L'architecture hospitalière et le soin pour les malades chroniques
Auteur / Autrice : | Coline Periano |
Direction : | Frédéric Worms, Céline Lefève |
Type : | Projet de thèse |
Discipline(s) : | Philosophie |
Date : | Inscription en doctorat le 01/09/2021 |
Etablissement(s) : | Université Paris sciences et lettres |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale École transdisciplinaire Lettres/Sciences |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : La République des Savoirs : Lettres, Sciences, Philosophie |
établissement opérateur d'inscription : Ecole normale supérieure |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
Cette thèse de philosophie de la médecine explore la manière dont le soin, pour les malades chroniques notamment, est conditionné, soutenu et/ou spatialisé par l'architecture des hôpitaux, dans un contexte français et contemporain. Elle se situe dans le prolongement d'une histoire de l'architecture hospitalière qui recherche les théories et éthiques médicales à l'uvre dans le style et les principes des constructions des hôpitaux. Il s'agit ici d'investiguer ce que pourrait être une architecture hospitalière adossée aux pratiques et aux objectifs du soin tels qu'ils sont décrits par la philosophie de Canguilhem et par la philosophie du soin. Chez Canguilhem, la possibilité de donner des normes à son milieu caractérise la bonne santé, ou l'état normal des individus. Une personne en bonne santé est capable de modifier les règles qu'elle donne à son milieu si les paramètres viennent à changer. A l'inverse, une vie pathologique est au contraire éprouvée par un vivant qui a perdu, tout ou en partie, son pouvoir de structuration du milieu. Ces normes ne sont produites qu'à partir du sujet créateurs de sens. Toute structuration du milieu est alors subjectivation du milieu, une opération vitale et psychique qui donne un sens aux choses au regard de la personne. La philosophie du soin rappelle que la médecine, si elle se conçoit comme un soutien à la vie, doit alors aussi être un soutien au sujet, c'est-à-dire, à l'activité normative, vitale, centrée et singulière, qui fonde le sujet. Dans ces conditions, la médecine se doit d'être particulièrement attentive à l'interprétation que le malade fait de son état, au sens qu'il donne à son existence, et à ses tentatives de structurer son milieu. C'est par ce biais que le soignant peut approcher avec justesse la subjectivité de son patient, et ainsi seulement, la soutenir au mieux. Le soin est alors une activité visant à rétablir ou accompagner des normes de vies souhaitables et atteignables pour la personne, en se souciant particulièrement de la manière dont elle habite et se taille un milieu. La thèse explore alors les processus d'investissement, d'attachement et d'ancrage que peuvent créer les malades chroniques dans l'espace hospitalier. Il s'agit d'étudier les cheminements autant physiques que psychiques que les malades chroniques tracent dans l'hôpital, les connotations qu'ils donnent à leur cadre de soin, et de les comprendre comme des opérations visant à subjectiver l'espace hospitalier. Les notions d'hospitalité, d'accueil et d'appropriation sont mobilisées. Elle investigue ensuite la scénographie et les ressources conférées par le bâti pour mener à bien des existences riches et stimulantes, y compris pendant les hospitalisations. Sont décrits les processus par lesquels les personnes développent des rapports à soi, des rapports aux autres et des rapports au monde qui leurs sont propres. Il s'agit de donner une épaisseur et une positivité à la vie des patients à l'intérieur de l'hôpital, qui ne devrait pas être sans cesse référencée (en creux) à celle des bien portants ou à celle du dehors. Les notions de goût de soi, de réalisation de soi et d'estime de soi sont mobilisées. Les actions des malades dans l'espace et les processus de subjectivation de l'espace peuvent constituer des ressources pertinentes pour la médecine. La mise en valeur de cette dimension spatiale des vies peut contribuer à décaler la focale de la médecine qui peut mieux s'ajuster aux effets de la maladie dans la vie. Mieux prendre en compte les malades en action dans l'espace donne également à voir des situations inexplorées par la clinique jusque-là. De nouvelles pratiques de soin peuvent à terme être échafaudées à travers l'expériences des malades dans l'espace hospitalier.