(s) doctorale(s) : Humanités et Langues - H&L
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre d'études supérieures de la Renaissance (Tours ; 1956-....)

Résumé

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En France, le tournant du dix-septième siècle fut une époque de développement des idéaux de francité et de nation. Or, les cultures et musiques étrangères étaient paradoxalement en vogue. Dans cette thèse, j'analyse comment une idée de francité est définie en tandem avec la construction des « autres », du non-français. J'étudie principalement les airs en langues étrangères publiées dans les livres d'airs de cour (1570-1650), genre considéré français par excellence. Ces recueils contiennent, entre autres, des airs en italien, espagnol, turc, suisse, et dans des langues régionales françaises, ainsi que des airs multilingues. L'air de cour incarne les valeurs, les goûts, et les idéaux de la cour. Si ce genre représente un imaginaire de la francité, les airs en langues étrangères en tant que groupe mettent en lumière le contraste entre ce qui est considéré français et ce qui ne l'est pas ; l'altérité est soulignée par la langue, mais aussi par la logique organisatrice des livres d'airs, les mécanismes de représentation de l'autre et le style musical. L'objectif de cette thèse est d'analyser les différents mécanismes de représentation de l'altérité en musique et comment ils ont contribué à façonner un idéal de francité à l'intérieur et à l'extérieur de la cour. Je soutiens que plusieurs types de caractérisations et de représentations de l'autre coexistaient. Ils marquaient l'altérité en même temps qu'ils exposaient la familiarité avec elle, car souvent ces « autres » représentés faisaient partie de la société française. L'autre n'est pas une catégorie abstraite englobante ; il y avait plusieurs autres contre lesquels la francité se délimitait. Je montre que de nombreuses définitions de la francité coexistaient, s'inspirant et se contestant l'une l'autre. Bien que les notions de francité aient été définies en opposition aux instances d'altérité, ces « autres » ont également infiltré les airs en français à travers des contrafacta, l'utilisation de tropes musicaux et littéraires, l'imitation stylistique et les contextes d'exécution : la francité et l'altérité ne sont pas des entités indépendantes. Cette thèse nuancera notre compréhension du rôle du langage, de la musique et du son dans les représentations de soi et de l'autre, et en particulier dans la délimitation des idées de francité à l'époque prémoderne.