Thèse en cours

Milice et milicien(ne)s dans la France en guerre (1943-1953)

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Auteur / Autrice : Rémy Handourtzel
Direction : Olivier Wieviorka
Type : Projet de thèse
Discipline(s) : Sciences Sociales
Date : Inscription en doctorat le 31/08/2021
Etablissement(s) : université Paris-Saclay
Ecole(s) doctorale(s) : Sciences Sociales et Humanités
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut des sciences sociales du politique (Nanterre ; Cachan, Val-de-Marne)
Référent : Ecole Normale Supérieure Paris-Saclay

Mots clés

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Résumé

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Née le 5 janvier 1943 et publiquement lancée, en un geste signifiant, le 30 janvier suivant sous la férule du baroudeur Joseph Darnand, la Milice prend communément le visage de la barbarie à la française, productrice des extorsions et du pillage, de la torture systémique, des exécutions sommaires - voire du massacre des ennemis désignés du régime de Vichy. Elle incarne, en large part à juste titre, l'instrument politico-militaire le plus violent que l'État français ait mis au service de l'occupant nazi, accompagnant a volo sa radicalisation et sa destructivité au cours des deux dernières années de la guerre. Cependant, la Milice comme organisation n'a curieusement jamais fait l'objet d'un processus complet de recherche scientifique, au moins dans le cadre d'une thèse de doctorat d'histoire politique. Il est donc légitime qu'un travail de recherche, si possible exhaustif, soit enfin mené sur la Milice, conçue tout à la fois comme « garde prétorienne » du régime, force para-étatique supplétive d'une oppression allemande acceptée comme gage de virilisation sans retour de la société française et enfin comme matrice du parti unique de l'État français – ce serpent de mer de la Collaboration. A cette organisation hybride est donc dévolue la mission de consacrer les milicien(ne)s comme soldats politiques d'une Révolution nationale finalement destinée à la vassalisation de la France dans une Europe continentalisée par l'Allemagne nazie. La recherche tentera donc de mettre la loupe sur le versant organisationnel et sociétal des choses, sur la ''Weltanschauung'' et le projet idéologique de la Milice, sur l'instrumentalisation allemande (et marginalement italienne), sur les couplages chronologiques Milice-STO-Débarquements, sur la perception de la Milice par la population, les réfractaires, les résistants et les Français libres, sur l'action sociale de la Milice, sur les relations avec les différents services de police et de gendarmerie, sur les circulations de militants entre Milice, partis et engagements collaborationnistes concurrents/partenaires, tels la LVF, les Waffen SS, la Main bleue franciste, les GAJS, le MNAT, la « Bezen » Perrot, la Brigade nord-africaine, l'OT et autres services allemands tels l'Abwehr, la 8è Cie « Brandebourg » ou le SD, sur les clivages fonctionnels (politiques/militaires/policiers), géographiques (entre les zones), « générationnels » (entre les révolutionnaires de 1943 et les déclassés de 1944, pour simplifier) et éventuellement genrés (à propos des miliciennes), sur le soutien d'intellectuels en vue à l'entreprise milicienne, sur le charisme radiophonique de Philippe Henriot, sur la violence réactionnelle d'une épuration spontanée ciblant souvent d'abord - et pour cause - les miliciens ou encore d'autres collaborationnistes confondus avec les milicien(n)s. Sur cette lancée, les exactions et la torture devront faire l'objet d'une tentative d'étude de psychologie sociale et en tout cas puiser dans la boîte à outils des sciences sociales les indispensables compléments d'analyse anthropologique. Après tout, soldats politiques de la Révolution nationale, les miliciens ne font-ils pas aussi fonction, parmi d'autres groupes (Gestapo françaises ou « georgienne », Hauskapelle girondine et autres polices parallèles) d'auxiliaires de chasse pour la Sipo-SD ? Enfin, la question de la nazification (ou du désir de nazification chez une minorité de miliciens) - et non plus seulement de la fascisation – méritera d'être posée, Darnand (après avoir en quelque sorte absorbé/neutralisé Déat), rivalisant avec Doriot et le PPF dans une ultime surenchère de radicalisation et de séduction de l'appareil SS. Enfin, les procès d'épuration impliquant miliciens et miliciennes - à conduire si possible jusqu'au terme de la dernière amnistie des faits de collaboration (1953) - devraient contribuer à éclairer utilement sociologie et psychologie politiques du monde milicien.